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Le report de la LEZ signifie deux années supplémentaires de résultats décevants

Le 1er septembre, le MR, Les Engagés et le PS ont annoncé leur intention de reporter de deux ans le renforcement de la LEZ bruxelloise, prévu pour 2025. Ceci alors qu'avec ExpAIR, nous constatons que la qualité de l'air dans quatre endroits de Bruxelles est illégalement mauvaise. 

Selon Bruxelles Environnement, les concentrations de NO2 à Bruxelles ont diminué de 30% depuis l'introduction de la LEZ en 2018. Une étude des Mutualités Libres montre que la pollution de l'air (suie, dioxyde d'azote, particules) diminue plus fortement à Bruxelles que dans les 17 villes testées sans LEZ. Cette étude confirme également que les quartiers défavorisés de Bruxelles sont les plus touchés par la pollution de l'air. Néanmoins, même dans ces quartiers plus pollués, la LEZ a contribué à une diminution plus rapide de certains polluants, tels que la suie et le dioxyde d'azote, avec une baisse allant jusqu'à 23 %.

Grâce aux mesures d'ExpAIR, nous mettons en évidence cette même inégalité sociale. Nous mesurons dans les endroits les plus pollués de Bruxelles, qui sont également liés aux quartiers les plus vulnérables. Par exemple, la rue Piers à Molenbeek est une rue résidentielle caractérisée par des concentrations excessives de pollution de l’air avec une moyenne annuelle de 46 µg/m³. C'est illégalement mauvais, et presque 5 fois plus élevé que ce que l'OMS autorise. Le report de la LEZ signifierait donc que les habitants qui vivent dans une rue comme la rue Piers devront vivre avec cette mauvaise qualité de l’air pendant encore au moins deux ans. La pollution de l'air est aussi avant tout un problème social, c'est pourquoi il est nécessaire de renforcer la LEZ afin d'améliorer les endroits qui absorbent le plus de pollution de l'air.

 

1. Une enquête publique, est-ce toujours democratique ?   

Vive les vacances !

Tout d'abord, nous tenons à souligner l'énorme technicité et l'ampleur de l'étude publique : 1 200 pages ! En effet, il ne s'agit pas seulement d'une question d'urbanisme mais aussi de mobilité, ce qui mérite toute l'attention des citoyens, des associations et des pouvoirs publics. Se plonger dans le dossier est une tâche ardue, et les différents niveaux (rez-de-chaussée, gare et bus) la rendent encore plus compliquée. Il est donc regrettable que le dossier ait démarré pendant les vacances scolaires. Il est difficile de l'expliquer à des citoyens inquiets ... depuis leur lieu de vacances. Et qu'en est-il d'une réunion d'information pour le public ?

La charrue avant les bœufs 

Le calendrier de réaménagement du site du CCN a fait l'objet d'un processus long, opaque et antidémocratique. Nous nous sommes déjà interrogés sur le fait que la demande de permis de construire a été déposée avant même que le PPAS ne soit soumis à la consultation publique. Les propriétaires du site avaient déjà obtenu l'autorisation de démolir le CCN et déposé une demande de permis pour ce qui remplacerait le bâtiment emblématique, avant même que l'analyse de l'impact du futur PPAS qui encadrerait le site ne soit achevée.

Outre cette approche antidémocratique, le projet lui-même était également inhabituel : explosion de la densité maximale autorisée, faibles garanties pour les logements sociaux et absence d'étude sur la mobilité. Ce dernier point a incité le BRAL, l'IEB, l'ARAU et un résident de la Résidence Nord à introduire un recours. L'examen de ce recours pourrait prendre des années, ce qui signifie que tout projet de réaménagement devra attendre, sous peine de rendre la construction sur le site illégale.

2. Mobilité

La gare du Nord est l'un des nœuds de transport les plus importants de la Région de Bruxelles-Capitale. Un tel projet devrait donc permettre d'améliorer la situation de la gare et de ses environs. Le fait que le projet (tant la version originale que la version modifiée) ne réponde pas aux défis de la mobilité n'est pas une surprise pour le BRAL. La complexité du territoire concerné est énorme et les différents usages de mobilité qui se croisent aux abords de la gare nécessitent une vision claire pour permettre une vision cohérente et partagée de l'espace public.  

