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A Bruxelles, les véhicules diesel en circulation sont toujours trop polluants - Nouvelle étude

Une étude publiée aujourd’hui par l’organisation non gouvernementale ICCT (International Council on Clean Transportation) est sans équivoque : près de la moitié des kilomètres sont parcourus à Bruxelles par des véhicules diesel dont les émissions dépassent largement les limites réglementaires. Les organisations actives dans la protection de la qualité de l'air à Bruxelles répondent : n'attendons pas 2030 pour sortir du diesel à Bruxelles.

L’ICCT publie aujourd'hui les résultats de mesures des émissions réelles des véhicules en circulation à Bruxelles, réalisées en automne dernier. Pendant deux mois, en collaboration avec Bruxelles Environnement, les émissions de 130 588 véhicules ont été mesurées à des points clés de la ville, grâce à la technologie de remote sensing. Les résultats montrent que pour les véhicules diesel en circulation à Bruxelles et équipés de moteurs de 6 à 15 ans d’âge, les émissions réelles d’oxyde d’azote peuvent être jusqu’à 5 fois supérieures aux limites réglementaires. Or, presque la moitié des mesures réalisées par cette étude concernaient ce genre de véhicules. De plus, ces types de moteur diesel ont un impact important sur les émissions. Par exemple, les voitures diesel Euro 5 (mis en circulation à partir de 2011) contribuent à hauteur de 40% des émissions d'oxyde d’azote des voitures, tout en ne représentant que 20 % des véhicules mesurés.

À Bruxelles, les autorités ont prévu la sortie de tous les moteurs diesel d’ici 2030. Selon les organisations actives dans la protection de la qualité de l’air, le rapport d’ICCT montre que la sortie des véhicules diesel est urgente et devrait être accélérée.

Raf Pauly, coordinateur pour le BRAL, réagit: “Ce rapport montre à quel point la sortie des diesel Euro 4 en janvier 2022 est importante pour la qualité de l’air à Bruxelles, et que la zone de basses émissions est un outil important. Mais il montre aussi que pour les autres moteurs diesel, plus nombreux encore, les niveaux d’émissions de dioxyde d’azote et de particules fines sont trop élevés. Les moteurs diesel appartiennent au passé. A Paris, ils seront interdits dès 2024. Il faut accélérer la sortie de ces moteurs le plus tôt possible, et ce avant 2030.

Ce rapport est publié deux semaines après la mise à jour du ranking d’ISGlobal, qui positionne Bruxelles en 8ème position des villes européennes les plus meurtrières en termes d’exposition au NO2. D’après ce ranking, 433 décès prématurés pourraient être évités si les niveaux de pollution de l’air étaient alignés aux dernières recommandations de l’Organisation Mondiale de la Santé. De plus, selon une étude d’EPHA en octobre 2020, chaque Bruxellois perd en moyenne 1.395 euros à cause de coûts en soins de santé dûs la pollution de l’air par an.

Pierre Dornier, président de l’ASBL Les Chercheurs d’Air, réagit également: “Cette étude est un nouveau signal d’alarme. Le diesel propre n’existe pas. Il coûte cher à notre santé, à notre planète et à notre porte-monnaie. La région Bruxelloise doit accélérer la mise en place d’outils pour que tout le monde puisse s’affranchir de ce carburant fossile au plus vite : accompagnement des citoyens vers une mobilité durable, aides aux professionnels, bornes de recharge rapide pour les taxis, etc. Les solutions existent, utilisons les ! 

Contacts presse:
Raf Pauly, coordinateur pour le BRAL (NL)
raf@bral.brussels
+32487 319 420

Pierre Dornier, président de l’ASBL Les Chercheurs d’Air (FR)
pierre@leschercheursdair.be
+32496 815 263

Schaerbeek-Formation est un nœud ferroviaire et une ancienne gare de triage au nord de la gare de Schaerbeek. Que réserve l’avenir au dernier grand espace non-construit de Bruxelles ? BRAL le découvrait avec quelques intervenant.es de premier plan et 40 cyclistes. Vous pouvez trouver le texte complet ci-dessous avec les photos en bas de page. Nous en avons également fait un beau pdf avec les images à la bonne place et une petite question de quiz. A vous de choisir :-)

Schaerbeek-Formation est une ancienne gare de triage et un nœud ferroviaire d’une taille gigantesque au nord de la gare de Schaerbeek et à l’ouest de Haren. Un coup d’œil sur la carte suffit pour comprendre que les distances sont trop importantes pour une promenade à pied, nous avons donc exploré le site à vélo. Le tour a vite affiché complet. Plus de quarante cyclistes ont saisi cette occasion unique de visiter le site, d’habitude inaccessible, pour tenter de résoudre une série de mystères. Voici le compte rendu.

Introduction

Le terrain est encore et toujours utilisé pour nettoyer et entretenir les trains. En 2011, une partie du site est encore envisagée pour implanter notre temple national du football. Par contre, il n’en est déjà plus question dans le schéma directeur de Schaerbeek-Formation de 2013, dont l’axe central est une plateforme logistique en liaison avec l’eau et la voie ferrée. Ensuite, silence radio. La seule certitude est que le Fonds de l’infrastructure ferroviaire (FIF) veut aujourd’hui vendre 40 hectares de terrain. La SNCB et Infrabel (qui avant 2005 formaient encore une entité unique, la Société Nationale des Chemins de Fer Belges) restent les propriétaires et les utilisateurs de l’autre partie du site. La carte ci-dessous présente une vue générale du site et de ses propriétaires. Les discussions actuelles portent principalement sur la zone en bleu.

Après une longue période de calme plat, les choses commencent néanmoins à bouger et nous découvrons cette citation surprenante dans l’accord de gouvernement (2019-2024) : « Le Gouvernement lancera par ailleurs une étude globale sur l’opportunité d’opérer une remise de la Senne à ciel ouvert sur le site de Schaerbeek-Formation. » Il fait aussi explicitement le lien avec la crise climatique. Le moment est venu pour un état de la situation ! Avanti ! Ou pas ?

Un léger vent de panique se met à souffler devant un portail fermé qui aurait dû être ouvert. Quelques appels téléphoniques plus tard, les portes s’ouvrent ! C’est une troupe enthousiaste qui donne ses premiers coups de pédale en Terre promise.

1. Perspective

Du haut du talus, nous bénéficions d’une vue panoramique sur les environs. C’est-à-dire sur l’immense zone concernée par le projet, mais aussi sur la zone naturelle voisine, le « Moeraske », la zone industrielle le long du canal, Neder-over-Heembeek, le viaduc de Vilvorde et la tour UP-site. Il suffit de grimper de quelques mètres pour qu’une grande partie de la vallée de la Senne se déroule sous nos pieds. C’est là que le premier intervenant puis la deuxième intervenante prennent la parole.

Thomas Van den Boogaerde, chargé de projet Stratégie territoriale chez Perspective, nous présente le contexte spatial et les principales intentions politiques. Pour ce faire, il se base sur deux cartes du Plan Régional de Développement Durable (PRDD) et sur un schéma du plan de qualité paysagère et urbanistique (BKP, pour Beeldkwaliteitsplan) pour la zone du canal. Les deux sont des visions stratégiques, donc pas des projets finalisés.

