Plan d'Aménagement Directeur (PAD) Maximilien-Vergote : pas le pire, mais manque d’ambition

15/12/2023

Le PAD Maximilien-Vergote est loin d'être le pire PAD mis sur la table. De nombreux aménagements prévus dans des programmes liés seront, on l'espère, bénéfiques au quartier. Cela dit, il manque d'ambition sur plusieurs fronts pour vraiment pouvoir répondre aux besoins du quartier et aux besoins régionaux. Les questions démocratiques liées aux PADs ne sont également pas tout à fait résolues. 

Vous trouverez l'analyse intégrale ci-dessous.  

Pour réagir, inspirez-vous librement de notre article et de notre analyse. A envoyer jusqu’au 19 décembre via l’adresse mail max@perspective.brussels ou via le formulaire de réponse 

Le Plan d'Aménagement Directeur (PAD) Maximilien-Vergote est loin d'être le pire PAD mis sur la table. De nombreux aménagements prévus dans les programmes qui y sont liés comme le Contrat de Quartier Durable (CQD) Héliport-Anvers et le Contrat de Rénovation Urbaine (CRU) 1 Citroën-Vergote seront, on l'espère, bénéfiques au quartier. Une Senne à ciel ouvert traversant le parc Maximilien et des espaces publics réaménagés en sont un exemple. La "clause Heyvaert" garantissant un minimum de logements à finalité sociale s'y retrouve. Cela dit, il manque d'ambition sur plusieurs fronts pour vraiment pouvoir répondre aux besoins du quartier et aux besoins régionaux. Les questions démocratiques liées aux PADs ne sont également pas tout à fait résolues.  

Calendrier pernicieux pour la démocratie urbaine  

Alors que cela implique la lecture de plus de 2000 pages, la Région a décidé de mettre deux PADs à l'enquête publique simultanément : le PAD Max et le PAD Défense.  Le processus d'analyse chronophage de ces dossiers ne peut pas réalistiquement être entrepris concomitamment. Le BRAL estime qu'il est regrettable que perspective.brussels et le Gouvernement bruxellois n'aient pas répondu favorablement aux demandes associatives d'étaler les enquêtes publiques tout au long de l'année. Cela permettrait aux structures et aux citoyens s'intéressant à l'aménagement du territoire de formuler un avis, étant donné que le processus de rédaction d'un PAD n'inclut aucun moment de cocréation en amont – en ce moment, hoop doet leven.   

La maitrise foncière comme levier de développement urbain abordable 

La Ville de Bruxelles est le plus grand propriétaire foncier sur la zone concernée par le PAD et plus particulièrement sur les trois secteurs de mutation (comme ils sont nommés) qui serviront de locomotives de développement. Comme annoncé dans son Memorandum pour les élections régionales de 2024, le BRAL estime qu'il est impératif de conserver la propriété de terrains publics et de n'y développer que du logement public.  

Le PAD Max manque d'ambition à ce niveau. Il était d'ailleurs intéressant de voir la différence entre les versions initiales du volet règlementaire néerlandophone et francophone. La version francophone, étant la plus aboutie, contraint les projets de plus de 2.000 m² à minimum 25% de logements "publics". Cela va des logements sociaux locatifs aux logements acquisitfs de type City Dev, dont les prix seront à terme régis par le marché privé. Pour le même type de projet, la version néerlandophone parle soit de 25% de logements sociaux locatifs au sens strict du terme, soit 50% de ces logements "publics".  

Le manque d'ambition de la part des opérateurs publics porteurs du projet est démontré de manière flagrante ici. Dans une ville ou plus de 54.000 ménages sont sur liste d'attente pour un logement social, ce n'est pas avec ce genre de mesures qu'on solutionnera la crise du logement abordable.  

Il n'est pas pour autant nécessaire de construire 100% de logements sociaux sur ces parcelles. Le BRAL demande par contre de rehausser les ambitions et répondre aux besoins du Territoire Nord. Une maitrise long-terme sur les terrains et les logements permet d'assurer des prix abordables pour toutes et tous. Le marché privé n'est pas en mesure de garantir cela.  

Plus d'habitants, mais moins d'équipements ?!  

Selon les variantes analysées, le PAD prévoit entre 1.274 et 1.381 nouveaux logements, bon pour 3.200 à 3.470 nouveaux résidents. Pourtant, on observe que les équipements collectifs vont diminuer, 3.800m² à 5.400m² seront remplacés en grande partie par du bureau et du logement.  Le diagnostique du Territoire Nord établit pourtant un constat clair : la zone est actuellement déficitaire en équipements. Avec l'augmentation prévue de la population, il est à prévoir que cette situation s’aggravera avec les années.  

