Conclusion : Prémétro+, une alternative au Métro 3 et ... au demi-métro Albert-Nord
Notre proposition a été élaborée comme une alternative pragmatique au Métro 3, mais elle permet également d’éviter un scénario tout aussi problématique : la réalisation d’un demi-métro entre Albert et la gare du Nord. Parce que des dépenses ont été déjà engagées sur ce tronçon et que le coût du tunnel vers Bordet est astronomique, le prochain gouvernement pourrait être tenté de se limiter à «/métroïser » le tunnel de Prémétro+.
Si une telle décision permettrait aux gouvernants de ne pas (trop) perdre la face, elle dessine néanmoins un scénario délétère pour le réseau et donc les usagers. En effet, mettre en service un demi-métro entre Albert et Nord entraînerait une nette dégradation du réseau et de son attractivité.
D’une part, cela générerait de nouvelles correspondances pour de nombreux usagers :
- Le tram 4 serait limité à Albert, imposant aux passagers venant du sud une correspondance pour atteindre la gare du midi, le centre-ville et la gare du Nord.
- Le tram 3, appelé à devenir le tram 10 (moyennant un changement d’itinéraire au nord de van Praet), serait limité à Rogier. Un usager voulant rejoindre Uccle ou Forest depuis le nord aurait ainsi à subir deux correspondances.
- Le tram 55 serait limité à la gare du Nord. Les usagers de la ligne perdraient ainsi la connexion directe avec Rogier, où peut s’effectuer la correspondance avec le réseau de métro (ici, les lignes 2 et 6).
D’autre part, un demi-métro Albert-Nord induirait une baisse de fréquence : aux heures de pointe, il y aura 3 min. 25 entre deux métros, contre 2 min.30 entre deux trams aujourd’hui. En plus de la dégradation du transport public, rappelons également que la réalisation d’un demi-métro implique une dépense de 400M€ pour le seul tunnel sous le Palais du Midi – sans compter le coût social et patrimonial de sa démolition-reconstruction.
➤ voir annexe : démolir 15 000 m2 d'équipements pour 120 m de tunnel.
Enfin, à en croire la STIB, exploiter un demi-métro ne serait « pas viable à long terme1». C’est que l’exploitation de cette ligne rabotée poserait des problèmes de remisage, le dépôt appelé à accueillir le Métro 3 se situant en bout de ligne (Bordet). En d’autres termes, la STIB avance que la phase 1 du projet n’est pertinente qu’en cas de réalisation de la phase 2. Encore une fois, le saucissonnage du projet alimente une logique du fait accompli caractéristique de l’histoire du Métro 32.
Parce que les deux phases du Métro 3 sont interdépendantes et que la seconde (l’extension vers Bordet) ne sera probablement pas réalisée, il est plus que jamais nécessaire de considérer le projet dans sa globalité et de renverser cette logique du fait accompli. Si l’extension vers Bordet, aujourd’hui plus qu’incertaine, est une condition à l’exploitation à long terme du tronçon Albert-Nord, la prévoyance la plus élémentaire devrait conduire à l’abandon pur et simple du projet. Dans l’immédiat, cela signifie de mettre un terme aux travaux en cours à la station Albert, dont la réalisation impliquerait de facto la mise en service d’un demi-métro qui, on l’a dit, provoquerait une réorganisation délétère du réseau de la STIB.
Nous sommes tout à fait conscients qu’abandonner le Métro 3 dans son ensemble implique des coûts de renoncement. Ceci dit, la mise en œuvre du Prémétro+ resterait moins coûteuse que la réalisation d’un demi-métro Albert-Nord – et encore moins si l’on ajoute au coût du demi-métro celui de la reconstruction du Palais du Midi à charge de la Ville de Bruxelles.
Face à la déconfiture totale du Métro 3, la proposition Prémétro+ constitue une alternative réaliste et ambitieuse. Une alternative qui améliore la desserte du centre et du nord-est avec des lignes directes. Une alternative qui, tout en pouvant absorber la capacité requise aux heures de pointe, offre aux Bruxellois.es un réseau attractif, et ce pour tous leurs déplacements.
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Notes
1. L’Écho, “Métro 3: une demi-ligne Albert-Nord pas viable à long terme, selon le CEO de la Stib” ; 30/05/23.
2. Logique du fait accompli explicitée et assumée par l’ancien secrétaire d’État à l’Urbanisme au sujet du chantier Toots Thielemans/Palais du Midi : « On avait décidé de rendre tout irréversible. On a prévu de l’argent, on a signé les contrats, délivré les permis (…). Et pour éviter que celles et ceux qui étaient contre le métro bloquent tout le dossier – parce que c’est typiquement bruxellois : on veut quelque chose et ça prend vingt ans pour le réaliser – j’ai voulu que ça avance (…) et on a fait en sorte que c’était irréversible. » (extrait du documentaire Stalingrad, avec ou sans nous ? produit par le Centre Vidéo de Bruxelles : https://www.youtube.com/watch?v=GeFpQXBifsI)