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Pour rappel, 40 ha de Schaerbeek Formation sont encore à vendre. Nous espérons que la Région de Bruxelles-Capitale achètera ce terrain. La question est de savoir ce qui se passera une fois que la Région aura acquis ce terrain. Il ne reste pas grand-chose du remplissage d'origine - une jonction de plusieurs chemins de fer. Quand nous faisions notre grand tour sur le terrain en octobre 2021, nous avions appris que presque toutes les voies ferrées pour ce type de transport viennent tout juste d’être supprimées. Le propriétaire l’a fait pour pouvoir vendre un terrain « prêt à être développé ». Nous trouvions ce fait tout de même étrange pour un site qui veut faire venir des marchandises par train pour ensuite les distribuer dans toute la ville.

Il semble maintenant qu'au moins une bouée de sauvetage restera sur les rails. Il existe un accord pour maintenir la connexion ferroviaire sur l'Avenue de Vilvorde. De cette façon, une partie du site de Schaerbeek-Formation reste reliée par le rail et l'eau. Il s'agit d'un premier maillon important du "développement" industriel de 40 hectares de terrains ferroviaires qui ne sont pas encore exploités.

Si vous pensez spontanément à la friche Josaphat, vous n'êtes pas seul. La bonne nouvelle, c'est que nous avons la chance, à Schaerbeek Formation, de ne pas commettre à nouveau les mêmes erreurs. Entre autres : impliquer les citoyens tardivement dans le processus et ignorer (le potentiel de) la valeur écologique et paysagère du site. Il convient donc avant tout de s'interroger sur le rôle de ce point puissant dans le réseau vert-bleu métropolitain.

Réfléchir au rôle de ce lieu puissant dans le réseau métropolitain vert-bleu est la première priorité.

Développement de la nature

Notre appel : écrivez d'abord votre histoire paysagère et écologique et laissez-y de la place pour les développements économiques souhaités qui évolueront. Nous avons ici une énorme opportunité d'écrire une très belle histoire dont de nombreuses générations seront fières. Si nous savons où nous ne voulons absolument pas construire, nous pouvons garder d'autres parcelles libres pour un éventuel développement. En attendant, la nature peut suivre son cours là aussi. Alors s'il vous plaît, ne détruisez pas tout au bulldozer de temps en temps de peur qu'un oiseau rare y fasse son nid. Vous pouvez en discuter avec les associations de protection de la nature. Le port d'Anvers, par exemple, a conclu un accord de coopération similaire avec Natuurpunt. Un tel accord devrait également être possible ici.

Lors de notre 'Grand Tour Schaerbeek Formation', Bruxelles Environnement a présenté des plans assez ambitieux avec une Senne ouverte et des bras (très) larges qui traversent l'industrie comme des doigts verts-bleus et fonctionnent comme un wadi (collecte d'eau) pour le développement environnant.

Développement industriel

Selon nous, il y a certainement de la place pour un développement logistique/industriel à Schaerbeek Formation. Comme nous sommes favorables à l'utilisation maximale de la logistique par le train et le bateau, nous sommes heureux que la liaison ferroviaire ait été sauvée par cet accord. Pendant longtemps, il a semblé que ce cordon ombilical allait être coupé à cause d'une querelle juridique compliquée. Bruzz l'a bien résumé dans cet article

Il y a un "mais" important. La logistique et l'industrie n'ont de sens pour nous que si elles permettent de désengorger les autoroutes et de sortir de la ville. En bref, l'industrie doit utiliser efficacement l'eau et le rail. Cela va au-delà du site et implique également un plan logistique audacieux.

Pas de boîtes à chaussures s'il vous plaît

Petit trouble-fête : la liaison actuelle n'étant pas entretenue depuis des années, il faudrait poser de nouvelles voies. C'est une autre raison pour les déplacer tous en même temps afin qu'ils n'interfèrent pas avec les développements futurs. Ainsi, une grande partie sera directement accessible par l’Avenue de Vilvorde.

Nous craignons donc qu'une partie du développement industriel consiste en une zone de PME "classique" composée d'entreprises entièrement axées sur le transport routier. Soyons clairs : c'est un NO GO pour le BRAL. Nous ne pouvons pas sacrifier ce site d'avenir à un tel concept du passé.

Conseils complémentaires

Si vous souhaitez en savoir plus sur le site, vous pouvez lire le rapport complet de l'excursion que nous y avons organisée en présence de diverses parties prenantes. Mais nous ne voulons pas vous priver de ces recommandations supplémentaires :

  • Le dossier peut encore évoluer dans une multitude de directions, ne craignez pas d’ouvrir le débat et d’impliquer d’autres associations ainsi que la population bruxelloise. Le site a l’air loin de tout, mais comme le démontrait cette journée, il suscite un intérêt énorme.
  • Ne vous pressez pas de l’assainir : cette opération coûte cher et avant même de vous en rendre compte, vous risquez de développer un terrain pour la seule raison de rentabiliser l’investissement vu qu’il vous aura coûté un bras. Parfois, un simple panneau « Interdiction de manger la terre » suffit, tout en faisant en sorte d’éviter toute pollution des eaux souterraines par exemple.
  • Les travaux de déblai s’annoncent gigantesques. Faites preuve de créativité ! Pourquoi ne pas former de petites collines avec toute cette terre ? Elles peuvent avoir un rôle à jouer en favorisant des microclimats et en atténuant le vent ou le bruit.
  • À la demande d’une des personnes présentes : n’oubliez pas Haren ;) L’idée ambitieuse d’un pont cycliste a un jour été évoquée, même si ce n’est pas une obligation, cette personne précise qu’une structure de ce type serait vraiment utile pour la liaison HarenBruxelles. En tout cas, le site peut remplir une fonction importante en tant qu’axe de mobilité douce. Nord-Sud et Est-Ouest. Mais pour ce faire, il faut envisager la zone au-delà de ses limites. Et donc établir malgré tout un Plan directeur ? Il est préférable de ne pas le faire comme avant. Si vous cherchez de la moutarde, vous la trouverez dans notre mémorandum 2019.

Quoi qu’il en soit, le BRAL attend la suite avec impatience et vous tiendra au courant. Maintenant que la première pièce du puzzle semble être en place - l'accord n'est pas encore juridiquement complet à 100 % - les choses bougent. Il est donc grand temps d'ouvrir le débat !

Photo : Stadsbiografie

En 2022, le BRAL explore la rénovation urbaine et le logement à Bruxelles. Lorsque nous mettons à jour nos connaissances, nous aimons les partager avec vous. Nous traduisions et publions l’entretien du journaliste Steven Vanden Bussche avec Manuel Aalbers, professeur en géographie sociale et économique (KU Leuven).

« Le fait que des promoteurs et des sociétés immobilières mettent des logements supplémentaires sur le marché ne fait généralement pas baisser les prix. Le marché réagit avant tout à la disponibilité de capital. C’est pourquoi la protection des locataires s’impose comme une évidence. Entretien avec le professeur Manuel Aalbers (KU Leuven) au sujet de la financiarisation du marché immobilier et de la nécessité d’une intervention plus musclée des pouvoirs publics en faveur de logements abordables.

Ces dernières années, les logements sont devenus de plus en plus coûteux et, pour nombre d’entre nous, inabordables. Dans le même temps, l’immobilier génère des sommes colossales. Comment allons-nous sortir de ette crise du logement ? Professeur en géographie sociale et économique, Manuel Aalbers (KU Leuven) a bien quelques idées à nous soumettre. Il part d’une analyse peut-être un brin absurde au premier regard : augmenter le nombre de logements n’implique pas nécessairement une baisse des prix. Pourquoi ? « Le marché réagit avant tout à la disponibilité de cpaital. » Dans cette interview détaillée, il nous explique les raisons pour lesquelles nous allons devoir mieux protéger les locataires.

Ces derniers mois, des milliers de personnes ont envahi les rues d’Amsterdam et de Rotterdam pour protester contre l’explosion des loyers sur le marché libre et la pénurie de logements sociaux. « Le logement est un besoin de première nécessité et un droit fondamental », proclame un manifeste signé par des dizaines de groupes d’action et d’organisations de la société civile. Ils et elles appellent les politiques à résoudre la crise du logement.

Berlin connaît des manifestations comparables depuis 2019. L’administration a réagi par un gel des loyers, mais la cour constitutionnelle a retoqué cette loi. Début septembre s’est tenu un référendum au terme duquel plus de la moitié des votants et votantes ont exigé que la ville exproprie les sociétés d’investissement qui possèdent plus de 3000 logements et gère ces derniers sous contrôle public.

Dans les pays voisins, d’importantes sociétés immobilières sont actives sur le marché locatif privé de villes comme Londres, Amsterdam et surtout Berlin, avec une envolée des prix à la clé. Ces protagonistes de poids font aujourd’hui leurs premiers pas à Bruxelles. La Région de Bruxelles-Capitale freine les investissements des groupes financiers dans le logement social et annonce une commission qui aura pour tâche de lutter contre les loyers exorbitants.

Jeu financier

Le documentaire PUSH[1] met en scène une ville dans laquelle les logements deviennent un pion dans un jeu financier. « S’il ne s’agissait que de gentrification, mais cela va beaucoup plus loin », affirme la sociologue et économiste néerlando-américaine Saskia Sassen, qui a dédié toute sa vie ou presque aux conséquences de la mondialisation. Apache a discuté de cette affirmation de madame Sassen avec le professeur de géographie sociale et économique Manuel Aalbers (KU Leuven), qui effectue des recherches dans le monde entier sur la financiarisation de l’économie (et ses conséquences) avec un intérêt particulier pour le logement.

PUSH aborde notamment les pratiques de Blackstone, le plus important gestionnaire d’actifs fonciers au monde, bien qu’il ne soit pas le plus gros bailleur. Ce titre est détenu par Vonovia, une société allemande. Grâce à une récente prise de participation majoritaire dans le géant de l’immobilier Deutsche Wohnen, Vonovia a vu son portefeuille passer de 440.000 à près de 600.000 logements. 

Blackstone et Vonovia ont chacune un business model différent, explique le professeur Aalbers.