Logistique et production économique

Dans le PRDD de 2018, Schaerbeek-Formation correspond à une « grande réserve stratégique » au cœur de Bruxelles, avec pour principales fonctions la logistique et la production économique. Celles-ci ne sont pas encore concrétisées précisément, mais fournissent l’orientation générale pour le développement de cette zone. Le Port de Bruxelles reviendra plus en détail sur ce point par la suite.

Réseau écologique

Dans le même temps, le PRDD admet que le site s’inscrit dans un réseau vert interrégional plus vaste. Vérifiez les flèches sur la carte. La valeur écologique de Schaerbeek-Formation ne réside pas seulement dans le site proprement dit, mais aussi dans son emplacement au sein du réseau écologique bruxellois dans son ensemble et dans ses liens avec les zones avoisinantes. Ce qui vaut pour la situation actuelle du site ainsi que pour la manière dont il peut être développé en vue de devenir un maillon important de cette chaîne.

Plan de qualité paysagère et urbanistique (BKP)

Le développement de Schaerbeek-Formation tient compte également du plan de qualité paysagère et urbanistique (BKP) qui doit renforcer la qualité paysagère de la zone du canal (et donc de la vallée de la Senne), notamment au sein des innombrables plans de développement qui y sont rédigés. Si la qualité paysagère a déjà été mise en avant par le passé (?) comme lubrifiant pour de nouveaux logements chics au bord de l’eau, le maintien et une meilleure intégration des activités de production y prennent de plus en plus d’importance.

Le BKP s’articule autour de deux grandes idées : le développement de coulisses vertes le long du canal (et perpendiculairement à lui) et la remise à ciel ouvert de la Senne. Ces « coulisses » peuvent également servir de points de vue ouverts sur l’eau, avec ou sans accès à la rive.

La réflexion du BKP, avec l’application de ces principes à Schaerbeek-Formation et plus spécifiquement dans la zone qui sera « libérée » d’ici peu, les fameux 40 hectares que le Fonds de l’Infrastructure Ferroviaire (FIF) est en train de vendre.

Attention, cette première vision date de 2019. La Senne y resurgit pour la première fois et s’y dessine même une timide tentative de « coulisses », « corridors » qui sont des sortes de bras verts traversant la zone industrielle. Beau début. C’est par ces principes aussi que Bruxelles Environnement entend y tenir de hautes ambitions paysagères (voir ci-dessous).

Les enseignements de Perspective

A ce stade aucune décision n’est encore prise pour la destination du site mais on se focalise sur différentes dimensions importantes : développement économique, environnement, mobilité, etc. Concrètement, la vocation logistique/industrielle est bel et bien confirmée, tandis que le lit dévié de la Senne fait désormais partie des analyses et discussions en cours.

Perspective participe également au processus interrégional de réflexion (encore un autre, notamment via la plateforme BUDA +), et –nouveau !- une étude de mobilité a été entamée pour tenter de comprendre l’impact cumulé de tous les projets en chantier autour du Ring à proximité, en Flandre ou à Bruxelles.

Autre info intéressante : sur Schaerbeek-Formation se trouvent encore quelques bâtiments historiques, dont un bunker de la Deuxième Guerre mondiale et un dortoir de la résistance. Ce bunker a été classé en 2019, mais le dortoir et ses fresques ne le sont pas encore. Une des personnes présentes a donc suggéré à Perspective de les protéger.

2. Natagora

Surveiller et renforcer la biodiversité, voilà une priorité pour l’association Natagora, très active à Bruxelles. Par exemple sur le site Josasaphat, mais aussi et depuis quelques mois sur Schaerbeek-Formation, sous l’impulsion de quelques bénévoles.

Amandine Tiberghien (Natagora) fait elle aussi le lien entre Schaerbeek-Formation et les zones avoisinantes de la Région : l’ensemble fait partie d’un réseau écologique plus vaste encore. À Bruxelles, le réseau écologique se subdivise en trois zones, décrites dans le plan Nature : des zones centrales (à haute valeur biologique), des zones de développement (à valeur biologique moyenne ou haute valeur biologique potentielle) et des zones de liaison (site qui par ses caractéristiques écologiques favorise la dispersion ou la migration des espèces).

Le Moeraske et le parc Walckiers juste à côté de Schaerbeek-Formation possèdent officiellement le statut « le plus élevé ». La friche de Schaerbeek Formation proprement dite se compose de « zones de développement » et de « zones de liaison » entre les voies ferrées. C’est en fait une seule et gigantesque zone de liaison car un grand nombre de plantes et d’animaux se déplacent le long de lignes de chemin de fer (et surtout des talus). Naturellement, le canal et la Senne sont aussi des éléments de liaison importants. Ce qui amène parfois des surprises. Depuis plusieurs années, un couple de petits gravelots niche un peu plus loin au bord du canal, sur un parking réservé aux bennes à ordures.

De nombreux remblais accueillent une grande biodiversité et jouent un rôle primordial dans la diffusion d’espèces végétales et animales.

Mais les recensements du site viennent à peine de commencer, si bien que la biodiversité actuelle est encore mal connue. Ce qui est par contre très clair, c’est qu’elle est d’ores et déjà extrêmement riche et que le potentiel est immense. Nous observons un grand nombre d’oiseaux migrateurs, des insectes, des plantes et même des reptiles exceptionnels pour Bruxelles (dont des lézards, grands amateurs de sols chauds et rocailleux).

Natagora estime que près de 900 espèces vivent sur le site et alentour (la liste provisoire se trouve ici). Les talus ou remblais méritent une mention spéciale en raison de leur valeur écologique élevée.

Les bâtiments construits sur le site présentent eux aussi une certaine valeur écologique. L’un d’eux abrite par exemple un couple de faucons crécerelles. Et une énorme colonie d’hirondelles de fenêtre niche dans la meunerie CERES, pas loin sur le canal. Elles viennent chasser au-dessus de Schaerbeek-Formation.

Natagora met en place une gestion dynamique d’endroits comme Schaerbeek-Formation. Cette gestion ajuste la présence d’activités productives à celle des espèces, par exemple sous la forme d’usages différés dans le temps. Citons notamment les cavités dans le sol dans lesquelles les oiseaux viennent nicher. En période de couvaison, la circulation sur le site peut être déviée pour ne pas les déranger. Laisser intacts certains habitats ou éléments paysagers (arbres, haies, etc.) est également envisageable. Amandine cite aussi le projet Life quarries, qui maintient le rôle des carrières en activité comme lieu propice pour certaines espèces.

Quoi qu’il en soit, il importe donc d’identifier au plus vite les zones les plus vulnérables aux perturbations et celles qui présentent un grand potentiel de développement écologique. Le site fait converger des intérêts différents : l’élaboration d’un réseau vert et bleu et le développement industriel avec une gestion dynamique.