Cependant, Bruxelles Mobilité travaille sur un « Masterplan fonctionnel et paysager des abords de la Gare du Nord », qui devrait fournir un cadre pour la mobilité et les espaces publics autour de la plaque tournante qu'est la gare du Nord de Bruxelles. Le BRAL estime que les résultats de cette étude auraient dû être publiés avant de soumettre le projet à un examen public.

Les besoins d’un hub multimodal

La circulation des bus est centrale au hub multimodal. C'est en effet celle-ci qui a posé problème dans la demande de permis d’urbanisme initiale et qui a requis des amendements majeurs. La note du projet amendé identifie d’ailleurs deux besoins principaux pour ce terminal bus :  

  • La possibilité pour les bus d’effectuer un demi-tour sur le site  
  • Une offre suffisante pour le stationnement sur le site  

Le manque de clarté des chiffres proposés et leur relative incomplétude nous amènent à penser que le projet amendé ne répond pas aux besoins du hub multimodal. Etant donné que l'offre de transport public ne fera qu'augmenter et que les bus jouent un rôle important dans les déplacements interrégionaux, notamment avec la Flandre à la gare du Nord, nous trouvons cela inacceptable.

Pour des chiffres et des données plus détaillés, voir l'objection.

Accord utilisation voirie SNCB

La base de cette nouvelle alternative pour le hub multimodal est un accord avec la SNCB pour permettre le partage de la « voirie couverte » dont elle est propriétaire. Cet accord est le seul moyen de réaliser le projet tel qu'il est proposé. Il est donc surprenant que l'enquête publique avec délai conditionnel parle d'accords possibles avec la SNCB. Si la SNCB changeait d'avis, nous serions dans une impasse et le projet devrait être reconsidéré.

Cette décision supprime également un accès piéton à la gare.

Electrification de la flotte

L’électrification de la flotte de bus est déjà en cours, comme en témoigne la mise en service des bus hybrides depuis plusieurs années et électriques depuis peu. L’entretien et le stationnement de ces derniers pose souvent problème au niveau des pompiers et des assurances au vu du risque d’inflammation posé. Nous nous étonnons dès lors que ce sujet n’ait absolument pas été couvert par le chargé d’étude. Il est tout de même question de nombreux bus stationnant sous des tours de bureaux, logement et équipements collectifs.

Un projet aux conséquences multiples sur les autres mobilités

Au vu des modifications proposées, il nous semble évident que la circulation cycliste nord-sud subira des conséquences irrémédiables sur le long terme. Particulièrement dû au fait que la traversée vélo longeant la Gare du Nord sera alors impossible à grande vitesse. Nous sommes également surpris que l'équipe d'étude n'ait pas pris en compte l'impact des plans sur la Cyclostrade (F3), un nœud interrégional essentiel entre Bruxelles et Louvain. Les nouveaux plans excluent l'option de faire passer la Cyclostrade le long de la Gare du Nord, ce qui serait préférable à la rue d'Aarschot (une route étroite et dangereuse) ou à l'avenue Albert II (rappelez-vous la mort du livreur à vélo après un accident avec un bus international). A ce sujet, le BRAL soutient l’avis rédigé par le Fietsersbond et le GRACQ, spécialistes en la matière.  

L’alternative choisie a également des conséquences importantes sur d’autres fonctions de mobilité. Suite aux modifications, les places de dépose-minute (au nombre de 5 actuellement) et les places de taxi (9 en total) devront être replacées ailleurs. Les porteurs de projet proposent, “en accord avec les acteurs concernés” la rue d’Aarschot pour cela. Malheureusement la réalité d’une telle opération n’a pas été étudiée dans la note complémentaire à l’étude d’incidence. Il nous semble également étonnant qu’une gare avec le statut de la Gare du Nord de dispose pas de plusieurs sites, au moins de part et d'autre des rails, de dépose minute ou de stationnement taxi.

3. Conclusion

Les choix posés dans le cadre du réaménagement du site CCN auront un impact bien au-delà du bâti et doivent être considérés dans leur ensemble. Sans surprises, l’aspect de la mobilité a été bâclé et ne répond en aucun cas aux défis que représentent une gare d’une telle envergure.  

Sur base de ces commentaires, le BRAL demande à la commission de concertation de remettre un avis négatif concernant le réaménagement du site CCN.

 

La personne engagée, qui animera le centre de documentation d’IEB, sera chargée :

  • de contribuer à la modernisation des bases de données de l’association (bibliothèque, archives, revue de presse)
  • d’augmenter la visibilité du Centre de documentation en stimulant la production d’outils, et ce, dans une perspective d’éducation permanente ;
  • de veiller à l’accessibilité du catalogue d’IEB ;
  • de commander les livres et revues ;
  • d’assurer le rangement de la bibliothèque et d’accompagner les visiteur·euses.