Manuel Aalbers : « Pour Blackstone, il faut absolument que les loyers augmentent. Car si les logements se louent plus cher, ils se vendent aussi plus cher. »

« Blackstone ne cantonne pas ses activités aux États-Unis, elle achète des logements aux quatre coins de la planète. Elle procède généralement à des achats en masse et revend avec une plus-value à des acteurs comme Vonovia quelques années plus tard. En fait, Blackstone collectionne des portefeuilles alors que des sociétés comme Vonovia les achètent et les conservent à long terme. Un petit coup d’œil sur la définition de la spéculation, c’est-à-dire acheter à bas prix pour revendre plus cher, montre que ce que fait Blackstone relève de la spéculation pure. »

« Pour Blackstone, il faut absolument que les loyers augmentent. Généralement dans l’idée que si les logements se louent plus cher, ils se vendent aussi plus cher. Vonovia ou Deutsche Wohnen veulent également louer à un montant intéressant, mais leur but n’est pas nécessairement de revendre au prix fort. »

Des sociétés comme Blackstone ne lésinent pas sur les moyens pour négocier des loyers élevés. « La politique que mène Blackstone pour faire du chiffre consiste en partie à rendre la vie impossible à un segment de locataires, par exemple en étant difficilement joignable ou en augmentant le loyer. Pour ce faire, elle n’hésite pas à multiplier les coûts, notamment un pet fee pour les animaux familiers ou un supplément pour une serrure plus solide. Dans le nord-ouest de l’Europe, cette stratégie est un peu difficile à appliquer. Même les grands acteurs allemands s’en abstiennent, mais de tels faits s’observent à Londres et dans le sud de l’Europe. Une mauvaise réglementation en matière de protection des locataires favorise une augmentation plus rapide des loyers. Ce type de sociétés part du principe qu’elles trouveront toujours des personnes disposées à payer plus. »

Manuel Aalbers explique que les grand·e·s bailleur·euse·s connaissent avec précision le rendement de chacun de leurs investissements, si bien qu’ils et elles vont investir de manière très sélective, tandis que des rénovations peuvent aussi constituer une excuse pour se débarrasser des habitantes et habitants. « En anglais, on parle de reno-evictions, c’est-à-dire que des travaux de rénovation sont utilisés comme prétexte pour faire partir un public pauvre afin de louer à des riches. C’est une pratique qui se répand de plus en plus. »

« En Allemagne, la protection des locataires est meilleure, ce qui complique un peu la donne, même si les sociétés allemandes rafraîchissent aussi des appartements grâce à des investissements qu’elles récupèrent ensuite facilement. Elles le font souvent pour bénéficier d’avantages fiscaux et autres ou pour augmenter légalement les loyers sur la base des investissements durables qu’elles ont consentis. »

Il y a beaucoup à dire sur les rénovations au terme desquelles les locataires voient augmenter leur loyer mais diminuer leur facture d’énergie. « Il y a aussi une multitude de logements en Belgique qui ont un score énergétique déplorable. Peut-être n’est-ce pas si grave si de bons investissements y sont réalisés et que l’augmentation du loyer est compensée par une diminution de la facture d’énergie. Mais il faut absolument que l’une et l’autre soient proportionnelles, ce qui n’est pas toujours le cas. Il y a tout simplement des abus. »

Changement de paradigme

Le professeur Aalbers insiste sur le fait que l’idée dominante selon laquelle « des logements supplémentaires feront baisser les prix » se révèle souvent infondée. « Tout simplement parce que le marché réagit avant tout à la disponibilité de l’argent. Prenons l’exemple de l’Irlande et de l’Espagne, ces pays ont connu la plus importante vague de construction avant la crise financière, mais ce sont eux qui ont enregistré la plus forte hausse des prix. Comment l’expliquer ? L’offre dépassait la demande autour de Dublin et de plusieurs villes espagnoles, sans oublier la côte. Mais il y a des sociétés qui sont capables de maintenir des immeubles vides pendant des années. »

« Du point de vue de la technique fiscale, la vacance de biens ne pose pas un énorme problème. Les prix sont avant tout définis par le capital que les personnes souhaitent investir dans ces logements. Et là, nous touchons à la question sous-jacente : à quels bénéfices s’attendre sur le marché immobilier par rapport à d’autres marchés ? Quel est le risque associé à un investissement sur celui-ci ? »

L’idée dominante selon laquelle « des logements supplémentaires feront baisser les prix » se révèle souvent infondée. Tout simplement parce que le marché réagit avant tout à la disponibilité de capital.

« Un petit investisseur peut placer de l’argent dans un fonds d’actions. Mais la pratique n’est pas très répandue chez nous, contrairement aux États-Unis où elle est très courante. Ce type de placements n’est évidemment pas sans risque. Le grand public juge le marché des actions relativement compliqué, tandis qu’une maison, c’est quelque chose de concret, de tangible. C’est un investissement dans l’économie réelle, il est toujours possible de trouver des locataires pour un bien correct. »

« Les gens y voient un investissement sûr, même s’ils surestiment parfois le rendement. Ils font plus attention aux revenus locatifs qu’aux coûts d’entretien et de rénovation d’un logement sur le long terme. Mais même si leur évaluation est bonne, ils en tirent chaque année un bénéfice de quelques pourcents qu’ils ne peuvent généralement pas obtenir avec des actions, encore moins avec un livret d’épargne. Or, investir dans Vonovia s’avère encore plus rentable. Des bénéfices de 4 à 5 % sur une rente locative ne sont pas excessifs dans ce secteur. Si l’alternative, c’est un taux de 0,05 % sur un livret d’épargne, le choix est vite fait pour les personnes qui ont un peu d’argent de côté. »

« Dans les pays occidentaux, et de plus en plus dans les pays à revenu intermédiaire d’autres régions du monde, les possibilités d’investir l’excédent croissant de liquidités dans d’autres produits sont trop peu nombreuses ou mal connues. Ce qui ne s’explique pas uniquement par des taux bas, même si ce facteur pèse toujours très lourd, mais aussi par une économie qui s’est développée de telle manière que l’économie financière dépasse largement en importance l’économie réelle. »

Fonds de pension

Dans l’économie financière, la soif d’opportunités d’investissement n’a pas de limite. Manuel Aalbers a étudié les produits dans lesquels investissent les fonds de pension et les assureurs. Il s’avère qu’il s’agit de l’immobilier (de manière indirecte). La Nederlandse Stichting Pensioenfonds ABP est l’un des principaux fonds de pension à l’échelle mondiale.

« Le pourcentage d’actions investies indirectement dans l’immobilier augmente par rapport au montant total, tandis que le volume d’investissement s’accroît lui aussi chaque année. Nous savons donc que ces chiffres augmentent en termes absolus mais aussi que les montants placés dans des fonds immobiliers gonflent en pourcentages relatifs, ce qui implique qu’il y a une demande énorme pour ce type de placements. Même si cela concerne plutôt l’Amérique du Nord et l’Europe. »

Les apports des fonds de pension dans l’immobilier grandissent toujours plus, en chiffres absolus et relatifs par rapport à leur volume total d’investissement.

Nos fonds de pension injectent aussi une partie de notre argent dans des placements relativement sûrs, dont ils tirent un rendement correct sans prendre trop de risques. « Tout cela semble bel et bon, mais la conséquence indirecte, c’est que les locataires des logements concernés peuvent faire partie des personnes affiliées à ces fonds de pension. Elles doivent donc débourser davantage pour se loger afin de recevoir une meilleure pension. »

« Les travailleuses et travailleurs qui dépendent d’un fonds de pension en savent généralement très peu sur le devenir de leur argent. Ils et elles disposent d’un droit de regard mais qui va oser élever la voix pour refuser un rendement de 4 % sur les montants investis dans des logements ? Et d’autres questions se posent : dans quoi les fonds de pension peuvent-ils investir ? Faut-il leur interdire de financer des groupes cigarettiers, des fabricants d’armes, des producteurs d’énergie fossile ? »

« Une partie du problème vient de l’économie réelle en général : où doit aller tout cet argent ? La crise du logement est souvent associée à un manque de ressources. C’est évidemment le cas pour une partie des locataires ou des personnes qui achètent une maison, mais ce manque d’argent n’est pas nécessairement imputable à des salaires trop bas. Le problème est dû au fait que d’autres parties prenantes en ont trop et qu’elles le placent dans le logement. »

« En Belgique ou en Europe occidentale, le souci n’est pas que la population est trop pauvre mais que les loyers et les prix de vente augmentent plus vite que nos revenus. Et notre pays n’est pas le seul concerné. C’est le cas dans la plupart des zones les plus urbanisées de la planète, sachant que de ce point de vue, l’ensemble du territoire flamand correspond à une zone urbanisée. »

Manuel Aalbers : « En fait, les fonds de pension placent de l’argent dans des fonds indiciels (exchange trading funds) qui investissent à leur tour dans des fonds immobiliers. Ils sont donc très éloignés des logements proprement dits. »

« Avant, les fonds de pension possédaient des logements, ils en étaient les propriétaires et les gestionnaires, ils devaient donc les louer et les entretenir eux-mêmes. Certains avaient leur propre société immobilière et d’autres, une filiale qui se chargeait de tout. Investir son argent dans un fonds de logement diversifié est extrêmement simple. Sauf que de nos jours, les fonds de pension n’investissent plus dans une société comme Vonovia ou Blackstone mais dans un fonds indiciel qui représente de 50 à 100 entreprises du même type dans le monde entier. En fait, ils placent de l’argent dans des fonds indiciels (exchange trading funds) qui investissent à leur tour dans des fonds immobiliers. Il y a donc deux intermédiaires qui les séparent des logements proprement dits. »

« Si nous étudions les quatre principaux acteurs allemands et les dix principaux acteurs américains, nous constatons que les investissements les plus lourds sont le fait des trois plus grands fonds indiciels américains. Ceux-ci investissent non seulement dans l’immobilier, mais aussi dans d’autres secteurs. PUSH évoque un fonds de pension asiatique, mais ce sont principalement leurs homologues européens qui sont actifs sur notre marché. »

Fiscalité

Vonovia et Deutsche Wohnen sont des sociétés immobilières qui investissent exclusivement dans le logement, contrairement à Blackstone. « Une grande partie des logements Vonovia sont loués à bas prix, cette société maximisera les loyers chaque fois qu’elle le pourra. Elle mettra tout en œuvre pour augmenter le loyer des personnes qui habitent à Berlin-Kreuzberg, mais elle possède aussi des logements dans des quartiers pauvres dont elle ne parviendra pas à tirer plus de 400 euros par mois. Il s’agit de logements d’une qualité inférieure, mais il y a une demande de la part de personnes qui exercent des emplois mal rémunérés. »

« Pourtant, là encore, les grandes sociétés peuvent réaliser des bénéfices. Notamment parce que ces sociétés sont tellement organisées sur le plan fiscal qu’elles ne doivent pas payer beaucoup d’impôts. Il faut dire aussi que nombre d’entre elles sont des REIT (real estate investment trusts) qui bénéficient d’avantages fiscaux tout à fait légaux. Ce n’est donc pas comme si elles devaient s’installer dans un paradis fiscal. C’est tout simplement le système. En réalité, elles font de la concurrence déloyale aux particuliers et aux petits investisseurs. Elles échappent à certains impôts que vous et moi devrions par contre payer. »

Ce type de REIT existe aussi en Belgique, sous le nom de SIR (sociétés immobilières réglementées). Ces REIT belges se focalisent sur les immeubles de bureaux, les immeubles commerciaux et les entrepôts, ils délaissent donc quelque peu les logements. Home Invest Belgium est le principal REIT de Belgique avec plus de 1400 logements, principalement à Bruxelles. 

 « À l’origine, le concept a été inventé aux États-Unis dans les années 60, explique Manuel Aalbers. Le grand capital, qu’il vienne du secteur de la finance ou de l’immobilier, a fait du lobbying afin de créer des réglementations pour ce type de fonds. Sous prétexte d’attirer des investissements, ces régimes ont été implémentés dans un grand nombre de pays au fil des ans, y compris dans l’hémisphère sud. Mais dans plusieurs d’entre eux, force est de constater que si la possibilité existe, elle ne se concrétise que des années plus tard. C’est pourquoi je pense que ce lobby s’organise au niveau international plutôt que national. »

Dix-sept REIT belges, réunis au sein du club de lobbyistes BE-REIT, représentent un capital de plus de 13 milliards, soit 5 % du marché des actions en Belgique. Un cadre légal a été institué en 1995 pour leurs précurseurs, les fameux « organismes de placement collectif ».