3. Viabuild

L’entreprise Viabuild est « spécialisée dans les travaux de voirie, de démolition, de terrassement, d’asphaltage, de désamiantage, de génie civil et de rénovation d’égouts ». Présente sur le site et opérateur important du métabolisme urbain, elle collecte les gravats (et débris de béton), l’asphalte, la terre et le sable, qu’elle transforme en matériaux pour les travaux de voirie par exemple. L’opération fournit notamment des matériaux de fondation et du sable tamisé. Sa concession arrive à échéance en 2028. Son équipe compte de 4 à 5 collaborateurs et jusqu’à 10 en période de pointe.

Diederik De Pauw : « Environ 85 % des gravats que nous traitons proviennent de la Région bruxelloise, et les matériaux obtenus sont à leur tour presque entièrement utilisés à Bruxelles. Quant au sable tamisé, nous en livrons aussi en dehors de Bruxelles (Wallonie, Flandre). Ce site n’a pas de débouché sur l’eau, mais un peu plus loin, à Neder-over-Heembeek, nous possédons un terrain équipé d’un quai pour le transport par bateau. » Une condition pour l’obtention de la concession à cet endroit.

Le travail de Viabuild à Schaerbeek-Formation se déroule en plein air, sans branchements électriques. Ses machines sont donc alimentées par des moteurs diesel, qui doivent respecter les normes bruxelloises en matière de NOx. Mais même sans électricité, ses collaborateurs se plaisent ici. Non seulement parce que le site est bien situé, mais aussi parce qu’il est suffisamment spacieux et qu’on peut encore y faire beaucoup de bruit, comme dans le bon vieux temps. Pour certaines activités, être loin de zones résidentielles constitue un avantage.

En Belgique, l’activité de Viabuild se révèle très complexe, car chaque région a ses propres normes. Si bien que ce qui est considéré comme des « déchets » dans l’une est assimilé à une matière première ou à de la terre dans l’autre. Et lorsqu’un matériau devient tout à coup un « déchet », il faut le traiter différemment. Avec pour effet pervers que de la terre a déjà été chargée sur un camion et transportée dans une autre région quand il s’avère qu’elle est devenue un déchet ou qu’elle ne peut plus être utilisée pour une application spécifique.

À ce propos, la zone dans laquelle travaille Viabuild contient énormément de couches de terre entassées les uns sur les autres, mais pas par Viabuild. Les déplacer coûterait cher en temps et argent : il faudrait en effet commencer par les analyser puis demander les permis nécessaires. En principe, ces « terrils » ne peuvent pas rester là car après 3 ans de stockage le site est désormais assimilé à une décharge et il faut dès lors un permis spécial pour y maintenir les terres. En plus, l'évacuation et la dépollution de terres coûte beaucoup. Dès lors le propriétaire pourrait envisager d'amortir ce coût par un développement plus rentable du site.

Faut-il vraiment araser ces « terrils » ? Natagora remarque que ces collines « illégales » peuvent présenter un intérêt écologique. Une solution créative est-elle envisageable ? Quoi qu’il en soit, un « terril » de ce type introduit aussi un peu de variation dans le paysage. Une idée à reprendre dans le plan paysager qui doit encore être rédigé ?

A ce propos, la législation devrait changer à l’avenir afin de traiter les sols excavés comme une ressource et non un déchet. Notre nouveau projet de recherche action participative Super Terram envisage d’explorer ces questions. Plus d’infos ici.

Diederik termine en précisant que ce site est souvent victime de dépôts clandestins, surtout le week-end (quand personne n’est présent). Ce qui signifie qu’il faut évacuer une certaine quantité de déchets, dont des plaques d’amiante, au début de chaque semaine.

4. Bruxelles Environnement

Martin Ohsé travaille pour Bruxelles Environnement, au département Eau. Il présente la vision de cette administration pour Schaerbeek-Formation, avec aussi un lien avec les environs et les plans stratégiques existants.

Selon lui, le site est important pour sa valeur paysagère, sa place dans le réseau écologique, son rôle récréatif (mobilité douce) et son rôle économique (transport de marchandises, logistique, etc.).

L’infiltration des eaux et la lutte contre les inondations y sont particulièrement importants. La ville de demain ne peut plus laisser l’eau s’écouler sans rien faire. Concrètement, il faut réfléchir au rôle de la Senne au sein de cette zone. La rivière traverse Bruxelles sur environ 14 km, avec un parcours visible sur presque 5 km.

Un peu plus au Nord, à côté de la station d’épuration, la Senne vient d’être mise à ciel ouvert sur moins de 200 m. Cette expérience fournit énormément d’enseignements sur la complexité d’une telle opération. On ne se limite pas à la restauration du cours d’eau, il faut aussi aménager des « berges naturelles » (qui ont leur rôle à jouer en cas d’inondation), penser à l’impact qu’on espère positif sur la biodiversité présente et être attentif aux espèces qui reviennent spontanément ou pas.

Dans ses plans, Bruxelles Environnement se base sur le Plan de qualité paysagère et urbanistique (BKP). La Senne n’est pas seule à jouer un rôle : des coulisses vertes (évoquées plus haut par Thomas) reliées à la rivière ont elles aussi leur mission à remplir. Mais comment connecter ces coulisses (des sortes d’ affluents) à la Senne ? Et comment transformer le tout en un réseau vert et bleu digne de ce nom ? La Senne devra de toute façon être déviée vers un nouveau lit. Il semble y avoir un consensus sur son tracé futur (cf. BKP). Quant au nombre, à la forme et à la largeur de ces coulisses par contre, rien n’a encore été décidé. Il faut dire qu’elles auront un impact non négligeable sur l’emplacement des activités économiques, leur organisation et leur programmation.

Les coulisses servent à stocker l’eau de pluie -collectée dans la zone industrielle par exemple- ainsi que l’eau de la Senne en cas d’inondation en cas de fortes pluies pour lui laisser le temps de s’infiltrer dans le sol. En ces temps, ce n’est pas un luxe inutile. Donner à l’eau le maximum de temps pour percoler et se préparer à des pluies abondantes est le seul moyen de planifier notre ville en cette année 2021. Heureusement, Bruxelles Environnement met la barre haut avec des affluents larges et nombreux qui traversent la zone industrielle au départ de la Senne et se réduisent à rien vers l’avenue de Vilvorde.

Des négociations serrées sont en cours mais nous croisons déjà les doigts pour que le scénario le plus exigeant l’emporte.

En bref, face aux nouvelles exigences, trouvons de nouveaux moyens et prenons-le par l’autre bout. Commençons par un projet paysager et écologique et ensuite seulement, prévoyons la place pour les développements économiques souhaités, à concrétiser de manière évolutive.

5. Port de Bruxelles

Valérie Tanghe, manager du cluster portuaire au Port de Bruxelles, nous parle de la vision du Port pour le site.

Avant toute chose, le Port est un maillon important dans le développement durable de Bruxelles : il permet de supprimer des camions, avantage non négligeable pour la mobilité urbaine. De ce point de vue, Schaerbeek-Formation est très bien situé : implanté au Nord de Bruxelles, le site pourrait devenir un chaînon primordial dans le réseau logistique de la capitale, lui promettant un horizon au-delà de l’adoption de camions électriques ou de « millions » de camionnettes. Schaerbeek-Formation a des atouts qui peuvent être réactivé dans la ville : il n’y a pas si longtemps, une liaison ferroviaire reliait encore le site au port de Bruxelles. Par ailleurs, notons que le port possède déjà une certaine expérience dans l’utilisation de vélos-cargos.

