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Maryem : « Ce projet représente beaucoup pour moi. C’est ma vie, c’est ma fierté. »
Du Sénégal à la Belgique, il y a approximativement 6000 km. Il y a presque autant d’étapes dans le long parcours de Maryem, une femme pleine d’énergie et qui, malgré ses conditions d’existence difficile, a décidé de s’engager. Du Sénégal jusqu’en Belgique, à Bruxelles, au CLTB…
Maryem est une femme volontaire : d’origine sénégalaise, elle est arrivée seule en Belgique en 2012. Demandeuse d’asile, elle s’est battue pour obtenir le statut de réfugiée. Elle y est parvenue en 2014, après avoir séjourné deux ans dans un centre de la Croix-Rouge. En 2016, elle a pu faire venir son fils en Belgique. L’obtention du statut de réfugié a permis à Maryem de travailler comme commis de cuisine et de suivre deux formations professionnelles dans ce même domaine. C’est alors qu’elle entend parler par une connaissance du projet CLTB. Fin 2014 - début 2015, Maryem pose sa candidature en vue d’obtenir un logement. Étant alors au chômage, c’était impensable pour elle d’obtenir un crédit via une banque classique.
Si Maryem reconnaît qu’au départ sa participation au CLT était liée à son besoin d’obtenir un logement, elle se rend compte aujourd’hui qu’elle lui apporte bien plus ; grâce entre autres au projet CitizenDev. Cela passe par un soutien de la part de Gérardo et Albert, les deux travailleurs sociaux CitizenDev attachés au CLTB, pour toutes les démarches administratives qui concernent aussi bien le lancement de la Green Cantine : « Actuellement nous aussi nous avons un projet, celui de Green Cantine. On est débutantes, mais on veut aller plus loin encore. », que dans sa vie de tous les jours.
Grâce à la Green Cantine Maryem s’est non seulement découvert des qualités professionnelles comme cuisinière et gestionnaire mais elle a également pris une place, aussi bien au sein du CLT que dans la société bruxelloise en tant que femme et en tant que représentante d’une autre culture. Maryem a gagné en autonomie et a pris confiance. Les effets positifs de la Green Cantine ne se font pas seulement ressentir auprès des femmes qui l’animent en leur donnant une place, plus de pouvoir sur leur propre vie, elle favorise aussi les liens entre des personnes venues d’univers différents qui se rencontrent à son occasion. Son témoignage illustre la richesse du projet Green Cantine « Je ne suis plus juste une candidate au logement. On a des activités, on fait des catering, des tables d’hôtes, on fait vivre le quartier. Les personnes âgées sont invitées aux événements, ainsi que des personnes qui vivent seules chez elles. Les enfants aussi. Voilà tout ça, ça va plus loin que le logement. »
L’histoire de Maryem raconte non seulement la trajectoire d’une femme qui prend et trouve place mais aussi celle d’un projet qui favorise la solidarité horizontale et, ce faisant, fait communauté. Maryem en atteste : « Ce projet représente beaucoup pour moi. C’est ma vie, c’est ma fierté. »
Portrait réalisé par Garance Roberti de Winghe, Céline Peeters et Victoria Uyttenhove
Léonor, une cuisinière qui a les pieds sur terre
Léonor est engagée et volontaire à la Green Cantine du Community Land Trust Bruxelles (CLTB) dans le quartier Louise à Bruxelles. Dynamique et extravertie, elle participe à ce projet depuis fin 2019. Sa fibre culinaire et son envie de s’engager lui ont permis de faire ce qu’elle aime aujourd’hui : travailler avec des femmes venues de différents pays d’Afrique autour d’un projet culinaire commun.
« Je décris mon parcours professionnel comme un grand voyage, composé de rencontres et d’opportunités ». Après ses études à l’Ichec, Léonor n’était pas très épanouie, sans pour autant regretter son choix d’études. « La cuisine a toujours été quelque chose qui m’a très fort animée » dit-elle, tout en expliquant qu’elle a eu beaucoup de mal à l’assumer et à se lancer dans cette voie. Du statut de freelance à son emploi chez Delhaize, en passant par une formation en cuisine aux Etats-Unis et en Angleterre, Léonor a pu explorer une grande variété de facettes du secteur alimentaire. Avec ses douze ans d’expérience professionnelle Léonor est arrivée, en tant que bénévole, dans le projet de la Green Cantine via une de ses connaissances qui l’a rapidement mise en contact avec Dado, l’accompagnateur du projet.
Green Cantine est une table d'hôtes du CLTB gérée par un groupe de femmes qui propose des spécialités afro-belges. Léonor a été très vite motivée par l’idée d’en faire partie. Sa dimension sociale l’a attirée, certainement parce qu’elle manquait dans ses précédentes expériences professionnelles : « Je ressentais une volonté de changer et d’utiliser l’alimentation comme un outil pour travailler l’inclusion et tisser des liens. Les quelques fois où j’ai fait du social, ça m’a apporté tellement de joie ». Au-delà du lien social ainsi créé, le projet lui donne le moyen de faire de nouvelles expériences : « C’est une façon pour moi de mieux comprendre l’approche nécessaire pour aller dans le sens de l’inclusion, de l’épanouissement personnel et également professionnel des femmes de la Green Cantine ».
La présence d’une cuisinière expérimentée est très précieuse au projet : s’il fonctionnait déjà bien avant son arrivée, Léonor lui a apporté un certain réalisme. En effet, son expérience professionnelle permet aux autres membres du groupe d’ouvrir les yeux sur certaines réalités de terrain : le temps qu’un tel projet nécessite, le style de vie des Bruxellois et la faisabilité de certaines propositions de recettes. « Je suis donc là pour leur rappeler que c’est très bien de rêver parce que c’est ce qui va nous motiver. Mais après il faut redescendre sur terre et faire les choses par étapes, sans se brusquer et en étant attentifs aux contraintes, tout en proposant quelque chose de professionnel. »
La relation que Léonor entretient avec les femmes de la Green Cantine est basée sur le principe du donnant-donnant. Si elle lui apporte son expérience professionnelle en échange, le projet lui permet d’élargir son horizon culinaire. Avant ce projet, elle n’était pas du tout familière avec la cuisine africaine. « C’est une découverte permanente », nous dit-elle enthousiaste. « La beauté de ces femmes qui savent cuisiner, c’est l’idée de proposer quelque chose qui a une couleur, pour la Belgique aussi. On a tout à apprendre d’elles et leur message est puissant : ‘ Voilà notre cuisine, voilà ce qu’on aime, voilà qui on est, on habite en Belgique et voilà l’effort qu’on fait vers vous’ ».
Portrait réalisé par Garance Roberti de Winghe, Céline Peeters et Victoria Uyttenhove
Marianne, à cent à l’heure pour le Local
Hollandaise d’origine, Marianne est une femme de conviction qui sait ce qu’elle veut. Pensionnée passionnée, elle aime à la fois « utiliser sa tête et ses mains » pour réaliser ses projets. A côté de ça, elle aime se balader dans les bois, prendre soin de son jardin et rêve d’apprendre à faire de la couture avec une machine. Investie depuis le début dans son lieu de vie, elle a vécu de près les évolutions du quartier.
« Moi je vis dans ce quartier depuis 1979. Cela fait quarante ans que j’habite dans la même maison et la seule chose qui s’est passée, c’est que j’ai déménagé du premier étage vers le rez-de- chaussée ». Le quartier Brabant n’a donc aucun secret pour Marianne : elle y vit, s’y investit et y entretient une multitude de relations depuis de nombreuses années. Son engagement dans le quartier a cependant évolué : « Au début, lorsque j’ai emménagé, je partais le matin tôt et je revenais tard le soir. A ce moment-là, je ne me rendais pas tellement compte de ce qui s’y passait.»