« C’est un système prévu dans la réglementation qui stipule que ces organismes bénéficient d’avantages légaux à condition de respecter une série d’obligations : ils doivent garantir une transparence totale et investir exclusivement dans des logements. Ce qui implique que de manière générale, il est possible de connaître les avoirs d’un REIT. Généralement, leur portefeuille figure sur leur site internet ou dans leurs rapports annuels, de manière à ce que les investisseurs puissent aussi les trouver. »

« Il ne s’agit donc pas de constructions opaques, ils n’ont rien à voir avec la finance parallèle (shadow banking) ou autre. Il se peut que certains de ces organismes tentent d’obtenir des avantages fiscaux supplémentaires par le biais de paradis fiscaux, mais la majorité n’en a pas besoin, car leurs avantages fiscaux sont régis par la loi. »

Manuel Aalbers : « La majorité des REIT n’a pas besoin des paradis fiscaux, car leurs avantages fiscaux sont régis par la loi. »

Attirer des investissements constitue-t-il l’unique raison des avantages accordés à ces REIT ? « Les femmes et hommes politiques reçoivent des documents qui affirment que les REIT sont bénéfiques pour le marché du logement et jusqu’il y a quelques années, la majorité de la population pensait aussi qu’un afflux d’argent est par définition positif pour ce marché. Les gens partaient du principe qu’il y aurait plus de logements, que des investissements supplémentaires en général sont bons pour l’économie. Sauf que ces sociétés rachètent principalement des logements existants. »

« D’un côté, on pourrait dire que des nouveaux logements chers, c’est toujours mieux que pas de nouveaux logements du tout. Mais les REIT se contentent de racheter des habitations existantes et de changer de locataires. La majeure partie de leurs investissements ne contribue pas à l’élargissement du parc locatif, même s’il y a des exceptions. Par ailleurs, un nombre croissant de REIT nouent des partenariats avec des entreprises de construction et des promoteurs immobiliers parce qu’il devient très compliqué de racheter des logements en masse. La concurrence est trop féroce, et un nombre très élevé de petit·e·s bailleur·euse·s ne souhaitent pas nécessairement vendre. La situation commence donc à changer. »

Manuel Aalbers : « Les REIT se contentent de racheter des habitations existantes et de changer de locataires. La majeure partie des investissements ne contribue pas à l’élargissement du parc locatif. »

Le gouvernement prend des mesures fiscalement intéressantes pour ce type de sociétés, mais il arrive aussi qu’il noue des liens étroits avec elles comme le montre très clairement le modèle AIS-Pro, qui voit la Société fédérale de participation et d’investissement (SFPI) investir dans Inclusio, une société privée qui propose des logements dans le segment inférieur du marché par le biais d’agences immobilières sociales. Dans ce cadre, des promoteurs immobiliers privés bénéficient d’une série d’avantages, notamment un taux de TVA réduit et une garantie locative, avec en contrepartie la simple obligation de louer ces logements pendant 18 ans.

« Il se peut qu’à court terme, les logements se multiplient, mais des modèles de ce type n’offrent qu’une solution temporaire. En effet, ces logements disparaîtront à un moment donné du marché social à moins de mettre à nouveau la main à la poche, alors qu’une habitation construite avec des deniers publics reste dans le public. » Si le gouvernement fédéral considère avec intérêt des participations dans ce type de sociétés, le gouvernement régional bruxellois freine ces initiatives. Sa réticence s’explique par le coût et par les problèmes que pose la gestion de complexes de grande taille.

Les généreuses règles fiscales s’appliquant aux sociétés immobilières contrastent avec la nouvelle fiscalité relative au logement à laquelle sont soumis les particuliers. L’idée dominante, c’est que les acquéreuses et acquéreurs privés ne peuvent pas avoir la priorité sur les locataires, alors que le woonbonus (bonus logement flamand, aujourd’hui supprimé) a bénéficié largement plus aux premiers et premières qu’aux second·e·s. Néanmoins, l’annulation de cet avantage fiscal en Flandre et à Bruxelles n’a pas encore entraîné la disparition de la réduction d’impôt fédérale pour l’achat d’une éventuelle deuxième habitation et des suivantes.

Une plus grande intervention du gouvernement

Manuel Aalbers plaide donc en faveur d’une plus grande intervention du gouvernement dans l’offre de logements abordables. Des allocations logement pour les locataires vulnérables peuvent par exemple leur permettre d’accéder à court terme à un nombre plus élevé d’offres sur le marché privé, même si ce n’est pas sans danger.

« Des aides publiques pour le marché privé reviennent souvent assez cher. Le coût final des agences immobilières sociales dépasse celui de la location de logements sociaux, sans que la qualité soit toujours au rendez-vous. Des études montrent que recourir à ce type d’agences constitue une solution relativement inefficace d’un point de vue purement économique. En fait, pour gagner en efficacité, on pourrait décider de s’en passer. Préférer aider le secteur privé à proposer des logements sociaux au lieu de laisser cette mission au service public, c’est un choix politique. C’est une question idéologique, qui se base sur la conviction que le secteur privé fait mieux alors que des rapports montrent qu’il est de fait moins performant. Du coup, je m’interroge : pourquoi faut-il absolument en passer par là ? Il y a autre chose derrière. »

Manuel Aalbers : « Préférer aider le secteur privé à proposer des logements sociaux au lieu de laisser cette mission au service public, c’est un choix politique. »

Les pouvoirs publics ont pourtant la possibilité d’emprunter de l’argent à des taux très bas, plus bas que celui offert aux grandes entreprises. Il n’y a donc rien là qui puisse les empêcher d’investir dans des logements. « Si Vonovia peut investir dans des logements abordables, pourquoi la commune d’Anvers par exemple ne peut-elle pas le faire ? Les pouvoirs publics ont la possibilité emprunter à des taux historiquement bas. Mais sont-ils encore désireux de le faire ? »

« Certaines villes possèdent également des terrains qu’elles peuvent rentabiliser par le biais de sociétés de développement urbain. Mais de plus en plus, ces pouvoirs publics recherchent des investissements rentables et pas nécessairement les plus intéressants d’un point de vue social. Les petites sociétés actives dans ces communes sont souvent de véritables petits royaumes placés sous le contrôle de partis politiques. Mais au final, ce sont des "sociétés privées de droit public". Il y a pas mal de possibilités, il faut les utiliser ! »

Le monde politique dispose donc d’outils relativement nombreux pour gérer la crise du logement. « Je pense que la protection des locataires s’impose comme une évidence, mais il faut aussi prendre des mesures pour qu’une augmentation de loyer devienne beaucoup plus difficile à appliquer, explique Manuel Aalbers. Et le plus beau, c’est que ces dispositions ne coûtent rien. Il suffit de vouloir les mettre en œuvre, et d’avoir une majorité au niveau régional. C’est vraiment surprenant de voir que les politiques à ce sujet font aussi défaut à Bruxelles et en Wallonie, car de manière générale, elles sont dirigées par des coalitions plus à gauche qu’en Flandre. »

« La question est évidemment de savoir si les pouvoirs publics oseront se heurter ainsi aux propriétaires. Les partis politiques pensent à leur électorat, qui est souvent composé de personnes qui possèdent une deuxième habitation. Le problème vient aussi des grandes sociétés qui font du lobbying et approchent activement certaines familles politiques. »

Manuel Aalbers : « Je pense que la protection des locataires s’impose comme une évidence. »

Bruxelles prépare l’instauration d’une commission paritaire locative[2], avec la possibilité d’imposer des loyers maximums devant les juges de paix. « Je pense que cette démarche peut aider et qu’il s’agit d’un premier pas dans la bonne direction, mais je doute que ce soit suffisant. Bruxelles a tout simplement besoin d’avoir davantage de logements abordables, sans parler des logements sociaux qui sont vides parce que l’argent manque pour les rénover. »

« Il y a aussi des communes qui ne fournissent pas assez ou pas du tout d’efforts pour construire des logements locatifs abordables, alors qu’elles en ont toutes l’obligation (dans le cadre de l’objectif social contraignant). Simplement, elles n’ont aucun retour de bâton à craindre. Elles ont les moyens d’imposer des objectifs, par exemple en dissimulant des revenus d’impôts. En Flandre, les communes font souvent barrage, et elles ne sont pas nécessairement dirigées par des bourgmestres de droite. Je pense qu’il s’agit d’un problème de mentalité. Au niveau régional, les politiques affirment qu’il faut augmenter le nombre de logements sociaux, alors qu’à l’échelon local, les mêmes partis s’y opposent. »

Zelfbewoningsplicht

Quelques villes néerlandaises souhaitent instaurer une réglementation qui interdit à toute personne qui achète un logement à un propriétaire habitant les lieux de le mettre en location pendant quelques années. Dès l’année prochaine, Rotterdam, pour ne citer qu’elle, imposera aux propriétaires l’obligation d’occuper personnellement leur logement (zelfbewoningsplicht) dans certains quartiers. « Cela ne signifie pas qu’il sera interdit d’acheter des logements locatifs existants et de les relouer. Mais qu’il sera interdit d’en retirer un du marché acquisitif et de le mettre sur le marché locatif. Je pense que la mesure peut apporter une aide au niveau local, mais les investisseur·euse·s iront simplement prospecter d’autres endroits, ce qui ne fera que déplacer en partie le problème. »

« De manière générale, il est tout à fait possible d’interdire, mais je ne sais pas si c’est possible d’un point de vue juridique ni si l’interdiction va résoudre le souci. Il me semble en outre qu’il s’agit d’une politique difficile, parce que l’électorat souhaite pouvoir mettre des logements en location. C’est de là que vient une partie du blocage : cette interdiction est-elle voulue par un nombre suffisant de personnes ? Le monde politique peut faire beaucoup, mais il doit le vouloir. »

Ce qui est clair, c’est qu’une seule mesure ne suffit pas, il faut en combiner plusieurs pour s’attaquer à la crise du logement. « Je suis partisan d’une politique multidirectionnelle, indique Manuel Aalbers. Il faut protéger les locataires actuels sur le marché privé, renforcer la location sociale en proposant davantage de logements publics et imposer ce dernier point au niveau des communes. Mais après, il faut aussi tenir compte des formes d’habitat alternatives, notamment les Community Land Trusts (CLT, qui séparent la propriété foncière du bâti), qui sont au cœur de l’attention à l’heure actuelle. »

« En fait, il faut avoir le plus grand nombre possible d’alternatives. En Allemagne, les collectifs de locataires rencontrent un grand succès, car ils permettent aux locataires de créer leur propre agence de location sociale. Ce n’est pas la première chose qu’on attendrait de l’Amérique capitaliste, mais à New York par exemple, les alternatives ont poussé comme des champignons dans les années 70 et 80, entre autres des CLT et toutes sortes d’associations à but non lucratif destinées au logement, notamment des Limited Equity Cooperatives dont les membres sont propriétaires (sans la partie collective du CLT) mais ne peuvent pas réaliser un gain en cas de revente. »

Ces formes d’habitat alternatives doivent surmonter une multitude d’obstacles juridiques et un certain flou en la matière, sans compter qu’elles sont difficiles à mettre sur pied.

