NEO au-dessus des lois, ça suffit !

19/06/2023
Aperçu NEO Brussels
NEO Brussels 2023

Excepté ceux et celles qui sont à la manœuvre du projet NEO et de son centre commercial, ni la société civile ni les élu.es ne sont mis en mesure de suivre l’imbroglio urbanistique, juridique et financier du projet. Une nouvelle modification du Plan Régional d’Affectation du Sol (PRAS) permettant le projet est de nouveau à l’enquête publique sans aucune communication préalable sur les conditions de poursuite de ce projet. 

Cette demande de modification a pourtant déjà été annulée trois fois par le Conseil d’État (en 2015, 2017 et 2020). Cerise sur le gâteau, non contente d’essayer de faire passer coûte que coûte un projet maintes fois recalé, la Région s’assied une fois de plus sur tous les préceptes de base de la démocratie urbaine en réalisant l’enquête publique sur la quatrième mouture de ce projet en plein été, avec une clôture le 3 août, et ce, alors que l’arrêté autorisant une telle temporalité n’est pas publié. 

Quel ne fut pas l’étonnement de la Plateforme interrégionale pour une Economie durable et du comité Triangle Houba-Sobieski-Heysel d’assister pour la quatrième fois depuis 2013 à une tentative du gouvernement régional bruxellois de modifier le PRAS en vue de permettre la création d’une zone d’intérêt régional (ZIR) autorisant le programme de NEO, y compris son méga centre commercial. 

En effet, la dernière annulation du projet de PRAS date de 2020. Le Conseil d’État a décidé d’annuler l’arrêté au motif que les garanties concrètes sur la table pour répondre aux besoins en mobilité étaient insuffisantes. Il est clair que le centre commercial aura un impact très néfaste sur la mobilité. L’étude d’incidences du projet annonçait 13,3 millions de visiteurs par an (contre 4,5 millions à l’heure actuelle) dont 9,6 millions étaient associés à la seule fonction commerciale. Elle prévoyait une augmentation de 50% de la congestion dans les voiries adjacentes déjà engorgées. L’autre motif d’annulation était la modification de l’article 18 du PRAS qui élaborait un régime d’exception pour le programme NEO au regard des autres ZIRs. 

Des instances d’avis régionales défavorables

Suite à cette troisième annulation, le gouvernement régional a décidé de mettre à l’enquête publique une nouvelle mouture au printemps 2022, laquelle a suscité un tir de barrage de tous les acteurs autorisés et y compris de la part de la Commission régionale de développement (CRD), l’instance d’avis supérieur du gouvernement.

Cette dernière s’interrogeait « sur la raison de passer par une procédure de modification partielle du PRAS pour cette zone, à la seule fin de permettre le développement d’un projet commercial » et « sur l’urgence de cette modification partielle du PRAS, alors qu’une procédure de révision globale du PRAS est en cours et que le programme n’est pas encore établi clairement ». « Sans le centre commercial, la modification du PRAS n’est pas nécessaire, puisque les affectations actuelles permettent la réalisation de commerces comme complément usuel des fonctions internationales de la zone. »

Le gouvernement n’en a cure et s’acharne pour revenir à la charge moins d’un an plus tard avec une quatrième version de modification du PRAS, dont la seule raison d’être est toujours de permettre la réalisation du fameux centre commercial pourtant aujourd’hui décrié par tous les acteurs économiques. 

En effet, en mars 2022, Brupartners, l’instance d’avis régional rassemblant les acteurs socio-économiques de la Région, s’était montré sceptique sur le projet. Elle estime qu’ « en se focalisant sur un périmètre spécifique limitant la vision à l’échelle régionale, cette modification du PRAS représente un contresens réglementaire » et « que l’impact de ce projet sur le secteur du commerce de détail de proximité et sur l’offre commerciale du centre-ville de Bruxelles sera négatif. » Elle ajoute « que le besoin d’un centre commercial dans ce périmètre mériterait d’être réactualisé à l’aune de données récentes tenant compte du contexte actuel (ce besoin ayant été estimé il y a plus de dix ans) ». 

Un mépris des procédures

Au vu de ceci, il est évident que le gouvernement est conscient que le projet suscitera l’ire des habitants, associations et autres représentants de la société civile. Est-ce pour cela qu’il décide de mettre le projet à l’enquête publique en plein creux de l’été (clôture le 3 août) ? Réitérant la stratégie de 2016 où les habitants avaient découvert la lecture du rapport d’incidences de 600 pages sur le même objet durant leur mois de juillet. La répétition du scénario laisse peu de place au doute. 

Au delà du mépris que cette démarche exprime pour la société bruxelloise dans son ensemble, celle-ci est par ailleurs illégale ! Les garanties de publicité de l’enquête, déjà insuffisantes en l’état, supposent que plus de la moitié de celle-ci se déroule en dehors des périodes officielles de vacances scolaires. Or l’arrêté destiné à fixer les nouvelles périodes de congé scolaire n’a pas encore été publié au Moniteur belge. Le gouvernement n’en a cure et passe outre. Il veut faire passer NEO envers et contre tout. 

Au vu des avis critiques de la société civile et des acteurs institutionnels (CRD, BruPartners) réitérés depuis plus de 10 ans, on peut légitimement se demander ce qui motive vraiment le gouvernement régional à persévérer. Qui a aujourd’hui intérêt au projet NEO ? 

Ce que nous voulons

La Plateforme et le Comité Triangle Houba-Sobieski-Heysel demandent l’annulation de l’enquête publique en cours et son report après l’été ou, a minima, son extension afin de respecter le prescrit légal actuel. 

En outre, la Plateforme et le Comité Triangle Houba-Sobieski-Heysel réitèrent leurs demandes :

  • d’une plus grande transparence sur les engagements pris, les montants dépensés ou engagés pour un projet dont la valeur globale dépasse le milliard d’euros ! ;
  • d’une réévaluation de l’ensemble du projet en concertation avec les habitants et les acteurs socio-économiques ;
  • de repenser le réaménagement du plateau du Heysel de façon démocratique et équilibrée, au profit de l’intérêt général.

Signataires : ARAUBond Beter Leef MilieuBRALCSC BruxellesInter-Environnement Bruxelles (IEB)UCMUnizo  • Comité Triangle Houba-Sobieski-Heysel 

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