Valérie rappelle encore que dans les chaînes de production mondiales, le commerce en ligne représente une grande partie de la consommation. Pour résister à cette pression de la mondialisation, une ville a besoin d’un réseau logistique durable. Dès lors, un port en milieu urbain est un atout rare à ne pas sous-estimer. Autre point important : les entreprises à l’intérieur et autour du port ont besoin de place exigée pour leurs activités économiques.

Madame Tanghe plaide donc ardemment en faveur de la « grande plateforme logistique multimodale » qui est prévue dans le schéma directeur de 2013 (qui mijote depuis des années). Dans son Masterplan 2040, le Port de Bruxelles évoque une zone logistique « low emission » pour laquelle il a besoin de 20 hectares (en secret, il lorgne donc déjà sur une extension en direction des terrains où travaille actuellement Viabuild).

Objectifs de la zone logistique « low emission » :

  • soutien à l’augmentation du trafic de conteneurs ;
  • maintien et augmentation de la connectivité intermodale (navigation intérieure et rail) ;
  • création d’emplois et de valeur ajoutée ;
  • optimisation des chaînes logistiques et de distribution urbaine ;
  • contribution écologique ;
  • intégration urbaine.

Mais bien sûr, un Masterplan n’est jamais qu’un Masterplan, fut-il du Port. Mais tout de même, l’idée a récemment été confirmée dans le contrat de gestion 2021-2025 que le Port a signé avec la Région. En dessous des principaux objectifs, nous retrouvons également ce qui suit :

«Etudier et coordonner l’opérationnalisation d’une plateforme logistique régionale multimodale (eau-rail-route) en tenant compte d’une éventuelle remise à ciel ouvert de la Senne dans le cadre d’une infrastructure verte et bleue et des impératifs économiques et planologiques identifiés par les études coordonnées par Perspective.brussels, Citydev.brussels et le Port. »

Bémol en passant : la « remise à ciel ouvert de la Senne dans le cadre d’une infrastructure verte et bleue » n’est donc pas considérée comme un « impératif planologique » mais plutôt comme un accessoire envisageable… Mais restons positifs : le Port marque d’ores et déjà son intention de tenir compte de plans éventuels liés à l’ouverture de la Senne, c’est un pas dans la bonne direction.

Dès lors, le principal enjeu portuaire est : le Port de Bruxelles comme la Région tiennent à l’idée d’une plateforme logistique multimodale. Ce qui en soi est plutôt une bonne chose… À condition qu’elle privilégie en effet l’eau et le rail pour enfin libérer nos routes de bon nombre de camions. Or, le terrain ne borde pas directement le cours d’eau. Ce qui explique qu’il faut absolument préserver (et rénover) le passage à niveau sur la chaussée de Vilvorde en direction du canal et du terminal à conteneurs.

En ce qui concerne le transport en trains de marchandises : notons que presque toutes les voies ferrées pour ce type de transport viennent tout juste d’être supprimées. Le propriétaire l’a fait pour pouvoir vendre un terrain « prêt à être développé ». Ce qui est tout de même étrange pour un site qui veut faire venir des marchandises par train pour ensuite les distribuer dans toute la ville. En ce moment, Infrabel construit de nouvelles voies pour les trains de marchandises dans une autre partie du site. Il est probable qu’elles serviront principalement à réassembler les trains avant qu’elles poursuivent leur route vers ailleurs. Du coup, même si une connexion avec le centre logistique espéré paraît logique,  nous ne voyons pas du tout comment elle pourrait se faire.

Un tunnel sous les voies existantes et un pont au-dessus du cours prévu pour la Senne ? Ce lien est donc au mieux incertain. Selon toute vraisemblance, les trains desserviront le centre logistique en empruntant de nouveaux embranchements installés sur les mêmes voies qui doivent également assurer le désenclavement en direction du canal.

En bref : nous soupçonnons fortement que l’enlèvement hâtif de presque toutes les voies (qui sont encore visibles sur Google Maps) apparaîtra vite comme une erreur historique. Et comme l’indique cet article de BRUZZ, Infrabel montre peu d’enthousiasme à l’idée de conserver ce qui reste. La bonne nouvelle, c’est que le gouvernement fédéral a décidé d’investir davantage dans le transport ferroviaire de marchandises.

Après plus de 10 ans, nous ne savons toujours pas avec certitude si le centre logistique multimodal est simplement possible. La réponse à cette question revêt pourtant une importance cruciale quand on sait qu’il joue un rôle central à Bruxelles.

En l’état des choses, le Port de Bruxelles va réaliser une étude de faisabilité avec Citydev concernant le développement d’un hub logistique et d’un parc d’activités économiques sur le site de Schaerbeek-Formation. Affaire à suivre…

Citydev (l’ancienne SDRB) est connue principalement pour sa vocation à proposer des logements publics, mais aider les entreprises à trouver des sites fait aussi partie de ses missions de base. Ayant malheureusement dû déclarer forfait pour notre promenade à vélo, madame Tanghe a repris le flambeau et a donné quelques mots d’explication sur le futur industriel du site. Notez que c’est une constante dans l’histoire de Schaerbeek-Formation : ces deux grands acteurs n’hésitent pas à unir leurs forces pour un projet commun. Aujourd’hui, ils ont l’intention de développer ensemble ces 40 hectares… À condition que la Région les achète, évidemment.

Vous suivez toujours ?  Comme l’étude porte sur le hub logistique et un parc d’activités économiques  et que le Port a besoin d’une bonne vingtaine d’hectares pour son hub logistique, il en reste donc une vingtaine pour le parc d’activités économiques dont devrait s’occuper Citydev.

A ce jour, on en sait très peu, pour ne pas dire rien, sur ce projet. Par contre nous avons quant à nous une idée ce qu’il ne doit pas devenir : un classique zoning industriel rempli de « boîtes à chaussures », avec un va-et-vient continu de camions et camionnettes. Le lien entre centre logistique, rail, eau et Bruxelles doit être fait.

Quant à un projet écologique et paysager (tout aussi important et demandeur d’espace), on est en droit de se demander si les deux acteurs économiques ici à la manœuvre en sont vraiment convaincus ?

Pour le BRAL, ce qui est clair est que les volets logistique et industriel ont leur place à Schaerbeek-Formation si un bénéfice environnemental peut être réalisé - par exemple en faisant disparaître une partie de la circulation sur les routes et autoroutes ainsi que dans la ville - et s’il peut être intégré dans un projet écologique et paysager fort.

6. Fonds de l’Infrastructure Ferroviaire (FIF)

Parmi nous se trouve aussi le propriétaire du site, en la personne de Paul Schouls du FIF-SFI. Enfin, un représentant du propriétaire, qui n’est autre que le Fonds de l’Infrastructure Ferroviaire. FIF nous dit Paul.

En gros, c’est le véhicule juridique qui met sur le marché les terrains dont la SNCB n’a plus besoin. Mais la FIF est totalement indépendante de celle-ci et n’est plus un organisme public, mais une société anonyme. Compliqué !