Toutefois, Marianne n’a pas attendu qu’on vienne la chercher pour s’impliquer. Déjà très active dans sa vie de travailleuse, pour elle, le bénévolat n’est pas quelque chose de nouveau. Avant la concrétisation du Local de Quartier, plusieurs activités avaient lieu à proximité de la Rue Verte: le lien téléphonique, la table d’hôtes et des animations autour d’un four à pain mobile. « Ce four à pain sert à faire des pizzas : il est utilisé dans la rue pour faire des fêtes, etc.». Le Local de Quartier s’inscrit donc dans la continuité d’un engagement de plus longue durée.
« Il y a des moments de la journée où il faut faire quelque chose et il faut être quelque part» Bien qu’elle ne compte pas les heures qu’elle passe au Local, Marianne n’est pas là pour combler son temps libre. Avec le Local, elle se voit investie d’une mission, elle ne s’engage pas dans ce projet pour elle-même : « Moi, je ne suis pas dans le Local pour passer le temps ou par manque de contact ; je suis bien entourée. D’ailleurs, à mon avis, c’est une condition sine qua non : on ne peut pas faire grand-chose pour les autres si on n’est pas bien soi-même. » On l’aura compris, ses journées ne manquent pas de permanences, de rencontres, ni même de préparatifs de la table d’hôtes qu’elle organise une fois par mois. Même si ce n’est son objectif principal, il arrive que le Local de Quartier permette à Marianne de faire des rencontres : « C’est plus rare, mais il est arrivé que je fasse connaissance de gens qui habitaient dans la même rue que moi, que je ne connaissais pas auparavant et avec qui j’ai des choses à partager. Disons qu’on fait des rencontres sans aller les chercher.»
En réalité, ce qui la motive surtout c’est de recréer cette ambiance d’entraide d’autrefois : « Moi j’ai connu le temps où il y avait beaucoup plus d’entraide, des contacts entre les gens. Moi je suis là pour aider à rétablir un peu ce genre de liens et par la même occasion faire quelque chose d’utile. » De plus, le Local a permis de fédérer et de visibiliser les activités du quartier. « C’est aussi un lieu où on peut se rendre compte que ceux que l’on considère comme différents sont souvent beaucoup plus proches de nous qu’on le pense. »
Portrait réalisé par Montaine Kayaert, Romane Marchal et Lucie Roba
Serigne, un passeur de cultures à Matonge
Serigne est un manager culturel, passionné par les jeux traditionnels africains, les arts martiaux et le football, et avant tout un homme qui rêve et qui sait rassembler. Il apprécie particulièrement discuter jusqu’au bout de la nuit avec ses amis de son parcours de vie, de ses projets en cours et de ses réflexions.
En 2013, il fuit le Sénégal, son pays natal et vient en Belgique pour des raisons politiques après avoir réalisé des téléfilms sur l’homosexualité, bannie dans son pays. Lors de son arrivée en Belgique, il suit une formation de médiateur culturel, ce qui l’aide à lancer le collectif JOUWAii soutenu par CitizenDev et le Contrat de Quartier, qui cherche à valoriser les jeux traditionnels africains au sein de la commune d’Ixelles.
Parmi les personnes qui l’ont aidé, Serigne ne manque pas de citer Piet et Kinch, qui ont facilité sa participation à la table des connecteurs. A la suite de cela, il s’est joint au projet CitizenDev, qui « permet une participation massive des habitants et des populations à un projet proposé par les citoyens. Avec CitizenDev, c'est du bas vers le haut ».
Son collectif JOUWAii a pour credo de défendre les jeux comme alternative à la solitude et au repli sur soi. Au centre du projet donc, mettre le lien au coeur du quartier, via une synergie des jeux africains comme l'awalé, le yoté, le yakabatiya, le woure, et bien d’autres jeux ancestraux de plateau, de figurines, d’ambiance, de force, de danse et de chanson.
Serigne tient d’ailleurs beaucoup au vivre-ensemble des communautés africaines et citoyens bruxellois que permettent les interactions et dialogues joyeux suscités par le jeu. Sensibilisé à la gentrification et la ghettoïsation des communautés, il dit que « les jeux permettent aux gens de créer des liens entre eux, de créer le vivre-ensemble, de commencer à discuter, d’échanger, et ça permet aux gens de se retrouver. » Le collectif Jouwaii non seulement transmet l’apport pédagogique des jeux africains, qui « parlent de démocratie, de liberté de circulation, de solidarité, de partage …» mais il participe également à leur sauvegarde car même en Afrique ils sont menacés de disparition. Serigne ne manque pas alors de désigner le smartphone comme principal coupable.
Il les présente dans des écoles, notamment à Saint-Boniface, ou dans des maisons de la culture comme Kuumba. Mais aussi et surtout lors de l’African Traditional Games Festival, qui a eu lieu durant trois jours début mai 2019, autour d’un parcours de 17 stands - un par pays. C’était pour lui une grande réussite. Un véritable melting-pot de nationalités qui échangent: « des Bulgares, des Belges, des Français, des Congolais, des Sénégalais, des Rwandais. » Il a même reçu un écho favorable de la part des autorités sénégalaises, venues aux côtés de « députés, de maires, de bourgmestres et échevins » belges. Une belle revanche … « C’était fascinant » dit-il, en espérant poursuivre l’aventure en Afrique, au-delà de CitizenDev.
Portrait réalisé par Céline Mathijsen, Eléonore Offermans et Leeloo Saweryniuk, étudiantes de l’Université Saint-Louis-Bruxelles
Victor : un référent pour les coiffeurs de Matonge
Parmi les initiatives citoyennes soutenues par CitizenDev en 2019, il y a l’étonnant projet de Victor. Insertion socio-professionnelle, reconnaissance des talents des coiffeurs de Matonge, mise en avant de la spécificité africaine, autant de facettes qui composent le projet “Dynamique Matonge”.
Victor, 67 ans, a toujours été fin connaisseur de Matonge. En effet, s’il a d’abord vécu au Congo en tant que professeur et directeur d’école, il vient ensuite à Bruxelles où il fait une longue carrière dans l’insertion sociale avec le CPAS de Bruxelles à Laeken, un centre d’alphabétisation et le SPF justice en tant que tuteur MENA. Il cherche ensuite à s’engager encore plus dans le social en poursuivant de nombreux engagements, par exemple en étant membre dans les conseils d’administration d’associations africaines jusqu’au niveau européen. En 2017, quand le projet commence, Victor est donc connu comme une personne ressource du quartier, un véritable conseiller. Comme il vient se coiffer à Matonge depuis des décennies, il connait bien la galerie et est ami avec les coiffeurs les plus anciens.
Cet investissement en tant qu’acteur social et sa bonne connaissance des coiffeurs l’amènent à se faire inviter par le BRAL à la Table des Connecteurs et les Métalabs de CitizenDev. C’est ainsi qu’il prend connaissance des problèmes liés au titre d’exercice des coiffeurs de la galerie Matonge : la majorité travaille illégalement sous statut d’ASBL, alors qu’on est dans une galerie commerçante. “Les gens ne se soucient pas de leur insertion socio-professionnelle, et travaillent au noir, alors que la coiffure, c’est un métier protégé, il faut avoir un titre, avoir suivi une formation”. La plupart sont chômeurs ou au CPAS, et leur activité est à tort considérée comme complémentaire. Cela les pousse à travailler dans la clandestinité au lieu de construire une carrière. “Comment peut-on comprendre que quelqu’un qui travaille ici depuis 32 ans n’a pas le titre de coiffeur?”
C’est là qu’intervient le projet “Dynamic Matonge”. En 2017, la commune demande la régularisation du travail non-déclaré, et fait faire des contrôles toutes les deux semaines. Victor amène alors les anciens coiffeurs qu’il connaît vers l’un des centres de validation des compétences, devant un jury pour une demi-journée à l'EFP Uccle, en vue de l’obtention d’un titre officiel de coiffeur. Victor se rend compte que les jurys n’ont pas de référentiel adéquat pour juger les compétences des coiffeurs : ils n’ont que le catalogue de cheveux européens.
