Entretien The Shifters : actions concrètes de décarbonation

27/06/2023

Le BRAL a eu un entretien avec Jérémy (co-coordinateur) et Perrine (coordinatrice du débat public) de The Shifters Belgium. Ils nous étaient déjà familiers grâce au bilan carbone de la première version du PAD Mediapark et la pétition citoyenne qu'ils ont soumise au parlement bruxellois. Depuis lors, ils étaient sur notre radar depuis un certain temps - il est temps de faire le point sur leur travail !

 

BRAL : Comment est né The Shifters et pourquoi ? 
Jérémy : The Shifters a vu le jour en 2014 en tant qu'organisation de soutien au Shift Project, créé en 2010 en France par Jean-Marc Jancovici, ingénieur français connu pour sa bande dessinée "Le Monde sans fin"[1]. En 2019, l’association réunissait 1 000 membres dans le Monde. En Belgique, The Shifters Belgium est née dans les faits en 2017 et est devenu une asbl en 2021. C'est cette année-là que le nombre de membres de l’association a commencé à très fortement croître, nous accueillions alors une vingtaine de nouvelles personnes tous les mois à qui nous présentions l’association. Nous en sommes maintenant à 250 membres en Belgique et 20 000 membres dans le monde. 

La vocation de The Shifters Belgium est triple : 

  • Diffuser les idées et travaux de The Shift Project, notamment en les adaptant au contexte Belge. Ceci consiste principalement en la proposition de feuilles de routes sectorielles de décarbonation, accompagnées de propositions d’évolution législatives pour mettre en cohérence les plans et programmations avec les enjeux énergétiques et climatiques. 

  • Sensibiliser et former au changement climatique, de manière à permettre à tout un chacun d’agir concrètement à son niveau, dans les sphères privées et publiques 

  • Créer et activer une communauté de personnes, a-partisane, rassemblées autour de notre objectif commun, à savoir la transition vers une société post-carbone 

BRAL : Comment travaillez-vous ?
Perrine : The Shifters a pour objectif de mettre en place des actions concrètes de décarbonation. Par exemple, nous avons fait un bilan carbone du plan d’aménagement directeur Mediapark. Nous sensibilisons tous types de publics. Par exemple, nous donnons des conférences génériques ou thématiques sur le changement climatique et les actions concrètes pouvant être prises, et animons des "fresques du climat »", atelier durant lequel les participants reconstituent en 3 heures une fresque qui comprend les causes et les conséquences du changement climatique. Le modérateur des Shifters aide les participants à approfondir leurs connaissances et les réoriente si nécessaire. L'intelligence collective du groupe nous fait avancer, en utilisant le GIEC comme guide.  

Nous faisons également pression sur le gouvernement. Nous avons organisé la pétition pour exiger un calcul de l’empreinte carbone des grands projets urbains ainsi que la définition de seuils obligatoires à respecter, nous avons également obtenu une audition citoyenne au parlement à ce sujet. Mais pour être honnête, le suivi parlementaire de cette démarche démocratique nous a déçus. Nous avons consacré beaucoup d'énergie à faire campagne, à informer les gens, à échanger avec les parlementaires en amont, à diffuser notre message par l'intermédiaire d'autres organisations, ... C'était manifestement la première fois que quelqu'un franchissait le seuil d'une telle audition.  Nous n'avons même pas obtenu de compte-rendu écrit de notre audition de la part du Parlement ! Bien que les partis avec lesquels nous nous sommes entretenus, aient été d'accord avec nous et aient apprécié l'idée, nous n'avons constaté que peu de conversion dans la pratique. Au parlement, la proposition est visiblement restée bloquée au stade de l’intention.  