Profil recherché, Compétences, Formations, Expérience

  • Niveau bachelier (barème 4.1 de la CP 329.02)
  • Formation en bibliothécaire-documentaliste ou toute autre formation en lien avec la fonction (par ex. bibliothéconomie)
  • Bonnes compétences informatiques : création et gestion de bases de données, publication de contenus web
  • Bonne connaissance de Bruxelles, son tissu associatif et ses institutions
  • Intérêt pour l’urbanisme, l’environnement et la mobilité en région bruxelloise
  • Capacité de travail en équipe
  • La connaissance passive du néerlandais est un plus

Offre-et-conditions

  • Contrat en CDI et à temps plein
  • Être dans les conditions ACS
  • Chèques repas et abonnement STIB
  • Engagement au 1er novembre 2024

Comment postuler

Les candidatures (CV + lettre de motivation) sont à envoyer à l’adresse emploi@ieb.be.

Date de clôture des candidatures : dimanche 31 octobre 2024 à minuit.

portret Hilde

38 ans ! C'est la durée pendant laquelle Hilde Geens a travaillé pour BRAL. Elle est d'ailleurs la seule à avoir organisé un pot de départ à la retraite jusqu'à présent. Elle était donc là pratiquement depuis le début et s'est surtout plongée dans les dossiers d'urbanisme. Elle a également écrit un livre sur les actions des habitants du quartier européen. Sa vaste expérience et ses connaissances sont une mine d'informations pour l'interview.
 

portret steyn

Steyn Van Assche était responsable de l'urbanisme au BRAL. C'est en interrompant une conversation à Schaerbeek-Formation pour évoquer le chant du petit pluvier que Steyn est le plus représentatif. Si vous le cherchiez, vous saviez que vous le trouveriez quelque part entre 'de soep en de patatten'. Ce sont des proverbes comme celui-ci qui décrivent le mieux pour Steyn la planification parfois impénétrable de Bruxelles. Pendant 17 ans, il a développé et défendu la position du BRAL en combinant sa connaissance approfondie de dossiers tels que Tour & Taxis et Josaphat avec son vaste réseau et ses talents de naturaliste.
 

Steyn 

Comment as-tu vu évoluer l'implication des citoyens et de la société civile dans le développement urbain à Bruxelles ? 

Hilde 

Bruxelles a beaucoup évolué depuis les années 70, et cela vaut aussi pour le BRAL et le secteur associatif. J'ai rejoint le BRAL en 1979, à une époque où Bruxelles n'était pas encore une région distincte. Les structures étaient différentes, et le BRAL était la seule organisation néerlandophone à s'intéresser à l'urbanisme et à l’environnement urbain. À l’époque, pour les néerlandophones, le principal enjeu à Bruxelles était la langue. Les conseils socio-culturels, qui allaient devenir les centres communautaires, étaient surtout centrés sur la lutte pour les droits de la minorité flamande. Côté francophone, on s’inquiétait davantage de la qualité de vie en ville. 

Le BRAL a été fondé en 1973, suivi six mois plus tard par IEB, et faisait alors partie de la confédération Bond Beter Leefmilieu / Inter-Environnement. Au milieu des années 70, la confédération s’est dissoute, et les quatre fédérations ont suivi des chemins distincts : Bond Beter Leefmilieu Vlaanderen, Inter-Environnement Wallonie, Brusselse Raad voor Leefmilieu et Inter-Environnement Bruxelles. L’ARAU est même un peu plus ancien. 

Steyn 

À cette période, le tout premier plan régional a été élaboré, et est entré en vigueur en 1979. Le BRAL, encore très petit, s’est mobilisé pour sensibiliser les associations locales et les groupes d'action sur l'importance de ce plan régional et les changements qu’il allait apporter à leur environnement. 

Les citoyens et les associations avaient-ils un forum officiel pour se prononcer sur ce  premier plan de secteur ? 

L'approche du BRAL n’a jamais été linéaire, les alliances ont souvent changé.

Hilde

Hilde 

Il existait un précurseur de la Commission régionale de développement actuelle, avec une composition différente, incluant notamment les syndicats. De plus, il était possible de déposer des recours, ce que les Bruxellois ont fait en nombre. 