Ces formes d’habitat alternatives doivent surmonter une multitude d’obstacles juridiques et un certain flou en la matière, sans compter qu’elles sont difficiles à mettre sur pied et peuvent difficilement concurrencer le savoir-faire des acteurs et actrices privées. « Les pouvoirs publics ont tout intérêt à investir pour proposer un encadrement professionnel à ces personnes. Il y a aussi des banques qui financent volontiers ce type de démarches, notamment Triodos, alors que beaucoup de banques classiques ne s’intéressent pas aux projets collectifs. »

Il n’y a pas assez de réflexion politique au sujet de ces alternatives, conclut Manuel Aalbers. « Soit la personne achète un logement, soit elle doit s’en remettre au marché locatif. Et pour les revenus les plus bas : soit la personne figure sur une liste d’attente pour un logement social, soit elle loue un logement généralement mal entretenu à une ou un particulier. Les personnes ne veulent pas nécessairement être collectivement propriétaires, mais elles sont d’accord de mettre sur pied un projet collectif. Le moment est venu de passer à la vitesse supérieure pour que les alternatives soient elles aussi plus abordables. »

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Steven Vanden Bussche écrit à plein temps pour Apache, un média d'information indépendant néerlandophone. L'interview fait partie de la série "Hoofdstad te huur" d'Apache.

En 2022, le BRAL explore la rénovation urbaine et le logement à Bruxelles. Lorsque nous mettons à jour nos connaissances, nous aimons les partager avec vous. Si vous avez des questions ou des commentaires sur cet article, ou si vous souhaitez partager une bonne idée pour Bruxelles, veuillez contacter Benjamin à l'adresse benjamin[at]bral.brussels.

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[1] PUSH met en scène une ville dans laquelle les logements deviennent un pion dans un jeu financier. Voici un interview avec régisseur Fredrik Gertten et rapporteuse spéciale des Nations unies sur le logement convenable, Leilani Farha.

[2] Ndlr: La secrétaire d'État bruxelloise au logement, Nawal Ben Hamou, a annoncé la création d’une commission paritaire locative et d'une grille de loyers au Parlement bruxellois dans le cadre de son plan d'urgence en décembre 2021. La commission sera formée au second semestre 2022. À partir de décembre, tout nouveau bail devra mentionner le loyer de référence en plus du loyer effectivement demandé par le/la propriétaire. La commission paritaire ne peut émettre un avis qu'à la demande du locataire qui soulève le problème du loyer supérieur au prix de référence. Cependant, le demande du Rassemblement Bruxellois pour le Droit à l'Habitat (RBDH) était que la commission paritaire des loyers peut intervenir directement sur les loyers, quod non. L'organisation, dont le BRAL est membre, demande également une définition plus ambitieuse du loyer excessif, même si elle félicite la Région de reconnaitre pour la première fois qu'il est interdit à un propriétaire de demander un loyer "excessif".

Ces derniers mois ont été marqués par une forte mobilisation autour du droit au logement et le droit à la ville. Le BRAL était à l’appel, car nous aussi militons pour des logements décents et abordables pour une bonne santé. Nous avons déjà fait le compte rendu des quartiers populaires à Bruxelles qui s’organisent. En février, un espace de dialogue sur la ville de demain à Anvers, Stadsform, a invité un panel varié qui a témoigné sur des luttes allant de l’échelle super-locale à l’échelle nationale. La Coalition européenne d’action pour le droit au logement et à la ville s’est réunie à Bruxelles pour quatre journées intenses remplies de workshops, conférences, actions et échanges informels. Et fin mars les activistes et associations flamandes, wallonnes et bruxelloises ont posé les bases pour une collaboration qui veut durer dans le temps lors du Housing Action Day 2022.

Si chaque région, ville, quartier ou espace rural a ses propres spécificités, besoins et revendications, une voix commune ressort en clamant haut et fort : on ne peut plus continuer à (laisser nos co-citoyen·nes) vivre dans des logements inabordables, insalubres et où trop de discriminations à l’entrée persistent.

Le logement pour les gens, pas pour le profit 

La situation dans nos trois Régions est alarmante. Des milliers de ménages wallons restent sans logements suite aux inondations dévastatrices de l’été passé. Le logement social flamand est en pleine restructuration via la fusion des sociétés immobilières sociales, ce qui prend un temps et une énergie conséquente qui pourraient être consacrés à loger les plus démunis. Et à Bruxelles, 51.000 ménages attendent toujours sur la liste de logements sociaux et les loyers explosent dans la région. En moyenne, un locataire sociale attend 10 ans pour obtenir un logement d’une ou deux chambres. « Environ 25 % des ménages bruxellois vivent dans un logement "inadéquat" (avec soit des fuites, soit des problèmes d'humidité et/ou de pourriture) et 26 % vivent dans un logement surpeuplé (51 % des personnes avec un revenu inférieur au seuil de risque de pauvreté). » -  Baromètre social 2020.

Ce constat partagé fût porté par de nombreuses associations et manifestant·es le 27 mars lors du 3ème Housing Action Day belge. Pour la première fois, les forces wallonnes, flamandes et bruxelloises se sont unies pour porter un message au-delà de Bruxelles. Les mobilisations précédentes ont été virtuelles (premier confinement en 2020), immobiles (interdiction que le cortège se déplace en 2021) et se concentraient sur Bruxelles.

Les crises à répétition ont exacerbé la crise structurelle du logement décent et abordable qui touchait déjà les plus vulnérables. Aujourd’hui, ce ne sont plus seulement les locataires précaires qui sont impactés mais c’est l’ensemble de la population qui est touchée par la crise économique liée à la hausse des prix de l’énergie. « Il y a de nombreux Bruxellois qui doivent consacrer une grande partie de leur salaire au logement. La crise du logement commence également à être ressentie par la classe moyenne », a déclaré à Apache Bart Van de Ven, coordinateur de Buurtwinkel Anneessens et membre du BRAL. D'où l'intérêt croissant pour la Journée d'action pour le logement en Belgique.

Cette journée est organisée à l'échelle européenne en concertation avec la Coalition européenne d’action pour le droit au logement et le droit à la ville (EAC). L'année passée, c’était 75 actions dans 68 villes à travers l’Europe. Cette coalition est née à la suite de discussions lors d’un contre-sommet Européen en 2013 lorsque des militant·es se sont inquiété·es du sort réservé à leurs villes pendant le MIPIM. Ce salon de l’immobilier à Cannes, où le billet coute 2.000€, est le haut lieu où s’organise un Monopoly international qui réunit administrations publiques, politiciens, investisseurs et professionnels de l’immobilier. On y organise l’aménagement du territoire et l’avenir des espaces convoités de nos villes et régions, à distance, sur maquettes et sans aucune consultation citoyenne quelconque. Et si le peuple n'est pas consulté et que ses intérêts sont bafoués, alors il s'agitera.

Stadsform : comment squatter la crise ?

Le Woonzaak en Flandre, un référendum victorieux à Berlin, une lutte locale partant du Tweebosbuurt à Rotterdam qui deviendra nationale, deux lieux hautement symboliques à Gand qui sont squattés. Autant de lieux que de stratégies ont été partagées lors d’une soirée organisée à Anvers autour du logement. Comment faire face à la pression immobilière qui vient autant des opérateurs publics que des promoteurs privés ? De quelles manières pouvons-nous nous renforcer mutuellement et lutter pour le droit au logement ?

Petit état des lieux de différentes situations chez nos voisins :

Le Woonzaak porte plainte au Conseil de l’Europe

La part de locataires en Flandre en diamétralement opposée à celle de Bruxelles avec environ 20% de locataires privés et 6% de locataires sociaux. Si cette proportion est faible, le modèle de logement flamand ne protège pas les plus démuni·es et ne leur garantit pas un logement adapté et abordable de bonne qualité avec une sécurité d’y rester suffisante.

Le Woonzaak est une initiative qui porte plainte contre le gouvernement flamand au Conseil de l’Europe (plus spécifiquement le Comité européen de la protection sociale) pour l’absence d’une politique sociale de logement. Cette inaction mène à un droit au logement souvent bafoué et mis sous pression des trois manières suivantes :

  1. Les propriétaires précaires ne sont pas en mesure d’améliorer la qualité de leurs propres logements ;
  2. Les 6% de logements sociaux en Flandres sont largement en dessous des moyennes européennes (mais en phase avec la moyenne régionale bruxelloise de 7,22%) ;
  3. Il n’y a pas de politique régissant le marché privé.

Cette combinaison de facteurs oblige les publics à faibles revenus à se tourner vers le marché privé. Lui qui n’est pas connu pour être accessible, abordable ou offrant une sécurité suffisante. Le Woonzaak revendique le respect du droit au logement, lui qui est inscrit dans la constitution, dans son ensemble et dans ses particularités.

  1. Oui à un marché privé durable sans propriétaires précaires
  2. Oui à une politique active du gouvernement sur le marché privé, autant pour les locataires que les bailleurs, garantissant un lien entre prix et qualité
  3. Oui au doublement de l’offre de logements sociaux et à une politique d’attribution transparente

L’initiative est portée par 45 organisations sociales néerlandophones et récemment aussi un certain nombre de municipalités. Outre leur livre, ils organisent également des actions de rue locales pour attirer l'attention sur le logement abordable et de qualité.

Berlin, lieu d’espoir avec une réalité partagée

270.000 manifestant·es pendant un Friday for future en 2019. 359.000 signatures pour le lancement d’un referendum sur le logement en 2021. S’il y a bien une ville capable de se mobiliser massivement sur des questions sociétales, c’est Berlin. Toha nous avait prévenue en 2018 suite à sa visite à Berlin, 86% de locataires et un doublement (ou même triplement, dans certains quartiers) en dix ans du prix au m² du marché locatif font de cette ville un terreau fertile pour faire valoir le droit au logement et à la ville.

Cette mobilisation tire une partie de ses racines en 2004 quand la ville-Etat de Berlin vend 65.000 logements à un fond d’investissement. Plusieurs années et opérations financières plus tard, les grandes sociétés immobilières possèdent plus de 240.000 logements – soit plus de 12% du parc locatif. Cette abus de position dominante a motivé des militant·es locaux à lancer une campagne portant le nom Deutsche Wohnen & Co Enteignen (Exproprier Deutsche Wohnen & Co) qui vise à corriger cette privatisation massive de 2004. Ils insistent sur le choix des mots : exproprier n’est pas racheter car l’objectif n’est pas de compenser les acteurs immobiliers à la valeur de marché des biens qu’ils détiennent. 

Suite à deux pétitions, la première pour initier le référendum avec 77.000 signatures et la deuxième avec ces fameuses 359.000 sympathisant·es pour le lancer officiellement la proposition d’exproprier les propriétaires détenant plus de 3.000 unités de logements à Berlin a été soumise au vote. Ce referendum faisait parties des cases à cocher lors des élections de septembre 2021 et plus d’un million de personnes ont voté OUI !, soit 59,1% des votants.