Jérémy : Nous voulons nous concentrer sur la manière dont nous pouvons avoir le plus d'impact et nous nous plaçons au milieu du triangle citoyens-élus-entreprises. Côté élus, nous formulons des propositions d’évolutions législatives aux élus par le biais de discussions avec eux. Bientôt, nous publierons une analyse sur la décarbonation de la mobilité en Région de Bruxelles-Capitale et les nécessaires évolutions à apporter au plan Good Move.  [Mis à jour: vous pouvez lire l'analyse de l'impact de la voiture individuelle à Bruxelles sur le climat ici, leurs propositions ici.]

Quote : Nous avons remarqué que bien que des objectifs politiques aient été fixés, il n’existe aucune feuille de route et indicateurs qui aident à déterminer comment les atteindre. 

Récemment, cependant, nous adressons de nouveaux types de publics : nous travaillons avec les entreprises et essayons d’adresser des publics hors de nos publics habituels, généralement déjà un minimum sensibilisés, pour amener la thématique de la transition juste dans le débat. C’est une histoire que nous écrivons avec le patronat, les travailleurs et les syndicats. Nous avons déjà pu l’expérimenter sur un 1er cas concret que nous pourrons bientôt présenter. 

Notre approche stratégique évolue également. Nous avons remarqué que bien que des objectifs politiques aient été fixés, il existe très peu de feuilles de route ou de panneaux indicateurs qui aident à déterminer comment les atteindre. A côté de projets thématiques, comme Education4Climate qui vise à créer une Académie pour former les enseignants aux enjeux énergie/climat, nous travaillons sur des feuilles de route sectorielles à destination des entreprises et des élus. Cette carence est particulièrement forte pour des secteurs comme la santé, la culture, ou encore le numérique. C’est une évolution importante pour nous, car nous étions historiquement plutôt organisés autour de « petits » projets thématiques, comme par exemple la réalisation du bilan carbone du PAD Médiapark. 

BRAL : C'est beaucoup de travail. 
Jérémy : C'est vrai, nous restons des bénévoles, personne n'est rémunéré dans notre asbl. Nous avons connu quelques difficultés de croissance, par exemple lorsque, pendant une certaine période, 20 membres supplémentaires souhaitaient nous rejoindre chaque mois. Nous avons également beaucoup travaillé sur notre fonctionnement interne et le partage des connaissances. Le climat est une question sensible qui suscite beaucoup d'émotions. Bien que chacun ait sa propre motivation, nous essayons toujours de faire avancer les choses à partir d'une vision commune. 

Perrine : Maintenant que nous avons beaucoup grandi, nous nous efforçons davantage de former, capaciter les personnes qui nous rejoignent. Nous formons nos membres sur des sujets tels que les analyses du cycle de vie, le fonctionnement des politiques à Bruxelles, la législation européenne sur le climat, etc. Nous ne demandons rien en retour. Il s'agit surtout de partager les connaissances que nous avons accumulées en interne. Et ça marche : lors d'une soirée comme celle-ci, il y a souvent 50 personnes présentes. 

BRAL : Vous travaillez toujours autour de la rénovation ?
Perrine : L'idéal est toujours de rénover, mais il faut faire du cas par cas. D'autre part, nous constatons que la réglementation autour du certificat de mesure de la performance énergétique des bâtiments (PEB) a manqué l'occasion d'inclure, en plus de l'étude des émissions d'un bâtiment, les émissions de gaz à effet de serre engendrées par la fabrication des matériaux. Une maison peut être bien isolée grâce à un matériau d'isolation en polyuréthane (PUR), mais ce matériau en lui-même n'est pas respectueux de l'environnement. De toute façon, nous allons nous efforcer d'inclure cette composante dans l'histoire du PEB. Nous ne pensons pas non plus que les chaudières à gaz soient le Saint-Graal, nous devons nous en éloigner également.  

BRAL : Merci pour cette conversation, bonne chance pour l'avenir ! 

 

Plus d’infos : https://www.theshifters.org  

[1] "L'album illustre la rencontre et le long dialogue entre ses deux auteurs – Jancovici jouant le rôle du guide, Blain du candide – sur les sujets de l'énergie : usage à travers l'Histoire, essor des énergies fossiles, et de l'impact de l'humanité sur son environnement et en particulier sur le climat." Source : Wikipédia, consulté le 27/06/2023, https://fr.wikipedia.org/wiki/Le_Monde_sans_fin.