L’idée germe alors de créer un catalogue de compétences propre à Bruxelles pour le cheveu africain, afin de poursuivre les obtentions de titres au centre de validation. Quand le référentiel sera agréé par la Fédération Wallonie-Bruxelles, Victor estime qu’il aura accompli son dernier engagement associatif. La coiffure afro pourra alors devenir une option à enseigner pour les futurs coiffeurs à Matonge, qui pourront se régulariser tout de suite.
Et pour les autres, il espère que la commune poursuivra ses contrôles de façon à promouvoir les validations de compétences auprès du centre. “Mais pour cela, il faut aussi une certaine publicité, et donc une source de financements. Heureusement il y a CitizenDev et le Contrat de Quartier.” CitizenDev lui aura également permis de partager ses méthodes et ses connaissances avec les connecteurs du CLT. “C’est important de partager ses frustrations et ses enseignements par rapport au travail bénévole.” Mais aussi ses joies ! Grâce au projet, nombreux sont les coiffeurs qui peuvent brandir leur reconnaissance professionnelle grâce à lui.
Portrait réalisé par Céline Mathijsen, Eléonore Offermans et Leeloo Saweryniuk
Que se passe-t-il au 97 rue Verte à Schaerbeek ?
Au cœur de Bruxelles, dans un quartier marqué par l'insalubrité de nombreux logements et un taux de chômage élevé, une multitude de cultures cohabitent sans vraiment se connaître. Belges, Marocains, Turcs, Bulgares, Roms, Congolais, Syriens et autres restent le plus souvent avec les leurs…
Sauf au sein du Local. Là, depuis quelque temps, ces communautés se rencontrent et créent du lien. "C’est un bonheur de voir ce qui s’est réalisé dans ce local en si peu de temps. Les gens se mettent ensemble, se parlent, rigolent, font des choses ensemble !" se réjouit un habitant du quartier.
Le temps et les talents partagés créent du lien
Situé à la croisée de rues passantes de Schaerbeek et de Saint-Josse, le Local, avec ses grandes fenêtres, est une invitation à la rencontre et au partage. La porte y est toujours ouverte et il est difficile de résister à l'envie d'en franchir le pas, tant il grouille en permanence d'animation, de bénévoles affairés, de curieux et d'habitués.
Un ballet incessant de passants qui y entrent, attirés par les livres et les tringles de vêtements exposés et d'autres qui en sortent l'air satisfait, rythme inlassablement les journées.
Aujourd'hui, Mama s'occupe de la bourse aux vêtements. Chacun est invité à donner ce dont il n'a plus besoin et à prendre ce qui lui sera utile. Une jeune femme s'attarde sur les vêtements d'enfants, les déplie, les jauge puis les cale sous son bras pour les emporter.
Pendant ce temps à l'arrière, Marianne s'occupe du lien téléphonique. Elle contacte les personnes âgées du quartier pour prendre de leurs nouvelles, s'assurer qu'elles vont bien et rompre leur isolement.
De leur côté, Agnès et M’Feddal écoutent attentivement une mère de famille nombreuse leur expliquer à quel point elle est soulagée par le soutien scolaire mis en place chaque mercredi après-midi dans le Local pour les élèves du primaire et du secondaire. Une aubaine pour de nombreuses familles du quartier.
Enfin, Yves discute sur le pas de la porte avec quelques connaissances, mentionnant avec fierté le nombre impressionnant d'aspirateurs auxquels il a pu donner une seconde vie depuis la création du Local. En effet, grâce à ses talents manuels, un Repair Café y prend place chaque premier samedi du mois. Plutôt que de jeter leurs appareils défectueux ou leurs vêtements abîmés, les habitants viennent désormais les faire réparer par d'autres habitants du quartier au sein du Local.
En plus de ces activités d'entraide, les bénévoles du Local organisent chaque deuxième jeudi du mois une table d'hôte intergénérationnelle. Les convives y partagent un repas en discutant de leurs envies, leurs soucis, leurs rêves… Un véritable échange de vécu et de culture y prend vie à chaque fois.
L'énergie et la créativité des citoyens comme moteur
De nombreux projets sont actuellement en préparation et n'attendent qu'à venir enrichir la vie de quartier et soutenir plus encore ses habitants dans leur vie quotidienne : des cours de darija, de turc, de couture, mais aussi l'organisation d'événements culturels et artistiques.
Entièrement aux mains des habitants, le projet du Local est de ce fait appelé à évoluer dans le temps, en fonction des talents de celles et ceux qui le fréquentent et le font vivre.
Mais son moteur restera le même : l'énergie et la créativité citoyennes, qui balaient préjugés et isolement pour alimenter une vie de quartier crépitante, faite d'entraide quotidienne, de progrès individuels et de réussites collectives.
Avec pour objectif ultime de créer du lien entre les habitants qui jusque-là n'avaient pas de lieu où se rencontrer.
La Green Cantine, où se rencontrent passion de la cuisine et destins de femmes.
En cette fin février 2020, alors que la neige tombe sans relâche sur Bruxelles, quatre femmes s'affairent dans une cuisine située sous les bureaux de la SLRB, autour d'énormes marmites, de grands bacs en inox et de Tupperwares débordant de légumes de toutes les couleurs.
Un groupe d'une cinquantaine de clients arrive dans une heure pour déguster un repas chaud concocté par leurs soins. Ce sera la pause lunch de leur journée d'étude. Le temps presse, pas question de les retarder dans leur planning serré !
Caroline, Laurence, Mariam, et Hélène ont évidemment pris de l'avance. Elles ont déjà une journée de courses et une journée de découpes et de précuisson derrière elles. Aujourd'hui, il faut parfaire la cuisson, préparer le buffet et assurer le service. Rodées à la préparation de lunchs froids et de soupes, ou de repas chauds pour des plus petits groupes, c'est la première fois qu'elles s'attaquent à un repas chaud pour un si grand nombre. Et si la cuisine dont elles disposent a dû être par le passé professionnelle et bien équipée, elle semble à présent plutôt vétuste. Mais ce n'est pas cela qui va décourager les femmes de la Green Cantine.
Des obstacles, elles en ont vu d'autres, et d'une toute autre ampleur. Ce sont d'ailleurs leurs parcours de vie difficiles qui les ont rassemblées au sein de ce projet porteur d'espoir. Et même si elles rêvent secrètement d'une cuisine rénovée et plus fonctionnelle, nos héroïnes du jour font avec les moyens du bord, comme elles l'ont toujours fait. Leurs préparations doivent être prêtes à midi, elles le seront.
Des produits d'ici, des saveurs d'ailleurs
Souriantes et les yeux malicieux, elles prennent manifestement plaisir à annoncer le menu qu'elles ont élaboré : du Pondutouille, du Yassatouille et des douceurs en dessert. Devant l'étonnement que ces noms provoquent, elles rient.
Le Pondu et le Yassa sont des recettes traditionnelles du Congo et du Sénégal, qu'elles ont bel-gi-sées, comme elles aiment à dire en forçant l'articulation. D'où le suffixe "touille", comme dans ratatouille. Et d'expliquer qu'elles ont voulu faire se rencontrer les saveurs de là-bas et les produits d'ici, afin de créer un lien entre leurs pays d'origine et leur terre d'accueil.
Arrivées en Belgique sans papier, Caroline, Laurence, Mariam, Hélène et les autres femmes de la Green Cantine ont décidé d'unir leurs forces autour de leur passion commune qu'est la cuisine, afin de trouver du soutien, un ancrage, mais aussi un moyen de gagner un peu d'argent.
Elles espèrent voir ce projet se professionnaliser progressivement pour en faire leur emploi. Elles y travaillent d'arrache-pied.
Aujourd'hui, leur labeur porte ses fruits ; la fierté et la satisfaction se lisent dans leurs regards. Les convives s'émerveillent devant les légumes locaux et de saison savamment épicés, les pilons de poulet dorés à souhait et les découvertes culinaires comme les feuilles de manioc et le gâteau de noix de coco.