Heureusement, Paul, lui, est très clair : il insiste sur le fait que la FIF n’a aucun avis concernant le développement du terrain et sur qu’en fait, il nous appartient à tous. Youpie ! Vendre le site à la Région au prix maximum est donc à notre avantage à tous. Car l’argent que le gouvernement fait entrer lui-même dans ses caisses, il ne doit pas aller le chercher dans les poches des contribuables.

Que de réjouissances… Nous comprenons bien que l’État belge veut fonctionner de manière rentable, mais pas au détriment de l’intérêt commun tout de même ? Maximiser le profit risque de laisser peu de place, voire zéro, à ce qui semble à première vue rapporter peu. Par exemple, la nature et l’infiltration de l’eau.

Mais nous partons du principe que le bon sens l’emportera et que le gouvernement fédéral cèdera le site à la Région bruxelloise à un prix d’ami si celle-ci arrive avec un plan qui sert aussi cet intérêt commun. La Région bruxelloise doit donc faire primer ce dernier lorsqu’elle devra élaborer un cadre légal pour Schaerbeek-Formation. Par exemple au moyen d’un Plan d’aménagement directeur.

7. Résumé

Où en sont les plans pour Schaerbeek-Formation en cette année 2021 ? Voici une liste très succincte de ce que nous avons appris aujourd’hui :

  1. Le développement industriel et la plaque tournante logistique intermodale restent les éléments centraux des projets actuels, comme en 2013. Le Port et Citydev joignent leurs efforts et travaillent ensemble à une étude de faisabilité.
  2. Bruxelles Environnement a préparé une vision paysagère qui se base sur une Senne mise à ciel ouvert et plusieurs bras verts qui traversent la zone industrielle. Ceux-ci permettent à l’eau de pluie de s’infiltrer dans le sol et peuvent aussi récupérer les eaux de crue de la Senne en cas de besoin. Les partenaires du point 1 ne disent pas non au principe mais ne brûlent pas non plus d’enthousiasme. D’autres, comme Natagora, applaudissent par contre des deux mains.
  3. Il n’y a pas encore de plan intégrant ces deux ambitions. Courageuse, l’équipe de Perspective s’efforce de coordonner ce bazar. On ne sait pas encore s’il y aura un Plan d’aménagement directeur pour Schaerbeek-Formation.
  4. Ha et oui, nous avons aussi appris que la terre peut être du déchet et inversement…

8. Recommandations du BRAL

Une chose est claire, nous ne sommes pas encore sortis de l’auberge. Mais ce n’est pas grave. Schaerbeek-Formation est une zone d’intérêt différé, et notre toute dernière réserve foncière. Nous ne pouvons pas nous permettre d’aller trop vite et de baisser le niveau d’ambition « parce qu’il y a trop longtemps que ça traîne ». Ou parce que l’une ou l’autre opportunité apparaît.

Si vous lisez uniquement ce dernier chapitre, voici un résumé des conclusions et recommandations les plus importantes pour nous.

  • Commencez par un projet paysager et écologique et ensuite seulement, prévoyez de la place pour les développements économiques souhaités, à concrétiser de manière évolutive. Nous avons ici une occasion unique d’écrire une très belle histoire, dont pourront s’enorgueillir de nombreuses générations encore. Connaître les endroits sur lesquels nous ne voulons définitivement pas construire permet de garder d’autres parcelles en vue d’un éventuel développement. Entretemps, la nature peut s’y épanouir, comme dans les zones voisines.

En d’autres termes, inversons le cours normal des choses et faisons volontairement de la place à l’eau et au développement du milieu naturel. Changement d’époque, changement de moyens.

  • Selon le BRAL, il y a de la place pour la logistique et l’industrie à Schaerbeek-Formation. À condition qu’elles s’accompagnent d’un bénéfice environnemental. Par exemple en faisant disparaître une partie de la circulation sur les routes et autoroutes et en ville et en utilisant plus le rail et l’eau. Cela implique également un plan logistique audacieux au-delà des limites du site. En ce qui concerne le nouveau « parc d’activités » : soyez ferme. Ce parc peut être aussi laid et bruyant qu’il veut, mais il doit impérativement contribuer à un Bruxelles plus durable.

Conseils complémentaires :

  • Le dossier peut encore évoluer dans une multitude de directions, ne craignez pas d’ouvrir le débat et d’impliquer d’autres associations ainsi que la population bruxelloise. Le site a l’air loin de tout, mais comme le démontre cette journée, il suscite un intérêt énorme.
  • Ne vous pressez pas de l’assainir : cette opération coûte cher et avant même de vous en rendre compte, vous risquez de développer un terrain pour la seule raison de rentabiliser l’investissement vu qu’il vous aura coûté un bras. Parfois, un simple panneau « Interdiction de manger la terre » suffit, tout en faisant en sorte d’éviter toute pollution des eaux souterraines par exemple.
  • Les travaux de déblai s’annoncent gigantesques. Faites preuve de créativité ! Pourquoi ne pas former de petites collines avec toute cette terre ? Elles peuvent avoir un rôle à jouer en favorisant des microclimats et en atténuant le vent ou le bruit.
  • À la demande d’une des personnes présentes : n’oubliez pas Haren ;) L’idée ambitieuse d’un pont cycliste a un jour été évoquée, même si ce n’est pas une obligation, cette personne précise qu’une structure de ce type serait vraiment utile pour la liaison Haren-Bruxelles. En tout cas, le site peut remplir une fonction importante en tant qu’axe de mobilité douce. Nord-sud et est-ouest. Mais pour ce faire, il faut envisager la zone au-delà de ses limites. Et donc établir malgré tout un Plan directeur ?

Quoi qu’il en soit, le BRAL attend la suite avec impatience et vous tiendra au courant. Rendez-vous dans 10 ans ?

 
   

Merci à toutes les personnes présentes et surtout aux intervenantes et intervenants et aux organismes qui ont répondu à nos questions ou qui nous ont donné les autorisations nécessaires pour cette visite sur le terrain : Madame Tai et monsieur Schouls (FIF-SFI), Valérie Tanghe (Port de Bruxelles), Amandine Tiberghien (Natagora), Martin Ohsé (Bruxelles Environnement), Thomas Van den Boogaerde (Perspective), Diederik De Pauw (Viabuild) et Simon Kerkhofs (SNCB). Merci aussi à BRUZZ qui a réalisé ce reportage sur notre sortie à vélo.

Photo 1: Placid Civic Monument, Claes Oldenburg, 1967
Photo 2: Earth interior, Athanasius Kircher, Mundus Subterraneus, 1665

Connaissez-vous l’âge de la terre sous vos pieds ? Quel fossile voudriez-vous laisser, plus tard ? Savez-vous qu’une grande part des terres à bxl ont été déplacées par l’humain ? Connaissez-vous Schaerbeek Formation ?