BRAL: Hoe zijn The Shifters ontstaan en waarom? 
Jérémy: The Shifters zijn ontstaan in 2014 als ondersteunende organisatie van The Shift Project, opgestart in 2010 in Frankrijk door Jean-Marc Jancovici, een Franse ingenieur bekend voor zijn strip “Le Monde sans fin[1]. In 2014 zijn De Shifters een vzw geworden. In 2019 waren er in Frankrijk 1000 leden. In België zijn we in de feiten ontstaan in 2017 en werden in 2021 een vzw. Het is in dat jaar dat we ook een beetje ontploft zijn. We organiseerden bijna elke maand een kennismakingsavond met The Shifters en daar ontvingen we vaak 20-tal nieuwe mensen. We zitten nu aan 250 leden in België en 20.000 leden wereldwijd.  

De missie van The Shifters is drievoudig: 

  • De ideeën en het werk van The Shift Project verspreiden, vooral door dit aan te passen aan de Belgische context. Dit bestaat voornamelijk uit het voorstellen van feuilles de route, sectorale draaiboeken om te decarboniseren, vergezeld van voorstellen voor wetswijzigingen om plannen en programma's in overeenstemming te brengen met energie- en klimaatkwesties. 

  • Sensibiliseren en vormingen geven rond klimaatverandering, die je in staat stellen te handelen volgens je eigen kunnen, in de privé- en de publieke sfeer 

  • Een gemeenschap bouwen en activeren van mensen, apolitiek, die zich verenigen rond ons gemeenschappelijk doel, de transitie naar een postkoolstofsamenleving.  

BRAL: Hoe werken jullie?
Perrine: The Shifters heeft als doel concrete acties te realiseren om te decarboniseren. We maakten bijvoorbeeld een koolstofrapport van het richtplan van aanleg Mediapark. We sensibiliseren verschillende soorten publiek. Zo organiseren we algemene en specifieke vormingen over de klimaatverandering en de acties die mensen kunnen ondernemen. We animeren ook workshops waarin de deelnemers “klimaatfresco’s” maken in 3 uur tijd -  een fresco met daarop de oorzaken en gevolgen van klimaatverandering. De moderator van The Shifters helpt de deelnemers te graven in hun kennis en stuurt ook bij waar nodig. De collectieve intelligentie van de groep stuwt ons vooruit, met het IPCC als leidraad.  

We lobbyen ook bij de overheid. We organiseerden de petitie om een koolstofrapport te vragen bij grote stadsprojecten en we verkregen daarover ook een burgerhoorzitting in het parlement. Maar om eerlijk te zijn heeft de parlementaire opvolging van deze demarche ons ontgoocheld. We hebben veel energie gestoken in campagne voeren, mensen te informeren, op voorhand uit te wisselen met de parlementariërs, onze boodschap te verspreiden via andere organisaties, … Het was merkelijk de eerste keer dat iemand de drempel haalde voor zulke hoorzitting.  We kregen zelfs geen geschreven verslag van het parlement over onze hoorzitting! We zijn ook gaan praten met de regionale politieke partijen. Hoewel de partijen die we spraken, ons gelijk gaven en het idee goed vonden, merkten we weinig omzetting naar de praktijk. In het parlement bleef het voorstel geblokkeerd bij goede intenties.  

Jérémy: We willen focussen op hoe we de meeste impact kunnen hebben. We zetten ons in het midden van de driehoek burgers-overheid-bedrijven. Langs de kant van verkozenen gaan we met hen in gesprek over onze voorstellen voor wetswijzigingen. Binnenkort brengen we voor hen een analyse uit over het decarboniseren van de mobiliteit in het Brussels Hoofdstedelijk Gewest en de nodige evoluties binnen het gewestelijk mobiliteitsplan, Good Move. 