C'est simple : les assiettes sont vides et les visages détendus, reconnaissants et enthousiastes. La Green Cantine, grâce à ses recettes d'ailleurs réalisées avec des produits d'ici, a séduit. Et ne demande qu'à séduire encore. Un projet de livre de recettes est en cours, une rénovation complète de la cuisine devrait voir le jour, et les femmes de la Green Cantine sont déterminées à faire de cette initiative citoyenne un projet au long cours.
Perspectives: l’ABCD dans notre société
CitizenDev a testé plein de choses, a confirmé, adapté ou parfois carrément bousculé les manières de penser des personnes impliquées. Comment ces conclusions peuvent-elles servir à d’autres personnes et instances? Comment nos expérimentations peuvent-elles enrichir les politiques ou actions de développement urbain ? Et est-ce que ces méthodes peuvent être source d’une solidarité entre pairs?
ABCD dans le travail social communautaire
Au cours des dernières décennies, le travail social communautaire a évolué vers un accompagnement individuel plutôt que vers des communautés. Le terme ‘empowerment’ ou ‘pouvoir d’agir’ qui était centrale au travail social communautaire est devenu de plus en plus synonyme d’activation fonctionnelle par le biais d’une acquisition de compétences[1]. Quoi que CitizenDev n’ait jamais eu l’ambition de réinventer le travail social communautaire, nous observons que l’approche ABCD expérimentée par CitizenDev va de pair avec le regain de l’approche politisante[2], un retour vers la double structure initiale de la notion d’empowerment, avec son élément psychologique - se sentir valorisé - ET son élément socio-politique - un changement de structures qui résulte en une répartition du pouvoir[3].
Il y a aussi une autre tendance: l’émergence d’une nouvelle génération d’initiatives citoyennes. Ici il s’agit clairement de collectifs citoyens dans lesquels les habitants ont le « lead ». Parfois leur présence met les travailleurs communautaires devant des situations inconnues et dans la nécessité d’apprendre et se trouver une nouvelle relation et comportement. L’approche ABCD développée par CitizenDev expérimente une manière de se positionner parmi ces initiatives sans prendre le devant, en utilisant entre autres notre technique des « connections ». L’enjeu c’est que le travailleur puisse se détacher du groupe pour que le groupe puisse se gérer seul. Ceci semble évident et pas du tout nouveau mais nos expériences montrent que cette attitude n’est pas encore omniprésente au sein de l’associatif bruxellois.
Une appropriation citoyenne de l’infrastructure collective
La nouvelle génération d’initiatives citoyennes n’est pas restée inaperçue. Notamment les gestionnaires et travailleurs des infrastructures publiques, associatives ou culturelles, se sentent en masse appelés par cette nouvelle tendance et cherchent à s’ouvrir davantage aux initiatives de leur public. Ils se posent la question de comment concilier une gestion professionnelle, une programmation de qualité et la sécurité des bâtiments avec une appropriation par les citoyens de leur infrastructure. Ce défi nécessite de croire et de faire confiance dans le potentiel des gens, qui n’est pas (encore) toujours au rendez-vous.
L’expérience de la Team dans le Local du Quartier montre toutefois qu’une autogestion d’une infrastructure peut générer une dynamique très forte à condition qu’on fait confiance dans le potentiel des gens. Si on ne veut pas organiser le quartier mais on veut que ce soit les gens qui s'organisent dans le quartier il n’y a pas 1000 façons. Comme disait une connectrice et membre de la Team:
“Le Local c’est un endroit à nous et si on veut ouvrir le dimanche on le fait. Si on est dans les locaux de quelqu’un d’autre ça ne va pas marcher. Le Local est géré par les habitants, ceux qui font les permanences, ceux qui font des activités. Ils ont les clefs et il n’y a pas de gardien du Local.”
Une nouvelle approche ‘proactive’ pour stimuler les initiatives citoyennes - accompagner au lieu d’attendre
Ce que nous expérimentons c’est surtout, beaucoup plus que l’innovation du travail social communautaire, un renouvellement de certains dispositifs publics. Regardons d’abord les appels à projets, utilisés par beaucoup d’autorités comme moyen privilégié pour stimuler l’initiative associative ou citoyenne, avec entre autres l’appel ‘Inspirons le Quartier’ de Bruxelles Environnement, les ‘budgets participatifs’ dans les Contrats de Quartier Durables ou les appels de la Fondation Roi Baudouin (FRB).
Avec des appels à projets, le risque est qu’on sème la concurrence pour des ressources rares, de sorte qu'une grande partie de l'énergie sociale précieuse est perdue. Heureusement, ce n'est pas si mal chez ‘Inspirons le Quartier’, car selon Bruxelles Environnement, environ 90 % des projets obtiennent le feu vert. Et le rejet est généralement lié au fait qu'un projet est plus susceptible d'appartenir à un contexte différent. Les propositions sont donc renvoyées plutôt qu'abandonnées.
Mais il y a un deuxième obstacle fréquent: lorsqu'un appel est lancé, le gouvernement attend passivement que les propositions lui parviennent. Une grande partie des habitants de Bruxelles ne peut être atteinte de cette manière. Les expériences CitizenDev montre que certaines personnes ne sont pas habituées à se considérer comme des acteurs qui peuvent influencer la construction de la ville. Embrigadés dans des logiques de survie, ils ont peu de place pour leurs rêves et sont peu, ou pas, habitués à mettre en avant leurs atouts. Afin de les encourager au maximum à proposer des initiatives locales, à croire dans leurs capacités propres, à leur utilité pour le quartier... nous devons rectifier le tir. Devenons proactif au lieu d’attendre passivement les idées qui viennent. Allons voir ces personnes, les chercher dans la rue, dans un café ou un restaurant social, devant la porte de l'école... Gagnons leur confiance. Notre “brique connexions" peut servir de modèle pour une méthode qui stimule davantage toutes personnes à prendre une initiative. Une telle approche conduit également à des collaborations, car permet de mettre en contact dès le début des personnes ayant des idées similaires ou compatibles. Cela nécessite du temps et des travailleurs de terrain qui n’attendent pas dans leur bureaux mais vont à la rencontre.
Une troisième bémol qu’on peut évoquer à l’adresse des appels à projet, c’est le focus monothématique qu’ils ont souvent. Dans notre “Métalab” du 27/11/2019, Arnaud Bilande de Periferia questionne le « shopping des appels à projets » avec leur difficulté de rentrer dans les «bonnes cases», qui épuise les gens.
Suites à nos expériences CitizenDev, nous avons lancé la proposition de renverser la donne en fusionnant plusieurs appels à projet. Créons un seule “Grand-Fonds”, constitué par les deniers de plusieurs administrations régionales et communales ainsi que de la Fondation Roi Baudoin, avec une porte d’entrée unique pour tous les collectifs citoyens. Mettons des accompagnateurs sociaux, idéalement dans tous les quartiers, pour aller à la recherche des personnes qui ont besoin d’un coup de pouce pour se lancer dans des initiatives, peut importe la thématique.
Upscaling de l’approche CitizenDev: vers un développement local radicalement bottom-up
Ce que nous avons visé, c’était avant tout l’émergence ou le renforcement de réseaux résilients d’entraide, de solidarité et d’initiative dans les quartiers. Ces réseaux sont tissés à travers la création de liens, entre les porteurs d’initiatives ou entre eux et le tissu associatif ou pouvoirs publics. A travers ces réseaux nous avons visé la stimulation du pouvoir d’agir.
Nous pensons que les groupes de citoyens porteurs d’idées, d’action et de solidarité, pourraient et devraient dorénavant faire partie des acteurs du développement de leur propre quartier, dans une forme de planification urbaine évolutive. Au lieu de planifier les opérations publiques de développement local de manière ‘top down’, en faisant appel à des experts externes, nous pouvons et devons stimuler les acteurs locaux de prendre leur destin en main.