Si ce résultat est inspirant et a donné un souffle positif au monde du logement, la réalité n’est pas aussi rose. La nouvelle majorité est plus conservatrice et ne cautionne pas le résultat du référendum. À priori, l’expropriation n’est pas prévue pour demain et le gouvernement met des bâtons dans les roues d’une éventuelle proposition de loi. Cette impasse parlementaire parait frustrante mais les militant·es berlinois·es sont sans équivoque : plus d’un million de personnes sont d’accord avec leurs propositions. L’énergie était débordante et inspirante. Mais ce n’est toujours pas assez pour vraiment mettre la pression au système bien installé. La lutte continue …

Woonopstand en de Tweebosbuurt

L'exemple du Tweebosbuurt dans le Afrikaanderwijk à Rotterdam est inspirant : une mobilisation ultra locale à l’échelle du quartier s’est transformée en une lutte nationale. Avec une mention spéciale accordée par les Nations Unies !

Comme souvent, une société immobilière débarque dans un quartier avec une volonté claire. 535 logements sociaux seront démolis et remplacés par 374 logements, dont seulement 130 sont sociaux. La ville soutient les plans du géant Vestia. Selon elle, il y a trop de logements sociaux dans ce quartier historiquement populaire et c’est une manière efficace d’augmenter le niveau socio-économique de Rotterdam.

Le sort réservé au Tweebosbuurt n’était pas un cas isolé. Plusieurs quartiers étaient visés par des politiques de rénovation urbaine poussés par une coopération entre le public et le privé. Ensemble, des artistes, des académiques, des citoyen·nes, des travailleurs concernés se sont mobilisés pour faire entendre leur voix et contester la transformation voulue.

La pertinence de la mobilisation était telle que petites et grandes villes se sont jointes au mouvement. Des quartiers d’Amsterdam, Utrecht, Amersfoort, Delft ou encore Eindhoven étaient voués au même sort. Les pauvres dehors !

Le Woonopstand est né de cette alliance nationale visant à maintenir les habitant·es dans les quartiers où ils et elles ont grandi. Cette organisation grassroots est soutenue par plus de 184 associations et s’est rassemblée tous les samedis pour une action visant à mettre la pression pour le maintien du logement social locatif et faire respecter le droit au logement. Parti d’une initiative entre voisins inquiets pour leur avenir, le mouvement a eu un succès retentissant. 15.000 personnes ont manifesté à Amsterdam en septembre 2021. 10.000 à Rotterdam. Mustapha, notre intervenant local, nous a expliqué que c’était la première fois depuis les années 80 que les Pays-Bas (où 40% de la population est locataire) voyaient une telle mobilisation autour du logement. Celles-ci se sont malheureusement accompagnées de violences policières et le Woonopstand a demandé une enquête indépendante sur la violence disproportionnée.

L'impact de la mobilisation citoyenne a été telle que Leilani Farha, Rapporteuse spéciale aux Nations Unies pour le droit au logement (que vous avez peut-être vue dans le film Push), et quatre autres Rapporteurs ont envoyé une lettre au gouvernement hollandais. Ces expert·es ont pointé du doigt l’évidente transgression au droit au logement de leurs politiques dans le Tweebosbuurt. C’était la première fois qu’une ville et une société immobilière ont été ciblés par les Nations Unies directement.

Bernadette Blijft

Le Sint-Bernadettewijk à Gand est un des premiers quartiers de logements sociaux en Belgique, datant des années 1920. Il se vide petit à petit car les conditions de vie y sont extrêmement insalubres. Moisissures, risque d’incendie ou d’électrocution, structure du toit instable. La ville de Gand et WoninGent, la société de logement sociaux propriétaires du quartier, comptent désormais démolir l’entièreté du quartier pour y reconstruire du logement à finalité sociale car la rénovation est trop couteuse. Un gout de déjà vu ? Il y a de quoi comparer avec la situation de la Rue du Rempart des Moines.

Simon, membre du groupe d’action Bernadette Blijft, a pourtant essayé de faire entendre la voix des habitant·es auprès des politiques et de WoninGent. Si le quartier a toujours eu une mauvaise image pour ceux qui le connaissaient mal, les activistes eux ont découvert des personnes ayant habité là toute leur vie qui en parlaient avec charme. Bernadette Blijft occupait temporairement des lieux pour s'implanter dans le quartier, créer du lien avec les habitant·es, rassembler leurs revendications et interpeller le conseil communal. Malheureusement, le quartier s’est vidé au fil du temps et de l’inaction publique.

Blok per blok. Voilà la revendication finale de Bernadette Blijft. Si vous démolissez le quartier, faites-le au moins bloc par bloc pour permettre à ceux qui souhaitent y rester de pouvoir le faire. Impossible, selon l'échevine du logement car l’opération serait trop couteuse. On se croirait vraiment aux cinq blocs ! Le permis pour démolir a été délivré pendant l’été 2021 et les habitants seront relogés ailleurs à Gand.

Pandemisten

Le Caermersklooster de Gand est un lieu qui a historiquement été sous tension. Il a été squatté dès les années 80 pour contrer un projet de revente à un investisseur privé pour y réaliser un hôtel. Le bâtiment est resté dans les mains du public suite à une mobilisation réussie mais la lutte a repris de plus belle en 2021. WoninGent, propriétaire du lieu, a mentionné une possibilité de revente au privé. Comme le prix de rénovation est élevé, l’opérateur public se tourne vers des investisseurs. Rebelote : le couvent est squatté en mai et décembre 2021 par les Pandemisten pour exprimer leur mécontentement face à ce risque d’une opération financière juteuse.

En s’inspirant des actions du Sint-Bernadettewijk, des habitant·es et des squatteurs·euses ont organisé des manifestations, des activités avec des citoyen·nes, des débats dans le couvent et des interpellations au conseil communal. Alors que la ville se cache derrière son inhabilité d’intervenir dans le dossier car elle n’est pas propriétaire du couvent, les militant·es rétorquent que c’est une excuse infondée. La ville de Gand est en effet actionnaire à 90% de WoninGent.

Les actions des Pandémistes ont porté des fruits : le 24 février, la ville de Gand a organisé un « débat urbain » sur l'avenir du monastère, en concertation avec les différents acteurs du dossier. Le rapport de ce débat est accessible au public. Les Pandémistes regrettaient que les questions structurelles sur la politique générale de Gand soient évitées. « Bien que nous puissions tous être reconnaissants que la reconquête des cœurs pandémonistes gantois ne se soit pas faite avec un débat typique sur la ‘couleur des pots de fleurs’. »

Après ce tour d'horizon des événements, il est temps de tirer quelques conclusions. Nous nous concentrons sur deux points : le squat et la rénovation.

Le squat comme arme face à la crise du logement

La vacance immobilière est une des causes contribuant à la crise de logement abordable que nous vivons actuellement. Pourquoi les propriétaires laissent-ils leurs bâtiments vides ? Pour certains, c’est une impossibilité de rénover par faute de moyens. Souvent, le bâtiment est un placement financier qui permet d’immobiliser du capital avec très peu de risque. Le bâti est une valeur refuge qui offre un taux largement plus intéressant que l’épargne. Dans une logique marchande, un investisseur sait que le prix de l’immobilier ne fait en général qu’augmenter et il peut donc se faire d’importants profits en peu de temps. 

Si le squat n’est pas une solution à long-terme pour sortir de la crise du logement, il permet de maintenir une certaine pression sur des bâtiments laissés vides. C'est une manière peu couteuse et efficace pour mettre la pression sur les propriétaires que le gouvernement a muselé depuis la loi anti-squat de 2017, qui a compliqué l’occupation illégale de bâtiments. C'est un outil plus facile à appliquer qu’une taxe sur la vacance immobilière, qui tarde à se faire respecter.

Comme l’ont montré les deux exemples à Gand ou de nombreuses autres occupations à Bruxelles, le squat est un moyen direct de lutter contre le vide et la spéculation immobilière. Il permet de créer des liens entre citoyen·nes de différents milieux qui s’unissent autour d’intérêts partagés pour la ville et font preuve d’une solidarité exceptionnelle entre elles et eux. 

La rénovation ? Oui, et pour ceux qui y habitent déjà !

La Rue du Rempart des Moines, le Sint-Bernadettewijk et le Caermersklooster illustrent ce qu’il advient d’une absence de plusieurs années de politique sociale et écologique de logement. L’inaction et la négligence repoussent toujours la rénovation et au final explose le budget. On se retrouve alors dans des situations compliquées : le lieu est insalubre et ne permet plus d’y habiter correctement et le public ne dispose pas – ou n’a pas prévu de disposer – des budgets requis pour rénover petit à petit pour permettre aux habitant·es de ne pas être déplacés. Du coup, soit on démolit et on reconstruit, soit on revend à un privé.

Dans les deux cas, la collectivité est perdante car les bilans environnementaux (émissions CO2) et sociaux (réduction du nombre de logements sociaux ou relogement des habitant·es loin de leurs racines) sont négatifs.

Une politique volontariste de rénovation du bâti est évidemment souhaitable pour des raisons écologiques et d’habitabilité évidentes. Il faut cependant être vigilant de l’accompagner d’un contrôle sur les rénovations abusives. Lors des échanges chez Stadsform et avec les militant·es européen·nes, plusieurs collectifs évoquaient les renovictions, ou la rénovation entrainant à une expropriation de fait car elle est suivie d’une hausse des loyers. C’est une technique bien connue du fonds d’investissement Blackstone, qui gère un portefeuille immobilier de plus de 430€ milliards.

Continuons à nous mobiliser !

Le mouvement pour le droit à la ville et le droit au logement prend de l’ampleur à toutes les échelles. Des luttes inspirantes voient le jour partout car nous avons de plus en plus de mal à se loger à prix décent, quelle que soit la politique de logement mise en place. C'est à travers une multiplication des formes d’activisme et de collaboration entre citoyen·nes de tous bords qu’on arrivera à mobiliser les politiques autour de la crise du logement abordable et décent.

Toutes les pistes n'ont évidemment pas été abordées ici mais nous voyons d’autres exemples comme le développement des Community Land Trust à Bruxelles et, on l’espère, l’inclusion de certaines clauses minima de logements sociaux dans les Plans d’Aménagement Directeurs. Encore faut-il que ce soit du vrai logement social locatif et non acquisitif, lui qui retarde juste l’entrée du bien sur le marché privé.

Au final, comme l’a très justement dit Mustapha du Tweebosbuurt, « levez-vous, unissez-vous, mobilisez les autres et vous verrez que vous pourrez atteindre des choses ».

Avez-vous des questions, des remarques ou des suggestions par rapport à cet article ? Ou avez-vous une idée sur un Bralcafé ou un autre événement autour du logement ? Contactez benjamin[at]bral.brussels !

Benjamin Delori

Maintenant que les résultats de CurieuzenAir sont connus, il est temps de prendre le pouls. La prime BruxselAir, la LEZ, la zone 30, ... Le gouvernement fait déjà beaucoup pour améliorer la qualité de l'air à Bruxelles, certainement en comparaison avec les années du tout-à-la-voiture. Mais que peut-elle faire de plus ? Qu'est-ce qui pourrait être amélioré ?

Débattez avec les ministres Alain Maron et Elke Van den Brandt le 23 mai à 20h au KVS à Bruxelles. En collaboration avec BRUZZ et UAntwerpen. Avec Client Earth, le BRAL et Filter Café Filtré.

Vous pouvez vous inscrire ici !

CurieuzenAir est une initiative de l'Université d'Anvers, du mouvement urbain BRAL et de l'Université Libre de Bruxelles, en étroite collaboration avec Bloomberg Philanthropies, Leefmilieu Brussel, De Standaard, Le Soir, BRUZZ et DPD.