Recent mikken we op nog een ander publiek: we gaan nu ook rechtstreeks in gesprek met bedrijven en we proberen een publiek te bereiken dat we nog niet bereikten, dat nog niet veel weet over de klimaatkwestie, om het thema van rechtvaardigheid in het transitie-debat te trekken. Dat is een verhaal dat we schrijven met het patronaat, de werknemers en de vakbonden. We konden al een eerste keer experimenteren met een concreet bedrijf, wat we binnenkort zullen voorstellen. 

Onze strategie evolueerde ook. We merkten namelijk dat er wel beleidsdoelen zijn vastgesteld, maar er bestaan eigenlijk heel weinig draaiboeken of wegwijzers die helpen bepalen hoe die doelen te bereiken. Naast thematische projecten zoals Education4Climate die een academie voor leerkrachten rond energie en klimaat wil opzetten, werkten we ook feuilles de route, draaiboeken, uit die bedrijven en verkozenen kunnen gebruiken. Sectoren waarin zo’n draaiboeken ontbreken, zijn gezondheid, cultuur, en nog een grote werf: de digitale sector. Dit is voor ons een belangrijke evolutie, want vroeger organiseerden we ons eerder rond “kleine” thematische projecten zoals het koolstofrapport van het RPA Mediapark. 

BRAL: Dat klinkt als veel werk
Jérémy: Dat klopt, we blijven nog steeds vrijwilligers, niemand is bezoldigd in onze vzw. We kenden wel wat groeipijnen, bijvoorbeeld toen er een bepaalde periode twintig mensen per maand zich wilden aansluiten. We hebben ook hard gewerkt aan ons intern functioneren en kennisdelen. Het klimaat is een gevoelig thema en maakt veel emoties los. Hoewel ieder zijn eigen motivatie heeft, proberen we toch vanuit een gemeenschappelijke visie dingen in beweging te zetten.  

Perrine: Nu we zo gegroeid zijn, zetten we ook meer in op het vormen (capaciter) van de mensen die we bereiken. We proberen onze leden te informeren over thema’s zoals levenscyclusanalyses, hoe het beleid in Brussel in elkaar zit, de Europese wetgeving rond klimaat, … We vragen daar niets voor terug. Het gaat er vooral om de kennis te delen die we intern opbouwden. En het werkt: op zo’n avond zijn er vaak vijftig mensen aanwezig. 

BRAL: Werken jullie nog steeds rond renoveren?
Perrine: Het ideale blijft nog steeds om te renoveren, maar je moet het ook wel geval per geval bekijken. Anderzijds merken we dat de reglementering rond het certificaat dat de energieprestatie van gebouwen meet (EPB, 'Energieprestatie en Binnenklimaat’) een kans gemist heeft om, naast de uitstoot van een gebouw te bestuderen, ook alle koolstof- en broeikasgassen in te calculeren die nodig zijn om het materiaal te maken. Een huis kan misschien goed geïsoleerd zijn dankzij polyurethaan (PUR) isolatiemateriaal, maar dat materiaal op zich is niet milieuvriendelijk. We gaan ijveren om die component toch nog te integreren in het EPB-verhaal. Ook gasketels zijn volgens ons niet de heilige graal, daar moeten we toch ook van weggeraken.  

BRAL: Bedankt voor dit gesprek, nog veel succes in de toekomst! 
 

Meer info: https://www.theshifters.org  

[1] Het stripalbum gaat over de ontmoeting en dialoog tussen Jancovici, die de rol van gids opneemt, en Blain, de tweede auteur die de openhartige speelt. Ze hebben het over energie: het gebruik ervan doorheen de geschiedenis, fossiele energie en de impact van de mens op zijn omgeving en vooral dan het klimaat. Bron: Wikipedia, geraadpleegd op 27/06/2023, https://fr.wikipedia.org/wiki/Le_Monde_sans_fin.

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