Bruxelles a récemment été le théâtre de recherches-actions en sciences citoyennes autour de l’air et de l’eau qui ont produit de nouvelles connaissances et fait avancer le débat politique. Maintenant, c'est la « terre » et toutes les dimensions qu’elle conglomère que nous voulons faire émerger dans le débat public. Le projet de recherche action Co-Create, démarré le 1ier novembre, est porté par le BRAL, l’ULB, 51N4E et l’université ETH Zurich. Nous l'avons baptisé Super Terram.

Le sol est une véritable partenaire dans la fabrication des espaces. Le sol a généré la vie sur terre à partir de l’eau et des activités microbiennes. Il est l’un des écosystèmes les plus complexes et l'un des habitats les plus diversifiés sur Terre.

Pourtant, le sol est souvent invisible. Le sol conglomère une multiplicité dimensions souvent troubles ou hors des radars - pollution, fertilité, activités microbiennes, crasse, archéologie, cycle de l’eau, imaginaire, organismes, infrastructures, matériau de construction, compaction, eau, écosystème souterrain, résilience, mémoires... Aujourd’hui, les humains déplacent plus de sédiments que tous les processus naturels réunis. Aujourd’hui, on construit et détruit, transforme et déplace des terres sans égards (et souvent sans même s’en rendre compte) lors de projets d’urbanisme. Peu de gens pourtant savent que la résilience de la ville passera par le sol.

Penser et agir avec les sols, c’est donc une occasion de tisser des relations, entre savoirs et acteurs cloisonnés. Et c’est ça le but du Super Terram.

La vallée de la Senne

Prenons la terre de la vallée de la Senne, avec ses marais et réseaux d’affluents : elle a fait l’objet de perturbations radicales (rail, industries, ...) donnant lieu à de nouvelles relations multi-spécifiques humaines et non-humaines étonnantes. Au Nord, la friche ferroviaire de Schaerbeek Formation est considérée par certains comme la plus grande zone vide ou « réserve foncière » de Bruxelles (PRDD) et est actuellement en cours d’achat par la Région.

Ce qu’elle peut représenter pour nous n’est guère interrogé. Sous les radars (sauf que le BRAL y a fait un tour à vélo en octobre 2021 😉 - voici le compte-rendu), elle est pourtant le lieu d’une série de fonctions vitales comme le port, la logistique ou encore l'industrie, ainsi que de richesses biologiques. Le site est en marge des habitants, dans tous les sens du terme, périphérique et invisible.

Super Terram

Sur la friche même, mais aussi sur des sites en amont et en aval, habités et plus accessibles, nous souhaitons amener des bruxellois.es à s’intéresser aux sols et à Schaerbeek Formation dans toute sa multiplicité. Avec des citoyen.nes, des scientifiques, des institutions, creuser pour donner de l'épaisseur aux débats et épaissir notre relation aux sols qui nous tiennent, trop souvent invisibilisés ou vus en deux dimensions.

Pour cela, nous nous donnons le temps de ce projet – un an et demi renouvelables, pour chercher et explorer avec divers acteurs et actrices Bruxellois.es au-delà des registres de mobilisation classiques en urbanisme, en ajoutant aux dimensions techniques (trop souvent illisibles ou inaccessibles) celles du rapport sensible aux sols et aux relations (plus qu')humaines qui en dépendent.

Envie de rejoindre l’expérience ? Contactez marie@bral.brussels.

Photo: Philippe Massart

En CC, nous avons reçu de votre part de nombreuses lettres d'objection au plan d'aménagement directeur de Josaphat bis. Merci !

Merci beaucoup pour votre implication en tant que citoyen.ne critique dans ce dossier important ! Ensemble, nous faisons « bouger les lignes » dans l'aménagement de Bruxelles.

Maintenant, nous comptons sur les administrations et les élu.es concerné.es pour se ressaisir et lire attentivement toutes les objections. Et qu'ils en tiendront compte.

Pour en savoir plus sur les objections, consultez l’article sur notre site.

"Près de 50.000 personnes sont descendues dans les rues de Bruxelles avant la COP26 pour tirer la sonnette d’alarme sur l’urgence climatique", rappelle Nicolas Van Nuffel. "Force est de constater que leurs voix n’ont pas été prises en compte. Il est grand temps que la Belgique se mette en ordre de bataille pour affronter le chantier du siècle: réconcilier prospérité, justice sociale et respect des limites planétaires", conclut-il dans l’Avenir.

Qu’est-ce que nous voulons alors ? Pour commencer, voici.

Les plans du nouveau bâtiment du NMBS/SNCB ont fait l'objet de nombreuses critiques. Le bâtiment gris mesure environ 236 mètres de long et 60 mètres de haut. Le NMBS/SNCB est en avance sur les faits. C’est ce que nous avons dit dans une interview sur Radio 1. "L'enquête publique sur le plan d’aménagement directeur vient de se terminer et déjà un permis est demandé pour la toute dernière étape. L'ordre est inversé, ce n'est vraiment pas correct", a déclaré Steyn Van Assche.

Alors que Steyn a réagi dans la presse, notre nouveau collègue Benjamin Delori a rédigé l'objection, sa première pour le BRAL.

Le BRAL a demandé à ce que la commission de concertation remette un avis négatif pour le projet démesuré, la rue Fonsny 47b-49. La volonté de la SNCB de regrouper ses bureaux dans un seul et même lieu est tout à fait recevable. L’impact du siège tel que proposé sur le quartier ne l’est pas. D’autres alternatives sont possibles et nous ne considérons pas qu’elles ont été suffisamment explorées dans le rapport d’incidences environnementale. Estimer qu’une barre horizontale n’aura que peu d’influence sur les quartiers avoisinants ne nous parait pas crédible.

« Estimer qu’une barre horizontale n’aura que peu d’influence sur les quartiers avoisinants ne nous parait pas crédible. »

Le manque de contextualisation de l’étude d’incidences environnementales ne permet pas de donner une réelle appréciation de l’impact du projet. La construction du siège SNCB fait partie d’une opération immobilière entre la SNCB et un consortium de promoteurs immobiliers que le PAD Midi encadre. Sans une perspective claire de son avenir, le BRAL demande de ne pas accorder le permis d’urbanisme qui serait le premier domino à tomber d’une opération financière juteuse pour les promoteurs immobiliers impliqués.

Vous pouvez lire notre réaction complète dans le pdf.

Photo: Bert Boogaerts, Stadbiografen

Après notre journée d’étude avec l’ARAU et IEB sur la démolition-reconstruction, nous sommes encore plus convaincus que des grands projets urbains doivent faire l’objet de bilans environnementaux indépendants, absents des PAD maintenant. Des exemples existent : The Shifters Belgium ont réalisé le bilan carbone du PAD Mediapark.

The Shifters lancent aujourd’hui une pétition au Parlement bruxellois visant l’obligation de mesurer l’empreinte carbone des projets urbains de la Région de Bruxelles-Capitale. Si elle est signée par 1.000 personnes, elle ouvre le droit à une audition devant la commission parlementaire compétente.

Le BRAL soutient cette chouette initiative et vous invite à signer cette pétition et à la partager auprès de votre réseau.