Steyn 

En somme, c'était une enquête publique avant l’heure, où BRAL rassemblait et soutenait les citoyens. 

À cette époque, avec la lutte contre la construction des voies d’accès et les démolitions de quartiers, les manifestations étaient-elles nombreuses ? 

Hilde 

Absolument ! La lutte pour le quartier nord en est l'exemple le plus marquant, mais il s'est passé des choses similaires ailleurs à Bruxelles. Le projet de plan de secteur prévoyait notamment de boucler le Ring sud en traversant les zones vertes d'Uccle. Les comités néerlandophones locaux y étaient favorables, tandis que les francophones souhaitaient préserver le patrimoine et les espaces verts. Le BRAL a pris le parti des espaces verts, ce qui lui a coûté une partie de son soutien néerlandophone à Uccle. 

Dans bien des dossiers, c’est le contexte qui a orienté les choix. L'approche du BRAL n’a jamais été linéaire, les alliances ont souvent changé. 

Picnic the Streets en 2012 a été le premier exemple du pouvoir de mobilisation des médias sociaux.

Hilde

Steyn 

On a retrouvé cette dynamique vers la fin des années 90, avec la création des premiers contrats de quartier, centrés sur la qualité de vie. Le BRAL a joué un rôle via des processus de participation officiels, mais on a aussi vu des actions « Reclaim the City » pour réclamer l’espace public sur le boulevard Anspach. Ce sont deux rôles distincts du BRAL, entre la consultation formelle et l'action plus directe pour faire avancer des idées. 

Hilde 

Les moyens de communication jouent un rôle crucial. Avec l’arrivée des réseaux sociaux, des actions comme « Picnic the Streets » en 2012 ont eu une capacité de mobilisation sans précédent. Dans les années 80, la mobilisation se faisait différemment. À l’époque, nous avions mené une vaste campagne sur l’espace public en amont des élections communales. Les habitants, munis d’une brochure, d’un pochoir en forme d’empreinte de pied d’enfant surmontée d’une couronne et d’une bombe de peinture, étaient invités à descendre dans la rue. La brochure expliquait les attentes légales pour un trottoir de qualité, avec des exemples concrets. Les participants étaient ensuite invités à marquer les trottoirs dégradés avec l’empreinte et à nous envoyer une liste. C’était de la science citoyenne avant l’heure, et la campagne a bien pris, car elle était concrète et directe. 

Les principes d'urbanisme, en revanche, sont plus abstraits et demandent une vision à long terme, car ils relèvent souvent du domaine technique et juridique. J'ai toujours trouvé fascinant d'explorer la législation urbanistique pour voir comment elle peut être utilisée pour améliorer les quartiers. 

 

Klachtofoon van het voetvolk

 

Steyn 

Au début des années 2000, nous menions le combat sur deux fronts avec BRAL : d’un côté, en soutenant les résidents et en nous opposant à certaines propositions ; de l’autre, en exerçant une pression sur le gouvernement pour infléchir les décisions. C’est alors que BRAL a choisi de s’impliquer dans un processus participatif autour de l’élaboration des grands plans de développement urbain, et cela a vraiment marqué un tournant. Il est devenu clair qu’une approche plus collaborative et créative était possible, avec un engagement des citoyens bien plus en amont. Au lieu de négocier un plan en coulisses pour le soumettre ensuite à une enquête publique, où l’on ne pouvait pratiquement plus que discuter de la couleur des pavés, il s’agissait ici de se concentrer sur les aspects fondamentaux du programme dès le départ. 

À l'époque, nous avons aidé à gérer la participation pour Tour et Taxis et le Cité Administrative de l’Etat. C'était un moment où une certaine ouverture existait à l'époque, bien qu'avec des degrés de réussite variables.  

Hilde 

Cela a posé un dilemme pour le BRAL : « Est-ce vraiment notre rôle ? Devons-nous rester dans l'opposition, ou choisir le dialogue et éventuellement des compromis ? » Concernant Tour et Taxis, cette ouverture existait grâce aux actions de terrain. Des investisseurs privés prévoyaient une grande salle de concert, Music City, qui aurait profondément changé le quartier et détruit le patrimoine historique. Une collaboration efficace entre groupes locaux et régionaux a permis de stopper ce projet et a révélé que les investisseurs n'avaient pas les moyens nécessaires. Grâce à cette ouverture, le BRAL a pu participer au processus de concertation. 

