Deux fois bottom up

01/12/2014
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Rencontre de Schaerbeek en Transition © Bral

 

Et à Bruxelles? Les initiatives citoyennes qui naissent un peu partout sont-elles des écoles de la démocratie ou plutôt des petits refuges pour des personnes qui ne veulent plus entendre parler de politique, comme le constatent les sociologues Tonkens et Eliasoph pour les Pays-Bas et les USA? Examinons deux cas bruxellois.

Le FBI à Laeken

Je rencontre Lodhi et Ana dans la Rue Marie-Christine à Laeken. Avec une dizaine de femmes, elles ont formé le collectif citoyen FBI, Fibres Bruxelloises Interactives. Un des points de départ de leur action était le manque d’écoles de devoirs du côté néerlandophone.

Lodhi: “Dans le quartier, il y a 5 écoles néerlandophones mais aucune aide scolaire. Il y avait donc un besoin et on voulait faire quelque chose. Finalement, nous avons décidé de le faire nous-même.” Les femmes ont trouvé un local et une institutrice et ont lancé l’école de devoirs. “C’était assez magique. Des enfants qui parlent le français sur la cour de l’école, parlaient le néerlandais ici.”

Les parents paient chacun 30 euros par mois pour rémunérer l’enseignante. Ou plutôt ‘payaient’, puisque l’initiative s’est arrêtée après un an à cause d’une trop lourde charge de responsabilités pour Lodhi, qui était la porteuse. Or, le FBI continue, avec d’autres actions et d’autres femmes qui prennent le relais. Elles réalisent un documentaire sur l’identité des femmes bruxelloises et le foulard, organisent une table d’hôtes sur la Place Willems...

L’action du FBI illustre bien cette nouvelle forme de participation qu’est la ‘doe-democratie’ (démocratie non pas de discussion mais d’initiative), née d’une frustration face à un certain laxisme ou manque d’efficacité des pouvoirs publics. La contestation politique est également de mise dans leurs actions. Leur première action a ainsi été de contacter plusieurs échevins au cours de la législature précédente, pour les pousser à agir. Lorsque Lodhi décrit le carrousel ‘ce n’est pas moi qui suis compétent’ auquel le FBI a alors été confronté, l’indignation est palpable ; une indignation qui ne se limite pas au quartier. Lodhi met en exergue l’importance pour tous les citoyens de projets tels que NEO au Heysel. C’est cette conviction qui les pousse, en 2012, à organiser une demijournée sur les élections communales. À travers ces initiatives, les femmes du FBI assument un rôle de citoyens contrôleurs ou d’école de la démocratie. Ana: “Le politique n’est rien sans les citoyens. On a notre poids; il faut l’utiliser.”

Schaerbeek en transition 

À Schaerbeek, le mouvement Schaerbeek en transition est présent en force, avec une multitude d’initiatives. Schaerbeek en transition, Repair Café, GASAP... Nous demandons aux militants Candice et Jérôme dans quelle mesure ces collectifs stimulent une analyse et une conscientisation plus globales. 

“Je pense effectivement que ça (les initiatives citoyennes, ndlr) peut venir d’une sorte de frustration par rapport au constat que l’on fait de notre société et de l’envie de faire bouger les choses” nous dit Jérôme Antoine.” 

“Le local a quelque chose de plus humain que le global; il rend plus concret peut-être, plus accessible” ajoute Candide Lenoble.” 

“Mais c’est légitime” pense Jérôme. “Je pense que les grands changements sociétaux viennent d’une multitude de petites initiatives locales et personnelles. Le futur n’est pas aux grands bouleversements globaux. Je suis convaincu qu’une multitude de petits changements a autant de force de changement et d’avenir. Le saut d’échelle se fera naturellement. Par exemple grâce aux Repair Cafés, on a reparlé beaucoup de l’obsolescence programmée des appareils électroniques. Et le fait d’en reparler fait que les politiques vont légiférer en la matière.”

Le macro-changement, fait d’une multitude de micro-initiatives, Candice y croit aussi. “Il y a autant d’énergie dans les collectifs! Le futur est à nous. Non pas contre, mais avec les institutions.”

Candice nous conseille de lire ‘Bolo’bolo, ensemble de propositions pratiques pour sortir du capitalisme’ de P.M., un écrivain suisse qui prône des petits espaces sans capitalisme, des “portes de sortie”. 

Piet Van Meerbeek