Recherché : des artistes visuels talentueux qui s'intéressent à la mobilité et à l'environnement ! Les publicités pour les voitures, notamment les SUV, vont bientôt inonder à nouveau nos rues. Ces voitures ont-elles leur place en ville ? Nous sommes à la recherche de votre proposition créative qui attire l'attention sur les conséquences réelles des voitures promues... Les membres de la coalition #StopPubSUV feront quelque chose d'amusant avec ça.

Faites passer le mot !

Date limite : 4 janvier à 23h59.

Plus d'informations sur www.stoppubsuv.be et https://stoppubsuv.be/projet-project/

Vous pouvez demander d’interdire la publicité en faveur des combustibles fossiles en signant la pétition de Greenpeace.

Sources image : SNCB, Les visites de mon voisin

L’année démarre en trombe pour les habitant.e.s du quartier Midi, invités ce mardi 11 janvier 2022 à être entendus en Commission de concertation sur le projet de nouveau siège de la SNCB qui prendrait place dans l’ancien Centre de Tri Postal de la gare du Midi. Outre le fait que le projet se dessine sous la forme d’une gigantesque barre de 236 m de long culminant à 60 m de haut à front de l'avenue Fonsny, habitant.e.s et associations rappellent que celui-ci n'est que la première partie d’une vaste opération immobilière. En effet, le consortium privé (Immobel/BPI/Besix) en charge de l’élaboration du siège SNCB obtiendra en échange la propriété de 150.000 m² de parcelles actuellement occupées par la SNCB, le tout étant censé être cadré par le futur PAD Midi, pourtant toujours en cours d’élaboration. Ils/elles plaident pour une alternative crédible à ce désastre architectural, social et environnemental ![1]

Sous un emballage attrayant, le cadeau sous le sapin de la SNCB est rempli de pièges et faux semblants. En effet, si la décision de la SNCB de regrouper ses bureaux avenue Fonsny et de rénover l’ancien Centre de Tri Postal peut paraître séduisante de prime abord, la manière de penser cette réorganisation répond visiblement plus à une volonté d’optimisation immobilière qu’à une nécessité absolue liée à l’organisation du travail de l’opérateur ferroviaire.

En regroupant ses activités, la SNCB souhaite en fait libérer du foncier en le cédant à des promoteurs privés qui chercheront avant tout à le rentabiliser. L’opération génère en réalité une perte très conséquente de foncier semi-public et présuppose  des opérations massives de démolitions-reconstructions sur 4 îlots (Tri Postal, Atrium Midi, Delta et France-Bara) pour remplacer les bureaux actuels de la SNCB par divers projets encore indéfinis. Elle impose dans le même temps la construction supplémentaire de 30.000 m² de bureaux sur le Centre de Tri Postal. Et cela, alors que le débat qui doit cadrer ces transformations est toujours en cours dans le cadre du projet de PAD Midi.

There is no alternative, vraiment ? 

Le projet sur la table constitue un parti-pris en faveur du deal entre la SNCB et le consortium immobilier.  L’étude d’incidences du projet fait totalement l'impasse sur les alternatives consistant à répondre aux besoins de bureaux de la SNCB en les "casant" dans des bâtiments existants. Seule l'option consistant à regrouper en un seul bâtiment l’ensemble des bureaux de la SNCB a été étudiée, ce qui suppose donc une surélévation très importante des immeubles historiques existants : un bloc de 60 m de hauteur sur une longueur de 236 m pour accueillir les 30.000 m² supplémentaires demandés par la SNCB.

Rappelons tout d’abord que déjà en mars 2021, les habitant.e.s du quartier Midi s’étaient rendus en Commission de concertation pour un projet d’hôtel de 231 chambres destiné lui aussi à occuper 8 400 m² dans une partie de l’ancien Centre de Tri Postal. Cette demande de permis aurait dû être concomitante à celle du siège SNCB dès lors que les deux projets concernent le même propriétaire (la SNCB) et le même ensemble immobilier. Il est évident que ce saucissonnage nuit à une vision d’ensemble du projet au sein d’un même bâtiment historique datant de 1958. Ce « coup parti » restreignait la possibilité des alternatives à envisager pour un projet de réaffectation équilibré du bâtiment dans son environnement.[2]

Par ailleurs, le projet de siège sur la table est de 73.000 m² ce qui oblige à la surhausse précitée du bâtiment de 31.600 m². Cependant une lecture attentive du dossier permet de constater qu’en réalité 36.000 m² sont consacrés non pas à du bureau mais à des lieux de formation, un restaurant, des salles de conférence, une salle de fitness, différents espaces techniques et logistiques. Or la plupart de ces différentes fonctions sont déjà présentes dans le quartier au sein du foncier SNCB.

Si l'on peut comprendre la volonté de la SNCB de "rationaliser" son implantation dans le quartier (actuellement répartie sur une dizaine de bâtiments), le projet soumis à la demande de permis n’est pas pour autant la seule, ni la meilleure, solution possible et il a pour principal défaut d’être spéculatif. Qu’est-ce qui empêche la SNCB de conserver sa présence historique dans le quartier en pensant sa réorganisation en fonction des espaces offerts par le Centre de Tri Postal, d’une part, et d’une partie de ses bureaux en activité, d’autre part, sans qu’il y ait nécessité de construire de nouveaux immeubles plus hauts? C’eut été là tout l’intérêt de l’étude d’incidences : analyser différentes alternatives combinant le réinvestissement du Centre de Tri Postal, la préservation d’autres espaces existants en fonction de l’adéquation des fonctions voulues, quitte à procéder à un éventuel accroissement (léger) des superficies. Mais elle n’en fait rien ! Les quelques alternatives analysées sont bâclées et semblent ne laisser pour seul choix crédible que le projet initial.
 

Les principes d’une alternative respectueuse du quartier 

Pour les habitants et associations, le principe fondamental à suivre est celui de la rénovation respectueuse du patrimoine des n°s 47 à 49 av. Fonsny pour y regrouper la majeure partie des bureaux et services que souhaite y implanter la SNCB mais sans surélévation des bâtiments actuels. Si le projet est réalisé tel quel, le ciel du quartier Midi sera balafré par une longue barre de bureaux qui excède largement les gabarits actuels. Le quartier Midi est l’un des plus denses de Bruxelles et souffre d’un déficit d’espaces verts et d’espaces publics ouverts. Beaucoup d’habitants ne bénéficient pas d’espaces extérieurs privatifs. Dès lors, les seuls espaces dégagés extérieurs qui restent sont les vues vers le ciel et l’horizon. Dans un environnement urbain aussi dense, le sentiment d’écrasement dû à l’ajout d’une construction haute amplifiera d’autant plus le sentiment d’enfermement.

Sachant que l’ensemble des n°s 47 à 49 correspond à une surface disponible de 50.432 m², que la demande de la SNCB pour l’ensemble de ses fonctions est de 72.239 m², il s’agit de trouver à proximité les 23.000 m² manquants. Ces 23.000 m² pourraient prendre place dans le complexe « Delta-Flot de Senne » (Flot de Senne construit en 1960 rénové en 2014 et Delta construit en 1996), propriété de la SNCB, qui a une surface nette de 26.000 m², comprend 138 places de parking et est situé en bordure de voie ferrée, ce qui se prête peu à d’autres usages que le bureau.