Le BRAL soutient l’analyse de Brussels Studies Institute (BSI) sur le projet Métro Nord.

Le gain environnemental escompté se révèle négligeable et l’amélioration attendue de la mobilité peu satisfaisante. Les priorités ont changé (télétravail, crise énergétique…). Or, ce projet constitue une menace grave pour les finances régionales et, donc pour les autres politiques que la Région doit mener.

Est-il encore temps d’arrêter le projet Métro Nord ? Pour les auteurs de ce BSI Position Paper, l’enquête publique pour le creusement d’un nouveau tunnel nous en offre l’occasion.

Nous espérons que les décideurs prendront ces arguments en compte.

Picnic the Streets dix ans plus tard

En juin 2012, un pique-nique géant a eu lieu, sans autorisation, sur la place de la Bourse. Il a conduit à un changement profond et irréversible du centre de notre ville. Dix ans plus tard, vous êtes invités à célébrer cette fantastique victoire de la société civile en pique-niquant au même endroit le dimanche 12 juin à partir de 12h30.

Avant cela, le dimanche 12 juin de 10h à 12h, nous serons accueillis au Cinéma-Palace (Boulevard Anspach 85) pour réfléchir ensemble à ce qui a précédé le mouvement Picnic the Streets et à ce qui l'a suivi jusqu'à la situation présente, aux projets actuels concernant les abords du piétonnier et à la manière dont, ici et ailleurs, des mouvements bottom-up peuvent contribuer à la reconquête de nos espaces publics.

Programme de la rencontre du 12 juin 2012 (en français et néerlandais) (en annexe)

Voorlopig programma/ Programme provisoire  

Gerben VAN DEN ABBEELE (core group Picnic the Streets): From Streetsharing to Picnic the Streets

Joost VANDENBROELE (core group Picnic the Streets): 10 June 2012 and the reminder picnics

Fatima ZIBOUH (W100) : Le piétonnier comme espace d’inclusion radicale

Paul LIEVEVROUW (director SUM-Project): From the first plans to the real thing

Henri SIMONS (échevin de l’urbanisme Bxl 1995-2006): Pourquoi pas plus tôt?

Sofie VERMEULEN (Brussels Centre Observatory): The piétonnier’s main challenges 

Bart DHONDT/ An DESCHEEMAEKER (schepen & chef cab mobiliteit Bxl): the new mobility plan 

Nel VANDEVANNET (director Beurs-Bourse project): public & private plans for the Beurspalais 

Sven LENAERTS (head CSR Immobel) : private plans for the piétonnier

Teresa EPALZA (Coordinator Heroes for Zero Molenbeek): Picnic the Bridge 

Moderation: Nel VANDEVANNET & Philippe VAN PARIJS

Slotwoord: Arnaud Pinxteren, échevin de la participation

Chronologie de Picnic the Streets

Il y a dix ans, ils furent des milliers à pique-niquer ici, sans autorisation, pour une mobilité durable et une immobilité agréable, et pour une reconquête irréversible de notre espace public.

1. Antécédents

25 juin 1971: Le magazine anglophone bruxellois The Bulletin organise un pique-nique sur la Grand-Place pour obtenir qu’elle soit libérée des voitures. Le stationnement y est interdit en mars 1972, et toute circulation à partir de janvier 1991.

Septembre 2000 : NoMo-Autrement Mobile, une ASBL constituée d’habitants et d’universitaires élabore un plan d'ensemble pour un Pentagone avec 50% de voitures en moins,  y-compris une piétonisation des boulevards centraux.    

22 septembre 2000 – 27 septembre 2003: Le collectif « Street Sharing » soutient le plan de NoMo et se mobilise une fois par an Place de la Bourse.

2003 : Beliris, l’instance fédérale chargée de financer les fonctions de Bruxelles comme capitale, commande une étude sur le réaménagement des boulevards centraux incluant une réduction de la circulation automobile de 4 à 2 bandes, et accorde un budget. Sans effet.

2004 : Le Conseil communal de la Ville de Bruxelles approuve un projet de réaménagement des boulevards du centre, qui n’est finalement pas exécuté.

2. Picnic the Streets

24 mai 2012: Une carte blanche publiée sous le titre “Picnic the Streets” dans Le Soir, Brussel deze Week et The Bulletin appelle à la désobéissance civile sous la forme d’un pique-nique sur la place de la Bourse chaque dimanche de l’été.

10 juin 2012: De deux à trois mille personnes participent à un pique-nique géant sur la Place de la Bourse suite l’appel diffusé principalement via FaceBook.

16 juin 2012 : Le bourgmestre Freddy Thielemans autorise les piques-niques sur la Place de la Bourse chaque dimanche midi en juillet et août.

Juillet 2012 – juin 2015: Succession de pique-niques de rappel organisés à la Place de la Bourse par « Picnic the Streets ».

3. De la décision à la réalisation

14 octobre 2012 : Elections communales. Plusieurs partis promettent une piétonisation plus ou moins importante des boulevards centraux.

4 décembre 2012 : L’accord de majorité du nouveau collège des Bourgmestre et Echevins prévoit une piétonisation des places de la Bourse, de Brouckère et Fontainas et d’un petit tronçon du boulevard Anspach.

31 janvier 2014 : Présentation par le bourgmestre Yvan Mayeur du projet « Un nouveau cœur pour Bruxelles » comprenant la piétonisation presque intégrale du boulevard Anspach entre la Place de Brouckère et la place Fontainas.

29 juin 2015 : Début de la phase test du nouveau plan de circulation: le boulevard Anspach est piétonnisé à l’essai entre les Places de Brouckère et Fontainas et pourvu de mobilier provisoire dans l’espace public.

Octobre 2015 : La commission de concertation accorde le permis d’urbanisme au projet de piétonisation introduit par la Ville de Bruxelles.

Novembre 2015 :  Suite aux attentats terroristes de Paris, un couvre-feu est imposé au centre de Bruxelles, avec un impact majeur sur la vitalité du piétonnier.

Février 2016 : Fin de la phase test du plan de mobilité, jugée concluante par la Ville.

22 mars 2016 : Attentats de Bruxelles : les Bruxellois endeuillés se rassemblent en masse devant la Bourse.

Septembre 2016 : Début des travaux d’aménagement du piétonnier, principalement financés par Beliris.

Février 2019 : Inauguration de la station de prémétro Bourse-Grand-Place.

Juillet 2021 : Achèvement des travaux d’aménagement du piétonnier.

Nous nous réjouissons de continuer à travailler ensemble pour un avenir vivable et durable !

Nous nous sommes lancés dans une aventure durable à Neder-Over-Heembeek, à Bruxelles, l'une des villes où vous êtes le bienvenu pour "Dichtblije reizen", une campagne menée par Bond Beter Leefmilieu pour encourager les gens à laisser l'avion voyager plus près de chez vous pendant les vacances d'été.

Un anniversaire est aussi l'occasion de regarder par-dessus le mur. Par exemple, nous avons trouvé cet article intéressant sur le site de l'IEW qui donne 8 balises aux citoyen.nes pour analyser les projets de développement urbain pour leur fonction dans l'espace public.

Le Housing Action Day, c'est un appel européen à agir pour le droit au logement ! Le 27 mars 2022, nous étions près de 1 000 personnes à descendre dans les rues de Bruxelles pour réclamer des logements dignes et abordables et ce, dès maintenant ! L'année prochaine, nous voulons être encore plus nombreux·ses.

Comment s'organise-t-on pour faire monter la pression jusqu'à la prochaine édition du Housing Action Day le 26 mars 2023 ? Comment faire grandir le mouvement pour le droit au logement en Belgique ? Que faut-il mettre en place pour faire du Housing Action Day une journée de lutte explosive qui mobilise les habitant·es, les associations, les collectifs et les militant·es et qui rappelle les politiques à leurs responsabilités ?



Le vendredi 24 juin 2022, nous nous rassemblons pour se poser ces différentes questions et y trouver des réponses collectives pour aller de l'avant ! Plusieurs thématiques seront abordées tout au long de l'après-midi. L'assemblée sera suivie par la conférence gesticulée de Sarah De Laet intitulée « J’habite, tu habites, ils spéculent... » La soirée se poursuivra par un repas à prix libre, le tout suivi d'une fête.

Tenez la page de notre site à l'œil pour plus d'infos à suivre ! Vous pourrez également y découvrir quelles associations et collectifs font partie de la coalition. N'hésitez pas à inviter à cette réunion celles et ceux qui n'en font pas encore partie afin qu'ils et elles puissent participer à la planification des futures actions. 

JE M'INSCRIS

Programme

13h30 - 17h00: Assemblée

18h00: Conferentie "J’habite, tu habites, ils spéculent..."

20h00: Repas à prix libre

21h00: Fête

Comment se rendre à Naast Monique?

Adresse: 230 Quai de l'Industrie - 1070 Anderlecht

Le portail est après l’angle avec la rue du Collecteur.

Vous reconnaîtrez l'entrée grâce au panneau "Naast Monique".

Tram 81 & bus 46: arrêt "Albert I" - Métro 2 en 6: arrêt "Aumale" of "Delacroix"

Accessibilité

Le rez-de-chaussée est accessible PMR, ainsi que les toilettes.

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A la Porte de Flandre, frontière entre Bruxelles et Molenbeek, le trafic automobile règne en maître comme jamais auparavant. Gros point noir avec une énorme pression automobile, de l'agressivité au volant, une qualité de l'air médiocre, de la pollution sonore et d'autres problèmes. Des résidents, commerçants, associations de quartier et mouvements de citoyens tirent tous la sonnette d'alarme.

Petit à petit, Bruxelles revit. La Voiture Reine fait lentement place aux piétons et aux cyclistes, aux personnes âgées assises sur des bancs et aux enfants jouant dans les rues. Ces changements nous enchantent mais Bruxelles compte encore trop de points noirs. Ce sont des endroits dans la ville où nous constatons, depuis des années, que l'insécurité routière est élevée et qui attendent, depuis des années également, une <intervention profonde. Récemment, l'enquête citoyenne CurieuzenAir a montré que c'est précisément autour de ces points noirs que la qualité de l'air est inacceptable.

La Porte de Flandre, frontière entre Bruxelles et Molenbeek, est l'un de ces points noirs. La qualité de l'air y est parmi les pires de Bruxelles. La petite ceinture, la rue Dansaert et la chaussée de Gand y déversent un flot de voitures continu. Les bus font la file entre les voitures. Les piétons et les cyclistes sont amassés sur des trottoirs et passages cloutés bien trop étroits. Ils bravent le flux de la circulation au péril de leur vie. Les trams frôlent les écoliers qui traversent.

Aux points noirs s'ajoute une problématique sociale. Cette pression automobile particulièrement élevée se situe justement dans des quartiers où plus de la moitié des habitants ne possèdent pas de voiture. La zone du canal est également une zone résidentielle à forte densité, avec une population jeune vivant dans des logements souvent exigus. Cette forte densité de population engendre un besoin important en espaces publics verts, alors qu'au contraire les rues sont dominées par les voitures et l'asphalte. Les nuisances sonores y sont en conséquence élevées. Et le manque affligeant d'arbres et de plantes provoque du stress et des températures extrêmes en été.