Au lieu de tout cristalliser dans des “Masterplans” qui sont définitifs et stables on pourrait faire pousser des dynamiques de manière “bottom-up” et évolutive. Au lieu de lancer des marchés publics pour engager des entreprises privées pour exécuter les plans de développement, nous pouvons et devons inciter les habitants du quartier à se lancer dans les initiatives que, eux, trouvent nécessaires et urgentes. Pourquoi financer et stimuler une petite partie des Contrats de Quartiers Durables de manière ascendante et centraliser tout le reste dans les mains de l’administration ou d’experts? Si nous avons vu le lancement de toute une série d’initiatives qui est de l’ordre de ce qui est d’habitude subventionné par les Contrat de Quartier Durable ou le Programme de Cohésion Sociale, nous pensons qu’il est temps de tester un “upscaling” de cette approche méthodologique plus valorisante vers le coeur des programmes communaux de développement. Lors de la table ronde finale de CitizenDev, une série des participants demandaient s’il n’est pas temps de lancer un programme public spécifique de "cartographie des atouts et des rêves", qui précède le lancement des contrats de quartier durables, afin que les résidents, les ONG locales et les autorités locales aient le temps de construire ensemble les projets du Contrat de Quartier, selon une approche ascendante.
Comme disait le journalist et expert Thomas Lemaigre lors de notre “Métalab” finale, “La commune c’est ce qu’on a en commun”. Alors reconnaissons l’expertise des membres de nos communautés et faisons ensemble ce que la Commune décide et exécute.
Bien sûr, il y a des limites à l’initiative citoyenne, d’une part parce que le bénévolat et l’entraide ne peuvent pas être le moteur de toute création de bien-être. D’autre part, pour certaines interventions il y aura besoin de grosses machines et d’experts - c’est évident. Mais les actions telles que ‘Rue du Conseil[4]’ ou la rénovation du Local de Quartier nous montrent que certaines interventions plus légères dans l’infrastructure peuvent venir d’en bas, lancées et portées par des citoyens.
Ceci n’est pas un plaidoyer pour un désengagement du pouvoir publique. Nos expérimentations nous montrent l’importance d’une collaboration entre le pouvoir public et les initiatives citoyennes. Ce n’est pas aisé. Nos living labs confirment le constat de la méfiance envers le politique institutionnalisé. A Matonge, il y a un historique de déceptions, de désillusions, l’impression d’un abandon ou des stigmates par le politique.
L’expérience CitizenDev relève ensuite la difficulté de travailler avec les pouvoirs publics et leurs rigidités administratives. Plusieurs collectifs sont entrés en interaction avec les pouvoirs publics et demandent du soutien, parfois avec des résultats pas convaincantes. Le collectif « Rue du Conseil » par exemple ne se sent pas écouté; c’est une des motivations de leur action au départ. Grand temps de se donner la main et de travailler ensemble.
La politique de création d’emploi: la rémunération de l’initiative citoyenne
En chemin, CitizenDev a montré que le travail communautaire qui a été pratiqué déclenche un potentiel foisonnant d'économie alternative et solidaire. Ces activités suscitent chez leurs participants des attentes de rémunération, et cela dans une plus grande mesure qu'on ne l'avait anticipé. Ces attentes viennent de la situation socio-économique des personnes en milieu populaire mais aussi du fait qu’il s’agit d’un vrai travail, un échange entre une personne et la société dans son ensemble. Cela demande une reconnaissance sociale qui, pour être palpable, ne peut pas toujours passer par des symboles ou des liens sociaux : il est parfois nécessaire qu'elle se traduise en rémunération formelle, et si possible dans des mécanismes de rémunération qui ne sont pas porteuses de stigmates (parce que de montants trop faibles, parce qu'insécurisantes, parce que réservées aux « pauvres », etc).
A vrai dire, il n'est pas évident de faire entrer ces activités dans les outils existants du marché du travail et des politiques d'emploi. Nous identifions deux innovations à potentiel intéressant pour faciliter et stabiliser ces dynamiques locales, et pour les rendre accessibles à des personnes qui sont restées sur le côté alors qu'elles sont intéressées.
Actiris entend poser en 2020 les premiers pas d'une expérimentation du concept français de Territoires zéro chômeurs de longue durée (TZCLD). Les entreprises créées dans ce cadre, dites « à but d'emploi » sont gérées de façon participative et cherchent à rencontrer des besoins individuels et collectifs, allant de besoins non solvables à des offres plus commerciales voire B2B. Ces deux particularités en font déjà une piste intéressante à étudier. Mais certaines questions ont aussi été identifiées qui pourraient devenir des obstacles. Les TZCLD visent une sous-catégorie bien précise de la population (les chômeurs de longue durée) et leur finalité première est de créer un maximum de contrats de travail à durée indéterminée. Or dans CitizenDev (tout comme dans d'autres dynamiques proches), l'ambition est de travailler de manière horizontale avec toute la population du quartier et au moins une partie de la demande de reconnaissance qui a émergé est une demande de travail rémunéré et non d'emploi. Une partie des projets sont temporaires ou n'ont pas la taille critique qui permette de salarier en CDI l'un ou l'autre de ses porteurs. Certains même perdraient leur sens à vouloir atteindre cette taille. Pour d'autres par contre, collaborer avec un TZCLD ou s'y intégrer sont des pistes qui pourraient se révéler très porteuses à moyen terme.
Au sujet des TZCLD, il faut enfin relever que la méthode ABCD pourrait leur être précieuse comme moyen collectif, participatif, inclusif et bottom-up de construire les solutions locales pour les besoins ressentis. Il a même été suggéré de former leurs équipes, de les faire coacher par des connecteurs chevronnés, etc.
Une autre voie pourrait être la création d'une coopérative à finalité sociale qui hébergerait économiquement des projets de quartier et rémunérerait leurs porteurs. Contrairement aux Entreprises à But d’Emploi, aux coopératives d'activité et aux coopératives d'emploi, qui disposent déjà d'une précieuse ingénierie de portage et avec qui une collaboration pourrait être envisagée, cette nouvelle forme d’intermédiaire proposerait une diversité de mécanismes de rémunération en plus du contrat de travail classique, au plus près des besoins et attentes de chacun : contrat de travail de courte durée, prestation d'indépendant à titre complémentaire, défraiement du bénévolat, job étudiant, rémunération de prestations exceptionnelles, etc. La coopérative rémunérerait les porteurs sur base de la cagnotte constituée auprès d'elle avec les rentrées du projet. Le fait de recourir à un intermédiaire spécialisé pour ce faire permet d'organiser un cadre social et fiscal complètement sécurisé et d'éviter à chaque projet de devoir créer une asbl, ouvrir un compte en banque, gérer les contraintes, etc. Ce service de portage serait offert par les grands réseaux associatifs régionaux aux projets locaux qu'ils soutiennent.
On le sait, la diversité des initiatives citoyennes bruxelloises et la diversité de leurs publics est énorme. Donc également la diversité de leurs trajectoires de développement. Ces trajectoires ne peuvent pas être soutenues à travers un seul concept. Mais on peut faire l'hypothèse qu'elles seront facilitées par les dispositifs de soutien qui vont ou qui pourraient se mettre en place et dont elles pourront bénéficier. Chaque projet aura à choisir une de ces réponses ou une manière d'en combiner plusieurs compte tenu de ses propres souhaits et contraintes. De cette façon, leurs trajectoires seront basées avant tout sur leurs ambitions et réalités locales et non sur des contraintes perçues et la reconnaissance sociale de leurs apports à la ville pourra être effective et nourrissante.