Une autre configuration, qui permettrait de rencontrer les besoins en superficie serait de continuer à occuper l’immeuble « Atrium » (construit en 2000) dont la surface nette est de 38.468 m² et offrant 141 places de parkings. Reste également l’option des immeubles de bureaux à front de la rue Bara (construits en 1991) avec plus de 300 places de parking.

Ces alternatives sur deux sites seraient plus respectueuses de la vie des habitants du quartier, du patrimoine, généreraient moins de chantier et de démolition-reconstruction, moins de densité que sur un site unique avec son corollaire de problèmes accrus de mobilité.  Il s’agit de réfléchir au mieux à partir de l’existant sans spéculer sur la valeur future de revente du foncier de la SNCB et préjuger des options prises dans le projet de PAD Midi qui ont fait l’objet de nombreuses critiques fondamentales[3]. Dans l’incertitude de la suite des projets à venir de la zone, construire 30.000 m² supplémentaires de bureaux n’est pas pertinent alors qu’un projet de 56.000 m² de bureaux est déjà prévu par Atenor sur l’îlot Tintin.

Contacts FR :

  • Midi Moins Une ! : Raphaël Rastelli, 0484 94 20 61
  • IEB : Claire Scohier, 0473 66 75 05
  • ARAU : Jean-Michel Bleus, 02/219 33 45
  • CRU : Benayad Abderazzak, 0468 49 90 84

Contact NL :

  • BRAL : Benjamin Dolori, 0471 47 42 72

[1]Lire ici différents avis sur le projet de siège SNCB : https://www.ieb.be/La-SNCB-assiege-le-quartier-Midi-46133

[2] Communiqué du 22 mars 2021 : https://www.ieb.be/Pas-de-barre-dans-le-ciel-du-Midi

[3] Lire différents avis sur le PAD Midi : https://www.midimoinsune.be/2021/11/04/avis-des-associations-relatifs-a-lenquete-publique-du-pad-midi/ A ce jour, la pétition lancée par Midi Moins Une ! a récolté 2655 signatures.

Bonne nouvelle : Aude, Connectrice du projet CitizenDev et le contrat quartier Athénée a fini sa balade sonore à travers Matonge. CitizenDev et le contrat de quartier Athénée à Ixelles continuent à donner des fruits. La créatrice vous souhaite une bonne découverte et écoute sur le terrain, même si vous le connaissez. Vous pouvez télécharger le fichier sur https://d-tournants.com/.

Initialement prévu du 14 au 23 janvier 2022, le Salon de l’Auto est annulé pour la seconde année consécutive. Annulé ? Pas vraiment. Plutôt « déplacé » : chez les concessionnaires, mais aussi, et surtout, sur les plateformes digitales, sur les ondes radio et dans l’espace public. Face à ce matraquage, plusieurs associations (BRAL, Fietsersbond, GRACQ, Greenpeace, Netwerk Duurzame Mobiliteit, IEB, IEW, Tous à Pied et Liège sans pub) réagissent et demandent une interdiction, sinon une régulation de la publicité pour les SUV.

La publicité fonctionne. Son traitement neuro-cognitif a été étudié et ses effets sur les habitudes d’achats du consommateur sont prouvés. Le secteur automobile en sait quelque chose et, chaque année, il promet plus de puissance, de sécurité, de liberté… Il sait en outre adapter son message à l’époque. Cette année, selon certains annonceurs, acheter une voiture irait même jusqu’à faire de son propriétaire un défenseur de la planète et de l’humanité. Rien que ça. Peu importe l’énormité du message : il ne s’agit pas d’informer, mais bien de manipuler pour vendre.

Parmi tous les modèles existants, une catégorie de véhicules continue son irrésistible progression dans les chiffres de vente : les SUVs (Sport Utility Vehicles). Ces voitures surélevées, plus lourdes et massives que leurs consœurs se sont imposées sur nos routes en quelques années à peine. Selon la Febiac, en 2021, « la carrosserie SUV conserve son rang de numéro 1 du marché […] avec plus d’une nouvelle immatriculation sur quatre qui appartient à cette catégorie de véhicules ». Rien d’étonnant d’ailleurs à ce que les constructeurs décident d’encourager les ventes de ces véhicules par des campagnes publicitaires bien rodées : ce sont eux qui leur offrent les plus grandes marges bénéficiaires. Pour les associations prônant les modes actifs et le transfert modal de la voiture vers les transports en commun, ainsi que pour les associations de défense de l’environnement, la prolifération de ces véhicules sur nos routes est alarmante. 

Loin des slogans publicitaires, les SUVs sont en fait plus dangereux. De par leur forme, leur hauteur et leur poids, ils sont plus mortels pour les usagers actifs en cas de collision. De plus, les SUVs induiraient davantage un comportement à risques de la part du conducteur qui se trouve « plus haut et a plus de puissance sous le pied ».

Loin des slogans publicitaires, les SUVs sont également plus polluants. Selon l’agence internationale de l’énergie, les SUVs ont été en 2019 la deuxième cause de l’augmentation mondiale des émissions de dioxyde de carbone au cours de la dernière décennie, éclipsant tous les transports maritimes, l’aviation, l’industrie lourde et même les camions.

À une époque où toutes les grandes villes repensent leur mobilité, et en accord avec des enjeux climatiques, des questions de santé publique liée à la qualité de l’air et de sécurité routière de plus en plus pressants, les associations BRAL, Fietsersbond, GRACQ, Greenpeace, IEB, IEW, Tous à Pied et Liège sans pub demandent que la publicité automobile soit régulée et la publicité pour les SUVs interdite par le législateur. Objectif : offrir à toutes et tous un espace public plus sûr, plus convivial, et plus sain.

Pour cela, ces associations ont regroupé les informations relatives à la promotion des SUVs sur le site https://stoppubsuv.be. Elles y invitent les citoyens à écrire aux ministres fédéraux de la mobilité, de l’environnement, de l’économie et de la protection des consommateurs,  pour demander une législation en faveur de l’intérêt collectif et des enjeux de santé, de sécurité et de bien-être auxquels tout citoyen a droit.

Contact presse :

Pierre Courbe (FR)
+32 496 12 78 45
p.courbe@iew.be

 

Raf Pauly (NL)
+32 487 31 94 20
raf@bral.brussels

Sources images : SNCB, Les visites de mon voisin

La commission de concertation a rendu un avis favorable pour le projet du siège de la SNCB, malgré les inquiétudes exprimées par les habitant·es et les associations. Comme c'est un permis régional, l'avis favorable sous conditions d'Urban est majoritaire et prime sur les avis minoritaires des communes. Anderlecht a remis un avis favorable sous conditions alors que Saint-Gilles a remis un avis défavorable.

Si cet avis vient sans surprises au vu de l'importance de ce permis pour le PAD Midi, tout n'est pas joué quand on lit les conditions posées par la commune d'Anderlecht. Sans oublier que les citoyen·nes derrière Midi moins une! et les associations continuent de s'organiser pour la suite et ne se laisseront certainement pas faire !

Dès que c’est en ligne, l'avis complet de la commission peut être lu ici.