Au milieu de cette circulation intense, on en oublierait presque que la Porte de Flandre est un nœud vivant de commerce, de divertissement, de culture et d’écoles. Autour du pont, les mondes de Bruxelles et de Molenbeek fusionnent à merveille. Des centaines d'élèves vont à l'école à proximité immédiate du pont. La dynamique de la chaussée de Gand et du quartier Dansaert dépasse de loin l'échelle du quartier. De nombreuses initiatives, déjà existantes et nouvelles, autour du canal attirent des personnes de tout horizon. Il est clair que c'est un quartier vivant.

L'utilisation de la Porte de Flandre comme caniveau à voitures est d'autant plus remarquable à la lumière de l’ambition des futurs plans pour la zone du canal. Après des années d'abandon, les anciens quartiers industriels situés le long du canal sont dans le collimateur de développeurs immobiliers et de spéculateurs. De grands projets de construction avec des parkings souterrains sont dans les cartons. Faut-il vraiment attendre que la gentrification fasse son œuvre pour investir dans un espace public de qualité pour tous ? La population jeune et super-diverse de la zone du canal n'a-t-elle pas droit à un partage équitable de l’espace public ?

Enfin, dans le cadre du plan de mobilité régional GoodMove, aucun changement n’est prévu pour la Porte de Flandre. Il est plus que nécessaire de regarder la petite ceinture autrement, de la gare du Midi jusqu'à Sainctelette : non plus comme un déversoir de trafic de transit mais comme un boulevard urbain à la mesure des quartiers populaires avoisinants. Parallèlement, les chaussées pourraient être réorganisées en rues résidentielles et commerçantes apaisées. Le succès de la - beaucoup trop étroite - voie piétonne et cyclable du côté de Molenbeek montre que les deux côtés du canal doivent être pensés conjointement.

"Une touche de désobéissance civile est plus que justifiée en réponse à cette léthargie irresponsable", écrivait Philippe Van Parijs en 2012. Ainsi il donna le coup d'envoi de "Picnic The Streets", une série de pique-niques qui ont bloqué la circulation motorisée sur le boulevard Anspach. Le message de l'époque était clair : si les politiciens ne prennent pas la mesure des problèmes métropolitains, les citoyens doivent passer à l’action. Le reste appartient à l'histoire. Une artère de circulation surchargée a été transformée en une zone piétonne au moins aussi vivante et colorée que la digue de Blankenberge.

Actuellement, la Porte de Flandre est le symbole grandeur nature de l'insupportable lenteur de la politique bruxelloise. La commémoration du premier pique-nique sur la place de la Bourse, il y a exactement 10 ans, est le coup d'envoi approprié d'une nouvelle saison de désobéissance joyeuse. Aujourd'hui, il n'y a plus d'excuse pour le manque total de vision et la réticence à agir. Avec un pique-nique sur le pont de la Porte de Flandre, nous transformons le chaos quotidien de la circulation en un rassemblement festif. En 2022, l'ère de la Voiture Reine est terminée.

Sortez votre nappe de pique-nique du placard.

Picnic The Bridge, dimanche 12 juin, 14h à la Porte de Flandre

Avec ses 900 mètres de long et ses 28 mètres de large de façade à façade, le Piétonnier de Bruxelles-Ville offre suffisamment d'espace pour que chacun puisse s'exprimer respectueusement sur le réaménagement et, dix ans après le premier pique-nique, se féliciter pour le travail accompli. De l'usager au visiteur, du pique-niqueur actif et du citoyen au secrétaire d'État à l'urbanisme, tous et toutes sont les bienvenus au deuxième plus grand Piétonnier d'Europe.

Il y a beaucoup de place pour les partisans, les opposants enragés, les désillusionnés et les souvenirs des beaux moments de la longue lutte d'il y a dix ans. Nous ne sommes pas tous obligés d'être d'accord sur comment, avec qui et par qui cela est arrivé, comment nous le vivons aujourd'hui, comment nous pouvons changer et améliorer cette zone piétonne et ses quartiers environnants à l'avenir. Il y a beaucoup de place pour toutes ces pensées, opinions et réflexions sur ce nouvel espace public de 25.200 m² au cœur de l'Europe.

Un endroit où nous pouvons faire toutes sortes de choses dans la ville qui étaient auparavant impensables. Un endroit pour expérimenter, pour étudier comment nous allons gérer cela dans les années à venir. C'est aussi un lieu où le débat sur la ville dans tous ses aspects doit rester possible, sur la politique, l'art, la pauvreté, le logement abordable, l'adaptation au climat, etc. Les discussions qui avaient lieu dans les cafés et qui étaient souvent réglées dans les arrière-salles politiques peuvent et doivent également avoir lieu sur cette nouvelle agora urbaine.

La révolution du centre-ville mérite de la nuance

Bruzz m'a contacté il y a deux semaines pour une réaction sur les 10 ans de Picnic the Streets et une courte évaluation du Piétonnier. Lorsque le journaliste m'a demandé quels étaient les éléments positifs et négatifs du réaménagement, j'ai été assez perturbé et j'ai demandé à ce qu'on me rappelle une heure plus tard, afin que je puisse y réfléchir. Je n'avais pas envie de faire des déclarations audacieuses, car je voulais présenter une histoire nuancée. Ce n'est pas devenu une interview de questions et de réponses, de déclarations, mais une longue conversation, avec beaucoup de nuances. C'est aussi ce que mérite cette révolution du centre-ville. [Vous pouvez lire les résultats de cette conversation ici].

Ce dont nous n'avons pas besoin dans cette rétrospective, c'est d'une nouvelle forme de paternalisme : « Nous savons ce qui est bon pour les citoyens. » Le ricanement de l'ancien bourgmestre dans le journal cette semaine était une expression, une sublimation de l'ancienne culture politique. Lors de grands tournants, on espère secrètement que les habitants et habitantes soient impactés positivement et ne seront pas encore plus figés. Plutôt qu’être une figure de proue, le politique est celui ou celle qui donne un coup de pouce à sa ville tout en remerciant ses citoyens et citoyennes pour le soutien politique permettant le changement. Sans lequel cette transformation n’aurait pas été possible. Le doigt levé, qui a clairement fait sa réapparition, est une chose dont nous pouvons nous passer dans les débats urbains.

Ce qui est urgent et qui n'a pas été retenu dans l'article avec Bruzz, c'est mon appel à nous tous - citoyens, société civile, universités et politiques - à réfléchir à la direction que nous voulons prendre avec cette zone piétonne et par extension l'hypercentre de la Ville de Bruxelles. À quoi cela ressemblera-t-il en 2050, en tenant compte de tous les défis et besoins de ses citoyens et citoyennes en premier lieu.

Ce qui ne s'est pas passé comme prévu...

Il est trop crû de dire que le collège communal n'avait pas de vision pour cette intervention majeure à l'époque. Cependant, il peut être objectivement établi qu'un certain nombre de choses ne se sont pas déroulées comme espéré et proposé ou n'ont jamais été programmées. Voici quelques exemples :

1.           La reconstruction des avenues centrales était liée à une vision dépassée de la mobilité, comprenant 4 nouveaux parkings, qui hypothèqueraient la ville pour encore 50 ans. Heureusement, les citoyens et la société civile ont été suffisamment attentifs pour contrecarrer cette dernière. Je n'entends personne se vanter de cela. Depuis juin 2015, nous constatons au quotidien que ce plan de mobilité ne colle pas avec l'espace public renouvelé. Espérons que le nouveau plan de stationnement et de mobilité apporteront un certain soulagement.

2.           Un réaménagement de cet ordre devrait normalement aussi inclure un plan stratégique garantissant le maintien d'un équilibre entre les différentes fonctions - du commerce à l'espace pour les artistes, des équipements collectifs pour les citoyens à l'espace disponible pour les jeunes, les activités sportives. Idéalement, ce plan prend en compte tous les âges et tous les citadins. Il n'est pas question de refaire une nouvelle rue commerçante. Nous avons déjà une Rue Neuve, nous n'avons pas vraiment besoin d'une deuxième, même si Uplace et Neo ne voient jamais le jour.

3.           L'un des leviers de cet équilibre des fonctions est le grand nombre de propriétés appartenant à la Ville et à la Région dans le centre-ville. Avec cela, ils pourraient orienter, compenser, si l'équilibre est perturbé par le marché libre et les opportunistes qui ne pensent qu'à leur propre portefeuille. Même s'ils vendent cela comme « nous faisons du bien à la ville ». Il est donc regrettable que seule l'ancienne échevine de la mobilité signale ce potentiel dans son interview de cette semaine. Sa solution est, comme toujours, diamétralement opposée à son analyse. Vendre du patrimoine public au privé, c'est céder ses bijoux de famille.

4.           Les années de travail de Brussels Studies Institute- Brussels centre observatory (BSI-BCO), son analyse de l'hypercentre sous tous ses aspects, ses recommandations sur l'espace public, la mobilité, le commerce, le logement, ne sont pas prises en compte.[1] Comment pouvez-vous gouverner une ville et ignorer tout simplement ces études et d'autres encore ? Comment pouvez-vous prêcher la participation si vous ignorez les connaissances et l'expertise ? Bien sûr, gouverner signifie faire des compromis, mais si même cette étude étendue et approfondie, ayant coûté beaucoup d’argent au contribuable, est simplement classée, alors on peut être critique à ce sujet, n'est-ce pas ?

Il est important et nécessaire d'énumérer les points positifs de ce changement spatial comme point de départ de la réflexion. Mais il doit aussi y avoir de la place pour les frustrations, les déceptions. Et être critique ne signifie pas que vous ne vous souciez pas de cette zone piétonne, au contraire.

... peut encore être réparé        

Il est clair que la rénovation urbaine n'est pas quelque chose que l'on fait tout seul ; la rénovation urbaine n'est jamais terminée. Même un super bon plan n'est jamais terminé. La ville vit, un plan ne vit pas.

C'est pourquoi je réitère mon appel à impliquer les citoyens et citoyennes et la très large et active société civile de Bruxelles dans la rénovation urbaine. Faites-le non seulement dès les premières idées pour le permis d’urbanisme, mais aussi dans le suivi après les travaux, dans l'évaluation après quelques années et dans l'adaptation éventuelle des plans à la réalité changeante.

Où voulons-nous emmener cette zone piétonne et, par extension, l'hyper-centre de la ville de Bruxelles en 2050 ? Réfléchissons-y avec les citoyens, la société civile, les universités et les politiques.

Donnez une plateforme ou une scène à toutes ces voix, même si elles sont critiques. Sinon, vous sapez notre démocratie dans sa forme actuelle. La condition, bien sûr, est que ces commentaires, ces critiques, soient suffisamment fondés sur des faits et des arguments raisonnables et ne soient pas simplement une voix d'opposition. Une fois cette condition remplie, écoutez l'expertise, les connaissances des milliers de citoyens actifs qui travaillent sans relâche et le plus souvent bénévolement pour leur ville.

Depuis l'extension de la zone piétonne, l'espace public du centre de Bruxelles est suffisamment grand pour donner une place à toutes ces différences et opinions et pour servir de scène à la ville, où les discussions naissent et où l'on peut certainement ne pas être d'accord.

C'est aussi ça, le Piétonnier de Bruxelles.