La solidarité organisée
Nos expérimentations touchent aux questions qui sont propres à la gestion de toute une série d’actions publiques: l’aménagement et l’entretien d’espaces verts, la politique de déchets, la culture, voir même la sécurité sociale. Reconnaissons que cela nous amène à un autre débat: celui du financement de ces politiques. Entamer cette discussion peut ressembler à ouvrir la boîte à Pandore mais nous pensons que ce genre de questions est difficilement évitable.
C’est claire que l’appropriation citoyenne de certaines actions publiques peut être un moyen pour réduire les coûts et qu’il peut donc aider à équilibrer les budgets publiques. Arnaud Bilande nous a appris, pendant notre Métalab du 27/11/2019, que les Quartiers Durables Citoyens reçoivent en moye 7000€ de Bruxelles Environnement mais qu’ils génèrent 50.000€ en temps de travail produits par les habitants, c’est à dire presque un temps plein en mails, gestion, etcetera. Les aménagements des espaces verts à côté de Thurn & Taxis, incités par le projet Parc Farm, sont considérés par Bruxelles Environnement comme coûtant nettement moins à la collectivité que les parcs aménagés par des professionnels. Du coup se pose – de nouveau - la question de la rémunération de ce temps de travail. Est-ce que réduire le coût en faisant appel à des bénévoles est juste et digne? En plus, nous devons reconnaître que des éventuels expérimentations avec un nouveau statut, entre le bénévolat et le salariat, seraient un risque pour le financement de la sécurite sociale. Et mis à part la question du financement, il y a bien sûr aussi la question des droits des travailleurs.
A cela s’ajoute bien entendu la question de la qualité du service. Il ne faut pas nier que ces expérimentations pourront être une forme alternative de création de bien-être. Lorsque quelqu’un échappe d’une position de consommateur de service et se transforme en fournisseur de soin, dans une forme d’entraide, grâce à la dynamique autour du Local de Quartier, et si sa contribution est valorisée par quelqu’un d’autre, l’impact est bénéfique pour les deux, peut être plus que dans le cas d’un service professionnel rendu à eux. L’entraide et la proximité ne peuvent pas être remplacés par des services professionnels. Ce bénéfice peut en plus être doublé grâce au caractère transversal de ses contributions. Pendant le repair café, le réparateur n’est pas seulement un fournisseur d’aide important dans le quartier; il est aussi un acteur d’une politique de réduction de déchets.
Nous devrons faire ce débat dans sa totalité: ne pas nier les risques, ni les potentiels, tant au niveau financier que quant aux effets sur les personnes et sur les communautés. En tant que travailleurs sociaux ou académiques soucieux des droits humains et du développement durable, nous pensons que nous devons entamer cette réflexion sans attendre les propositions de la part des hérauts de l’austérité financière ou du Big Society, Small Government.
Lisez la publication complète ici.
[1] Peeters, 2010
[2] Comme constaté aussi par De Rynck et Steyaert, 2019. En témoigne aussi le succès des 4 séminaires autour du travail social communautaire et l’ABCD que nous avons organisées en 2018 et l’initiative de « l’Ecole de Transformation sociale » lancée en 2019.
[3] (Peeters, 2010)
[4] https://www.citizendev.be/uploads/1/0/8/2/108215725/20190326_portrait_rue_du_conseil.pdf
A travers une série d’articles, le BRAL vous partage son expérience pour la mise en œuvre d’une rue scolaire. Astuces, étapes indispensables et timing : vous aurez tous les éléments en main pour mettre en place ce projet dans votre quartier. Ce planning est spécifique à un projet de rue scolaire mais peut évidemment être une inspiration pour tout autre projet co-créatif que vous souhaitez mettre en place près de chez vous !
Une rue scolaire ?
Quand l’école recommence, organiser une rue scolaire peut être une bonne idée pour améliorer la sécurité routière et la qualité de l'air et pour agrandir la convivialité à la porte d'une école. À l’heure d’entrée et de sortie des classes, une rue scolaire empêche temporairement la circulation des véhicules motorisés, vous ne pouvez emprunter la rue qu'à pied ou à vélo. Seuls les habitants de la rue et les services de secours et d'utilité publique sont permis de conduire.
Pour demander une rue scolaire, des parents, l’école-même ou les deux ensembles peuvent s’adresser au collège des Bourgmestre et Echevins, à l'attention de l'Echevin.e de la Mobilité. Bruxelles Mobilité donne plus d’informations, ainsi qu’une liste avec toutes les rues scolaires existantes des écoles bruxelloises. De toute façon, une phase de test fait objet du processus d’installer une rue scolaire.
Avant de se lancer dans un projet de mobilité, il est intéressant de récolter des données pour mieux comprendre les flux de trafic et les habitudes de déplacement des personnes touchées. Cette récolte peut avoir lieu de manière co-créative pour impliquer un maximum de personnes dès le début du projet et pour renforcer le tissu social.
Analyser les flux de trafic
À la fermeture (temporaire) d’une rue, on entend souvent la même crainte : le trafic va se déplacer vers les rues adjacentes et ce sont les résidents de ces rues qui devront pâtir de ce projet. Cependant, de nombreuses études ont pu démontrer que ce n’est pas le cas, grâce à ce qu’on appelle « l’évaporation du trafic ». Mais même si ce phénomène a été prouvé à de multiples reprises, il reste souvent flou et contre-intuitif pour nombreux d’entre nous.
C’est entre autres pour cette raison qu’une analyse des flux de trafic peut être intéressante. En récoltant des données avant et pendant la rue scolaire, vous pourrez montrer l’impact de la fermeture de la rue. De plus, ces données peuvent vous aider à mieux saisir quel type de trafic circule à chaque moment de la journée. Elles vous permettront d’adapter votre projet aux spécificités de votre quartier.
Pour récolter ces données, vous pouvez utiliser un Telraam : un petit capteur qui s’installe aux fenêtres et compte le nombre de voitures, vélos et piétons. Les données sont ensuite accessibles sur la plateforme de Telraam.net et accessibles à tous. (N’ayez pas peur : vous ne violez pas la vie privée des passants.) Plusieurs Telramen sont déjà installées à Bruxelles ! Si vous souhaitez en installer chez vous, vous pouvez commander des capteurs en ligne ou en emprunter au BRAL.
Vous pouvez également organiser des comptages manuels avec les membres de votre groupe. Pour faciliter le comptage, vous pouvez utiliser l’application CounterPoint. Si vous préférez utiliser du papier, vous pouvez télécharger le formulaire mis à votre disposition ci-dessous.
Si votre projet dispose d’un budget plus important, vous pouvez également introduire une demande auprès de VIAS, l’institut de la sécurité routière. Ils viendront installer des compteurs fixes et pourront vous rédiger un rapport des données.
Les habitudes de déplacement
Afin de comprendre si et comment la rue scolaire a une influence sur les habitudes de déplacement, il peut être intéressant d’organiser une courte enquête auprès des riverains, des élèves et du corps enseignant.
En organisant cette enquête avant et pendant la mise en place de la rue scolaire, vous pourrez non seulement analyser si la rue scolaire a changé les habitudes de déplacement, mais aussi si l’avis des personnes touchées a changé grâce au test. C’est aussi l’occasion de récolter des données par rapport à la mobilité du quartier en général.
Voici une liste de possibles questions à poser :
- Le mode de déplacement principal : à pied, à vélo, en transport en commun, en voiture
- Si le répondant est plus ou moins favorable au test d'une rue scolaire
- Les éléments qui doivent primer lors de la mise en place d’une rue scolaire
- La sécurité routière
- La qualité d’air
- Les nuisances sonores
- L’accessibilité
- L’interaction sociale
- Les sentiments (sur une échelle, par exemple) par rapport à :
- La sécurité routière
- L’accessibilité du quartier avec le mode de déplacement principal du répondant
- Le niveau de circulation
Nous vous conseillons d’envoyer cette enquête à un maximum de personnes quelques semaines avant le début du projet et de réitérer le questionnaire quelques semaines avant sa fin.