Est-il réellement nécessaire de permettre des bureaux dans certaines zones du PAD sachant que le quartier Nord voisin compte 9% de vacance immobilière ?  

Le BRAL estime que les équipements collectifs doivent être une priorité pour un quartier qui en manque.  

Penser la ville à partir des espaces publics  

Le BRAL n'est pas dogmatiquement contre les tours. Celles-ci peuvent offrir de la densité et libérer l'espace public qui se fait rare. Il faut, cela dit, qu'elles répondent à des besoins spécifiques, que leur localisation soit précisément choisie et qu'elles ne servent pas à alimenter la spéculation immobilière du secteur privé. Le quartier Manhattant ou la tour Up Site voisin(e) témoignent exactement ce qu'il ne faut pas faire ! L'espace public à leurs pieds atteste également à quel point la vie aux pieds des tours peut être désagréable. Leur influence sur le microclimat (vents, ombres, sentiment de domination, etc.) est importante et le cadre de "vie" du quartier Nord en paie souvent les conséquences.  

La densification importante à travers la production de plus de 1.200 logements va augmenter les besoins d'espaces publics qualitatifs et agréables.  

Il est impératif que ceux-ci soit pensés à partir de leurs usages futurs et ne subissent pas les incidences de certaines tours potentiellement construites dans le périmètre du PAD. On pense par exemple au parc Maximilien réaménagé, les bouts de voirie à accès limité de l'avenue de l'Héliport ou encore la cours de l'école Saint-Roch.  

Tant de démolitions, tant de reconstructions 

Le PAD Max laisse planer de l’ambiguïté quant aux démolitions-reconstructions. La programmation favorise le remploi du bâti lorsque possible, mais ouvre la porte à plusieurs démolitions-reconstructions dans certains secteurs de mutation. Le volet stratégique indique très clairement quels bâtiments seront conservés via le symbole “Conservation du bâti” mais pour de nombreux autres, c’est un “Remploi potentiel du bâti” qui vaudra.  

Le manque de garanties que le bâti sera en grande partie conservé laisse penser que plusieurs bâtiments seront démolis.  

Les déchets produits par les opérations de démolition-reconstruction ne se justifient plus avec la crise climatique actuelle. Nous estimons qu’il faut partir de la conservation du bâti existant pour redévelopper les quartiers et le PAD Maximilien est déficient à ce niveau. 

Où est la place de l'industrie urbaine ?  

La ville remplace les fonctions du passé par des fonctions plus attractives ou "adaptées" à la vie urbaine contemporaine. Pourtant, maintenir la fonction productive proche des centres ville porte de nombreux avantages sociaux, économiques et environnementaux. Le canal reste à certains endroits un haut-lieu de l'industrie bruxelloise. A d'autres, il a cédé la place au logement, trop souvent de luxe. Dans la vicinité directe du PAD, à côté du waterfront haut-de-gamme, il accueilliera également un musée à portée international et un grand centre sportif dans les années à venir.  

Il reste un site où des activités productives sont prévues dans les zones centrales du PAD. L'ilot dit de la Ferme des boues est censé accueillir minimum 40% d'activités productives et maximum 40% de logement. Nous remettons sérieusement en question cette cohabitation qui s'avère déjà compliquée étant donné que "la nature des activités [doit être] compatible avec le logement".  

La réforme du PRAS démographique datant de 2013 a démontré que cette proximité ne marche pas. Les Zones d'entreprise en milieu urbain (ZEMU) créées à ce moment ont chassé l'industrie des quartiers, comme ça a été le cas derrière le quai de Biestebroeck à Anderlecht. Les activités productives et logistiques permises dans la zone avaient des incidences trop élevées pour les nouveaux logements.  

Le BRAL craint que ce scénario se répète sur le site de la Ferme des boues et que l'industrie doive à terme déménager. Nous n'allons absolument pas dans la direction de la Ville de Bruxelles qui souhaite remplacer une grande partie de l'industrie par du commerce.  

Maintenir de la logistique et des activités productives en plein centre a un intérêt pour la Région. Le BRAL demande donc de dédier la Ferme des boues à l’industrie urbaine, la fonction de logement déjà bien représentée dans le périmètre du PAD et en dehors. 

Pour réagir, inspirez-vous librement de notre article et de notre analyse. A envoyer jusqu’au 19 décembre via l’adresse mail max@perspective.brussels ou via le formulaire de réponse. 

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