Tom Lootens, président de BRAL, mouvement urbain pour Bruxelles

[1] Si vous voulez en savoir plus, vous pouvez lire la note de synthèse de 2017 ou le livre « Au-delà du Pentagone: Le centre-ville métropolitain de Bruxelles », que vous pouvez acheter à BSI ou emprunter dans la bibliothèque du BRAL, Place du Samedi 13, 1000 Bruxelles.

Carte blanche à l’initiative de la plateforme logement (FéBUL, RBDH, CSC Bruxelles, FGTB Bruxelles, Equipes Populaires Bruxelles, Inter-Environnement Bruxelles, MOC Bruxelles) paru sur la RTBF le 3 juin.

Signataires : Syndicat des locataires, Front commun des SDF, Front rendre visible l’Invisible, Droit à un Toit – Recht op een DAK, Infirmier de Rue, Syndicat des Immenses, CGEE, DoucheFLUX, Convivence, Hobo, Job Dignity, Action Logement Bruxelles, Le Forum – Bruxelles contre les inégalités, Fédération des maisons médicales, Union des locataires Quartier Nord, Communa ASBL, Réseau Wallon pour le Droit à l’Energie (RWADE), Réseau Wallon de Lutte contre la Pauvreté (RWLP), Fédé AMA, Fédération des Services Sociaux, Mouvement chrétien pour la paix, DUNE asbl, Union des locataires de Schaerbeek, Loyers Négociés, RWDH, Tuiniersforum des jardiniers, GAFFI asbl, Front Anti Expulsion, Comité de Défense de Saint-Gilles, Union des Locataires de Forest, Les ami.e.s du champ des cailles, Angela D. Union des Locataires d’Anderlecht Cureghem.

Le 27 janvier dernier, nous nous étions réjoui·es d'apprendre que le gouvernement bruxellois planchait sur une limitation de l'indexation des loyers à 2%. L'urgence sociale touchant de plus en plus de ménages à Bruxelles, comme dans l’ensemble du pays, cette mesure nous semblait non seulement amplement justifiée, mais aussi tout à fait réalisable. Et pourtant, la majorité régionale n’a pu se mettre d’accord sur la proposition de la Secrétaire d’État Madame Ben Hamou, le blocage semblant résulter d’un véto du parti Défi et des réticences de l’Open Vld.

Une inaction criminelle

On ne peut pas dire que la situation des locataires - qui représentent plus de 60% des ménages bruxellois - s'est soudainement améliorée. Bien au contraire. Ils et elles doivent faire face dans le même temps à une augmentation des loyers continue et disproportionnée (ces 10 dernières années, ils ont augmenté de 20% au-delà de l'indexation), une flambée des prix de l'énergie (pour certain·es, cela signifie un triplement de la facture d'énergie), le tout après deux ans de crise Covid, ponctués de diminution voire de perte de revenu.

Le dernier diagnostic de perspective.brussels nous rappelle en effet l'impact très lourd qu'a eu la pandémie pour de nombreux·ses Bruxellois·es, en particulier pour celles et ceux qui passent entre les mailles du filet de la sécurité sociale. Le risque de surendettement, de précarité énergétique et d'expulsion augmente. Avec celui-ci, le besoin d'intervention des services publics et services d'aide sociale. Les Bruxellois·es consacrent en moyenne 35% de leur budget au coût du logement (loyer et charges) mais cette moyenne cache de véritables disparités entre les ménages. Pour les plus pauvres, il ne reste quasiment plus rien une fois le loyer payé. Certain·es allocataires sociaux·ales consacrent en effet jusqu’à 70% de leur maigre allocation pour se loger. Des ménages postposent un rendez-vous chez le médecin, se privent d'une alimentation de qualité ou encore d'achat de matériel nécessaire pour le suivi scolaire de leurs enfants pour pouvoir payer (trop cher) le droit de vivre dans un logement trop souvent de mauvaise qualité et/ou surpeuplé[1].

La limitation de l'indexation : c’est légal et réaliste

Contrairement à l'idée répandue par les partis politiques refusant la limitation de l'indexation des loyers, celle-ci n'est ni inconstitutionnelle, ni irréaliste, ni irréalisable. Cette limitation vise à garantir le droit au logement, elle poursuit donc un intérêt général ; compte tenu de la croissance des loyers - bien supérieure à l’inflation - au cours des vingt dernières années à Bruxelles, ce n'est pas une limitation de l'indexation des loyers à 2% qui va soudainement plonger la plupart des bailleur·euses dans la précarité. Par contre, elle permettra à de nombreux ménages locataires de garder la tête hors de l'eau.

Une mesure désirable mais insuffisante

Au regard de l'urgence sociale et de la détresse grandissante des ménages bruxellois - gardons en tête que derrière chaque chiffre se cachent des situations familiales dramatiques, complexes et traumatisantes, dont il est pour certain·es difficile d'en sortir indemne -, la limitation de l'indexation des loyers est une mesure simple et rapide à mettre en place, mais clairement insuffisante dans un objectif sérieux de lutte contre la pauvreté.

Nous sommes à mi-mandat, et nous, œuvrant au sein d’associations de lutte contre la pauvreté au sens large, sommes inquiet·es et scandalisé·es. Inquiet·es, car c'est maintenant que les locataires subissent les conséquences de l'augmentation des coûts du loyer et de l'énergie. Inquiet·es, car les retours du terrain nous font part de services de première ligne déjà saturés, qui doivent faire face à des situations de détresse de plus en plus critiques. Inquiet·es et scandalisé·es, car nous constatons un immobilisme de certain·es responsables politiques en matière de lutte contre le mal-logement. Scandalisé·es de constater que les drames que vivent nos concitoyen·nes n'émeuvent pas suffisamment une partie de la sphère politique pour mettre en place des mesures simples et efficaces. Scandalisé·s de constater que pour certain·es, il est préférable de laisser sombrer une partie grandissante de notre population dans des situations dramatiques (expulsions domiciliaires, sans-abrisme...) plutôt que d'agir de manière structurelle sur le marché du logement. Scandalisé·es de ce blocage politique. Pourtant, il sera toujours socialement plus désirable - et même plus efficace - de prévenir la misère sociale plutôt que de tenter de la soigner.

Si des solutions peuvent être recherchées pour la petite minorité de propriétaires bailleurs précaires, il est temps de reconnaître que la majorité à protéger - y compris par une règle sur les montants des loyers - se trouve bien du côté des locataires.

Nous continuerons de dénoncer cet immobilisme. Parce que l’urgence sociale le nécessite, parce qu’aucune autre mesure ne permettra de le faire : ni la construction de logements neufs[2], ni une augmentation de l’aide sociale. Si l’on s’intéresse au bien-être de l’ensemble des habitant·es de Bruxelles, il faut accepter et soutenir les initiatives visant à réguler le marché locatif privé, en ce compris la limitation de l’indexation des loyers.

[1] La moitié de la population bruxelloise en situation de risque de pauvreté vit dans des logements considérés comme trop exigus par rapport à la taille de leur ménage, cfr rapport perspective.brussels https://perspective.brussels/fr/actualites/diagnostic-socio-economique-territorial-et-environnemental-de-la-region-de-bruxelles-capitale-suite

[2] Voir à ce sujet l’article du Bral : https://bral.brussels/fr/artikel/des-logements-suppl-mentaires-ne-feront-pas-baisser-les-prix

Des habitants d'Anderlecht et une association de protection de la nature ont eu raison de résister à la construction d'un hangar colossal dans la vallée du Vogelzangbeek.

Dans son jugement du 2 juin 2022, le Conseil flamand du Contentieux des Permis (Raad voor Vergunningsbetwistingen) a annulé le permis d'environnement accordé par la province du Brabant flamand pour la construction d'un énorme hangar agricole qui aurait entrainé une importante imperméabilisation du sol, dans une prairie à côté du Vogelzangbeek, qui forme la frontière entre Sint-Pieters-Leeuw et Anderlecht. Avec ce jugement, l'association de protection de la nature CCN Vogelzang CBN et les riverains de la rue du Chant d’Oiseaux à Anderlecht ont obtenu une victoire importante. Auparavant, le Conseil avait déjà suspendu le permis dans un jugement du 25/03/2021.

La décision du Conseil se fonde sur trois constatations importantes.

  1. L'enquête publique organisée par la commune de Sint-Pieters-Leeuw en novembre 2019 n’était pas valable. Il n'y avait pas d'affiche annonçant le projet à l’endroit où le hangar était prévu, au Kortvondelweg. En conséquence, les résidents et l'association de défense de la nature n'ont pas pu exercer leur droit de participation à un stade précoce du dossier.
  2. La prairie où la construction de cet énorme hangar était prévue est, selon le plan régional d’affectation du sol, située dans une zone agricole de grande valeur paysagère. Avec une hauteur de 11,8 mètres, ce hangar serait beaucoup plus haut que les bâtiments agricoles existants sur la parcelle, et les 4 000 m² d’imperméabilisation prévus par le projet entraîneraient une détérioration considérable de la structure écologique de la vallée. L'argumentation de la Province selon laquelle ce hangar ne causerait pas de dommages significatifs au paysage a été rejetée par le Conseil.
  3. Le Conseil évoque le doute quant à la capacité de l'installation de refroidissement envisagée à respecter les conditions légales de Vlarem II en matière de bruit. Bien que la Province, lors de l'octroi du permis, ait imposé des mesures de bruit après la mise en service, afin de remédier à d'éventuels dépassements par la suite, le Conseil affirme que ces mesures de bruit n'apportent aucune certitude quant au respect des conditions environnementales applicables.

Les vallées sont cruciales dans la lutte contre les effets négatifs du changement climatique

Dimanche 5 juin, pour la énième fois consécutive, nous avons été confrontés aux destructions et aux souffrances humaines causées par les inondations. Les prairies traditionnellement humides dans les vallées doivent pouvoir jouer à nouveau leur rôle de zone de tampon et apporter ainsi une contribution importante à la lutte contre les effets négatifs du changement climatique. Les bonnes intentions ne manquent pas dans les plans politiques des différentes autorités compétentes. La province du Brabant flamand accorde la priorité à la restauration des qualités vertes et bleues des zones de vallée, et la commune de Sint-Pieters-Leeuw indique qu'il faut exclure tout nouveau drainage dans les vallées. Comment est-il donc possible qu'une demande située dans une vallée vulnérable et classée en zone inondable puisse se voir accorder un permis en première instance par la Commune, puis en appel par la Province ?

Les habitants de la rue Chant d’Oiseaux à Anderlecht et les habitants de Negenmanneke à Sint-Pieters-Leeuw ne connaissent que trop bien les terribles conséquences des inondations de ces dernières années. L’annulation du permis d'environnement contesté est donc un grand soulagement.

Il reste à savoir si c'est la fin de l'affaire, car la Province a cinq mois pour prendre une nouvelle décision.

Contacts

Association nature:

CCN Vogelzang CBN: Bernadette Stallaert, bernadette.stallaert@gmail.com, 0478/344 142

Habitants:

Davy Deschepper: davydeschepper@gmail.com, 0486/563 820

Avocats : Gwijde Vermeire (vermeire.gwijde@telenet.be) et Hendrik Schoukens (Hendrik.Schoukens@UGent.be)

Facebook : CCN Vogelzang CBN: https://www.facebook.com/ccnvogelzangcbn/

Jugement du Raad voor Vergunningsbetwistingen: ci-joint, l’arrêté du 2/06/2022 n° RvVb-A-2122-0805