Les autres données à récolter
A côté de ces données de mobilité, il peut également être intéressant de se pencher sur d’autres thématiques comme la qualité d’air, les nuisances sonores ou la sécurité routière. Voici une liste des autres données que vous pouvez récolter :
- Qualité d’air : via des Airbeams pour avoir une idée des tendances (en location au BRAL) ou en collaboration avec des initiatives citoyennes comme Chercheurs d’air, InfluencAir ou Luchtpijp, qui sont expertes en la matière.
- Nuisances sonores : l’Airbeam peut également mesurer le niveau du bruit, et sinon, pourquoi ne pas contacter Bruxelles Environnement pour demander un soutien ?
- Vitesse : pour avoir une idée de la vitesse du trafic, vous pouvez louer un radar mobile via No Need For Speed.
- Sécurité routière et mobilité : interviewer quelques personnes en rue à différents moments de la journée permet d’avoir une idée du sentiment de sécurité des riverains mais aussi de récolter leurs idées pour améliorer votre projet.
La récolte en groupe
Comme vous le voyez, il y a pas mal de données à récolter quand on se lance dans un tel projet. Alors pourquoi ne pas transformer cela en un moment convivial ? Pour le projet LOOPER, par exemple, nous avons organisé des après-midi et soirées où les participants passaient d’un atelier à l’autre : 20 min de comptage de trafic, 20 min d’entretien avec les passants et 20 min de mesure de vitesse.
Ensuite, chacun partageait ses observations autour d’un café et discutait des possibles modifications à apporter au projet. Le meilleur moment de la journée !
Cet article vous donne-t-il envie de vous lancer ? Avez-vous encore des questions ? Au BRAL, nous sommes là pour vous donner un coup de main. N’hésitez pas à nous contacter !
Florence Lepoudre
Il y a exactement un an, l'accord de coalition bruxellois parlait de péage zonal. Bonne nouvelle, car le péage zonal est selon nous ce qui permettrait de réduire la pression automobile. À l'époque, nous avions donc encouragé le gouvernement bruxellois à prendre les devants d’ une tarification routière intelligente en Belgique. Et ce volontiers dans le cadre d’une consultation interrégionale. Nous remettons le couvert cette année dans le cadre de la première Journée internationale de l'air pur pour des ciels bleus.
Pourquoi un péage zonal ?
Chaque année, 10 000 Belges meurent prématurément à cause de la pollution de l'air. Les enfants développent de l'asthme, plus de personnes âgées souffrent de démence. L'exposition continue à cette pollution entraîne des séquelles sur la santé et l'espérance de vie des fœtus et des enfants. Le bien-être en ville est gravement affecté. En 2018, chaque habitant de Bruxelles fut bloqués dans les embouteillages pendant 195 heures en moyenne.
Une ville plus habitable et saine passe par moins de voitures. Un péage zonal, qui a fait ses preuves avec succès à l’étranger, serait une première pour la Belgique. À Stockholm, le trafic a été réduit de 30 % dans les années qui ont suivi son introduction.
Le péage zonal selon le BRAL
PRINCIPE
- Le péage zonal permet de répercuter sur l'utilisateur le coût social réel de l’usage de la voiture (pollution de l’air et sonore, embouteillages, etc.). En ville, ce coût est dix fois plus élevé qu'en milieu rural (environ 50 centimes/km en ville).
- Le péage zonal encourage chacun à réfléchir avant de prendre sa voiture et réduit ainsi la pression qu’elle exerce. Avec un tarif de 3 euros par jour, la congestion à Bruxelles serait déjà réduite de 11 %. (Source : STRATEC, 2012[1])
- L’automobiliste paie un forfait par zone traversée.
- Cela s'applique aux voyages entrants et sortants ainsi qu'aux voyages à l'intérieur de la zone.
- Il est possible de créer une ou des zones au tarif différent ( par exemple, Bruxelles pourrait être couverte par deux zones : le centre-ville et le reste ). On ne paie qu'une fois par zone, quelle que soit la distance.
BUT
- Réduire tout le trafic automobile dans une certaine zone, et donc réduire les embouteillages
- Un meilleur cadre de vie, une meilleure qualité de l'air, moins de pollution sonore, une meilleure santé
MATÉRIEL NÉCESSAIRE
- Des caméras ANPR en divers points de la ville
- Bases de données des voitures et des propriétaires de voitures
- Tous ces éléments sont déjà là grâce à la zone à faibles émissions (Low Emission Zone)
COÛT D'INSTALLATION
- Raisonnable
AVANTAGES
- Simple et clair : un prix par zone
- Il est possible de moduler le taux selon le jour et l'heure, ou, par exemple, les revenus.
- La Région est autonome pour mettre en œuvre la mesure, mesurer son impact et percevoir les revenus. Cela simplifie la gestion administrative.
INCONVENIENTS
- La distance n'est pas prise en compte. Parcourir 50 km en rond dans une même zone n’est pas plus cher que se rendre dans la rue d’à côté.
- Tout comme avec la LEZ, il n'est pas toujours possible à l'heure actuelle de taxer les voitures immatriculées à l’étranger. Un accord s’esquisse au niveau européen, mais ce n’est pas pour demain.
EXEMPLES
- - Londres depuis 2005
- - Milan est passée d'un péage « cordon » à un péage zonal
- - Stockholm : lancé en 2007, un référendum à 52% contre, il suscite aujourd’hui une large adhésion
À NE PAS CONFONDRE AVEC
- Un péage « cordon » autour de Bruxelles, qui ne s'appliquerait qu'aux véhicules entrant depuis l’extérieur de Bruxelles
- Un péage « kilométrique », bien plus lourd à mettre en œuvre
En bref
Tarifer les trajets en voiture dans Bruxelles peut décourager l’usage de la voiture lorsqu’il n’est pas essentiel. L'introduction d'un péage zonal est assez simple, et il profitera à notre cadre de vie, à la qualité de l'air et à la santé. Avanti !
En savoir plus
Retrouvez notre vision du péage zonal et d'autres propositions pour améliorer la qualité de l’air dans le poster de notre publication Myst'AIR. Une autre publication propose un examen approfondi de la tarification routière.
International Day for Clean Air and Blue Skies
Le 7 septembre, les Nations unies organisent la première Journée internationale de l'air pur pour des ciels bleus. Health and Environment Alliance (HEAL), dont le BRAL est membre, y porte l'attention sur des villes saines pour tous, avec la campagne #CleanAirForAll. Envie de soutenir virtuellement cette campagne ? Partagez cet article avec les hashtags #CleanAirForAll, #CleanAir4Health #CleanAirEU #HealthyCities et #BXLDemandsCleanAir.
[1] Vous pouvez lire cette étude en vous adressant au BRAL.
À l’occasion de la première Journée internationale de l’air pur pour des ciels bleus (International Day for Clean Air and Blue Skies) ce 7 septembre, les collectifs bruxellois pour la qualité de l’air appellent le gouvernement bruxellois à faire preuve d’ambition et à lutter contre la pollution de l’air, le principal risque environnemental pour la santé et l’une des principales causes évitables de décès et de maladie dans le monde[1].
Ils adressent plusieurs demandes aux autorités bruxelloises :
- des lois ambitieuses destinées à protéger la santé des citoyen·ne·s bruxellois·es ;
- une surveillance plus efficace et plus démocratique de la qualité de l’air à Bruxelles ;
- un système pour réduire la circulation automobile ;
- un réaménagement de l’espace public pour les citoyen·ne·s bruxellois·es.
Ce 7 septembre sera la première Journée internationale de l’air pur pour des ciels bleus, mais il est inutile de rappeler l’influence de la pollution de l’air sur nos vies. Chaque année, elle provoque environ 400.000 décès prématurés et des centaines de milliards d’euros de dépenses dans les soins de santé. L’OMS indique qu’il s’agit d’un important facteur de risque de maladies chroniques chez l’adulte, notamment les maladies cardiaques et pulmonaires et les cancers, en précisant qu’il n’existe pas de niveau de pollution qui soit sans danger[2]. Nos enfants sont les plus vulnérables à cette pollution de l’air. Une exposition continue dans l’utérus et lors de la prime enfance entraîne des conséquences tout au long de la vie[3].
À Bruxelles, des citoyen·ne·s et des organisations se mobilisent en faveur d’une meilleure qualité de l’air : en équipant des statues de masques, en jouant devant les portes des écoles et en pédalant d’Anvers à Bruxelles. Leur ambition ? Faire de Bruxelles une ville saine et inclusive, l’amélioration de la qualité de l’air constituant la première étape importante.
Après les élections de 2019, les collectifs bruxellois pour la qualité de l’air ont rencontré les ministres de l’Environnement et de la Mobilité pour communiquer leurs exigences au gouvernement régional.
1. Les collectifs et mouvements bruxellois pour la qualité de l’air demandent des lois ambitieuses destinées à protéger la santé des citoyen·ne·s bruxellois·es. La santé devrait arriver en tête des préoccupations, la réglementation bruxelloise en matière de qualité de l’air doit donc se fixer pour objectif les normes de l’OMS pour toutes les substances polluantes. Avant les élections de 2019, tous les partis politiques sont tombés d’accord à ce sujet, qui figure par ailleurs dans l’accord de gouvernement. Le réseau demande instamment de revoir les règles relatives à la qualité de l’air afin d’intégrer cette ambition.
2. Les collectifs et mouvements bruxellois pour la qualité de l’air exigent que l’actuel réseau de surveillance de la qualité de l’air soit renforcé, qu’il devienne plus démocratique et transparent et qu’il attire l’attention sur les zones à risque. Ils se réjouissent de la naissance de nouveaux projets de science participative. Le réseau demande cependant de ne pas oublier la surveillance officielle. Ils espèrent que les nouvelles stations annoncées voient rapidement le jour et qu’elles effectuent des mesures dans les endroits où la pollution est la plus élevée et où habitent les plus vulnérables d’entre nous.
3. Le réseau demande l’introduction d’un système qui contribue à réduire sensiblement la circulation automobile. La combustion de carburants fossiles pour le transport et les embouteillages constituent des obstacles non négligeables pour une meilleure qualité de l’air. Ils demandent la mise en place d’un régulateur de congestion pour l’ensemble du trafic motorisé dans la Région de Bruxelles-Capitale. Prenez exemple sur Stockholm, qui a réduit sa circulation automobile de 30 % après s’être dotée d’un tel régulateur.
4. Les collectifs et mouvements bruxellois pour la qualité de l’air demandent une réorganisation de l’espace public en faveur des usagers actifs de la route et des fonctions résidentielles. À l’heure actuelle, environ 70 % de cet espace est réservé aux véhicules. Si l’on veut que Bruxelles devienne une ville accueillante pour ses enfants, nous avons besoin d’un package cohérent dans le droit fil de Good Move : réaménagement des rues et des places, promotion des moyens de déplacement actifs, plans de circulation pour protéger les quartiers, sécurisation des environs des écoles, etc.
Comme dans de nombreuses villes européennes, la COVID-19 a changé la manière dont nous nous déplaçons dans et autour de Bruxelles. Ses habitant·e·s ont commencé à se déplacer davantage à pied et à vélo. Au fur et à mesure que la vie reprend ses droits, nombre d’entre eux et elles restent fidèles à ces nouvelles habitudes qui bénéficient à la qualité de l’air et au climat, et donc à bien des égards à notre santé. La crise sanitaire actuelle nous a dès lors ouvert les yeux sur ce à quoi pourraient ressembler nos cités. En outre, 68 % des Européen·ne·s souhaitent que les voitures restent bannies de leur ville une fois que la page de la COVID-19 sera tournée[4].
Le réseau réclame que le gouvernement bruxellois respecte l’ambition qu’il a si clairement formulée au début de son mandat.
« Il y a déjà eu beaucoup d’avancées en ce qui concerne nos quatre exigences. Mais il faudra faire beaucoup plus encore pour transposer l’exploration et la préparation en actes. Le moment est venu d’agir pour faire de Bruxelles une ville saine et inclusive qui offre l’espace et l’air pur que méritent ses habitant·e·s. » - Tim Cassiers, expert qualité de l’air et mobilité, BRAL
Signés par :
BRAL, Chercheurs d'Air, Clean Air Brussels, Cosmopolis Centre for Urban Research, Filter Café Filtré, Greenpeace, Luchtster, Bruxsel'air.
En collaboration avec HEAL sur la campagne internationale #CleanAirForAll
Contact presse:
BRAL : Tim Cassiers, tim@bral.brussels, 0476 449 223
[1]WHO 2016: https://bit.ly/3jcxZlL
[2] WHO 2018: https://bit.ly/34Ji62v
[3] HEAL sd: https://www.env-health.org/wp-content/uploads/2019/11/Healthy-Schools_infographic.pdf
[4] Politico, 2020 - https://www.politico.eu/article/life-after-covid-europeans-want-to-keep-their-cities-car-free/
S'il faut rebaptiser un grand tunnel routier à BXL comme le tunnel Léopold II, le BRAL ne manque pas d’idées. Pourquoi pas le « tunnel de Madame Pheip » ? Avec sa pipe caractéristique et son intransigeance, Madame Pheip est l'alliée courageuse du célèbre personnage de bande dessinée Néron, et plus encore, une icône bruxelloise.
Néron c’est aussi Bruxelles. L'humour décalé des bandes dessinées reflète bien la "zwanze" typique de Bruxelles, dont les rues servent de toile de fond aux histoires. Et puis, surtout, le musée Néron existe (sisi), et se trouve au cœur de Bruxelles !
Cette forte femme mérite donc pleinement de donner son nom à un lieu, comment dire ?, si emblématique. Et le choix de ce tunnel pour voitures se passe d’explications.
Tunnel et Madame Pheip se valent en termes de pollution. Tous deux doivent d’ailleurs reprendre un nouveau souffle. Et puis, avec sa pipe et sa fleur de matelas – son attribut et arme secrète – cette grande dame prend littéralement à la gorge chacun des autres personnages. Exactement comme l’effet des bouches des tunnels sur les quartiers environnants (voir aussi nos vidéos Piekaboo's www.bral.brussels/fr/piekaboo).
Autant de raisons incontestables ont amené le BRAL à proposer Madame Pheip à l’occasion de l'appel à un nouveau nom de tunnel.
Mais pas si vite :
- En tant que féministes, nous trouvons dommage (voire insultant) que ce soit une pièce aussi triste et obsolète qu'un tunnel routier que l’on choisisse d’associer à un nom de femme. Madame Pheip se trouvant justement être une féministe inébranlable - relisez le "De Dolle Dina" de 1970 - nous avons hésité un instant… Mais qu’à cela ne tienne : nous miserons sur le fait que notre Madame Pheip, en tant qu'écran de fumée, aidera les automobilistes à trouver leur chemin vers des moyens de transport plus sains.
- Deuxième bémol : Néron et Madame Pheip sont, il est vrai, moins connus hors de la culture flamande. Mais grâce à ce tunnel, nous y remédierons.
- Du coup nous avons pensé à la Bianca Castafiore comme alternative. Mais 1/ elle ne fume pas et 2/ le tunnel est-il assez solide pour résister à sa voix ? Enfin bien sûr, ce tunnel ne serait pas une grande perte, mais alors optons pour une démolition plus franche.
- Vous croyez que cela ne se fait pas d’appeler une place par le nom d’un personnage de BD ? Détrompez-vous, la place Bianca Castafiore existe déjà, à Amsterdam.
D’autres suggestions de nom ? Envoyez-les jusqu'à la fin de ce mois sur https://mobilite-mobiliteit.brussels/fr/debut-de-la-renovation-du-tunne….
Photo : "journée internationale de la femme" par allfr3d avec la licence CC BY-NC 2.0
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