Steyn 

Cela convenait également à la politique dans le jeu de pouvoir avec les promoteurs privés. La mobilisation était clairement contre de très mauvais plans. Cela nous a mis dans une position de négociation, nous permettant d'expérimenter cette nouvelle façon de faire la ville.  

Nous avons toujours suivi ces deux voies, du contre-mouvement au partenaire potentiel des gouvernements.

Steyn

Hilde 

La mobilisation moindre autour de certains dossiers plus récents n’est donc pas nécessairement due à la qualité des plans. Prenons le quartier européen, par exemple : on peut dire que les plans n’étaient pas bons. Le dossier est tellement complexe, avec des enjeux si importants, qu’il est difficile de trouver une ouverture. De plus, la mobilisation y est particulièrement compliquée, car il y a peu de résidents et des intérêts politiques prédominants. Contrairement à d’autres projets urbains, la dimension internationale joue ici un rôle majeur, rendant l’implication des citoyens encore plus ardue et parfois démotivante dès le départ. La bataille qui y a eu lieu s’est donc largement déroulée sur le plan juridique. L’histoire du quartier européen est marquée par des poursuites judiciaires, des alliances inattendues avec le secteur privé pour faire avancer certains aspects, ainsi que par de nombreux comités et consultations interminables. 

Le BRAL a dû y jouer un rôle très différent de celui qu’il a tenu pour Tour et Taxis. D’ailleurs, était-ce ton premier grand dossier ? 

Steyn 

Oui. À Tour et Taxis, nous avons commencé par participer aux discussions des contrats de quartier, en nous appuyant sur notre connaissance du terrain, acquise notamment durant les manifestations contre les projets précédents. Ensuite, nous avons pu participer officiellement, avec une bonne coopération, même si cela a été compliqué. Nous avons reçu une reconnaissance pour le travail accompli, et les habitants ont été impliqués pour élaborer le programme. 

Nous restons toutefois déçus que si peu de logements abordables aient été créés sur le site. 

Hilde 

Tous les grands projets urbains n’ont pas eu autant de succès… 

Steyn 

En effet, sur le site Josaphat, nous avons rapidement pris le chemin d’un mouvement de contre-projet classique avec notre Manifeste Plan B Josaphat. Nous avons réuni un large consortium de voisins, de comités, ainsi que Natagora et divers partenaires, pour proposer des alternatives à un plan directeur déjà existant et ainsi réinscrire nos idées dans l’agenda politique. 

Nous avons toujours suivi ces deux voies, du contre-mouvement au partenaire potentiel des gouvernements. Le BRAL continue d’emprunter cette double approche. Parfois, nous menons les dossiers en tant que mouvement citoyen ; parfois, ce sont les citoyens qui prennent les devants, et lorsqu’ils y investissent autant d’énergie, nous sommes là pour les soutenir ou travailler en retrait, leur permettant de briller. C’est ce que nous avons fait à de nombreuses reprises. La friche Josaphat a d’ailleurs permis de sensibiliser encore davantage à la valeur biologique, au réseau écologique urbain et à l’importance de la nature en ville. 

C’est ce que le BRAL peut continuer de faire dans les cinquante prochaines années : capter cet enthousiasme et l’enrichir grâce aux connaissances accumulées. 

Steyn

Le BRAL a aussi été très actif dans les contrats de quartier. 

Hilde 

Les premiers, appelés « Quartiers d’initiatives », répondaient aux émeutes et problèmes structurels dans des quartiers comme Cureghem et Molenbeek, avec une priorité donnée à l’espace public et à l’emploi. Cela a ensuite évolué vers les contrats de quartier, avec des subventions importantes. 

Steyn 

Les quartiers se sont battus pour replacer l’habitabilité de la ville au cœur de l’agenda. 

Hilde 

Les contrats de quartier sont un exemple de réponse top-down, un modèle importé de France. 

Steyn 

Le BRAL a également contribué à influencer l’agenda, notamment à Saint-Josse, précurseur des contrats de rénovation urbaine. 

Hilde 

En effet. Lorsque j'ai rejoint BRAL, notre approche de travail était décentralisée et ancrée dans les quartiers, presque comme un travail de proximité. Mon lieu d’affectation était Haren avec le projet Chiconville, tandis que mes collègues étaient répartis à Forest, Molenbeek, au Parc Baudouin à Jette et même à Saint-Josse. Cependant, avec la précarité des subventions, il était difficile de garantir une présence à long terme sur le terrain. Le conseil d’administration de l’époque a alors décidé de mettre fin à cette activité locale et de recentrer nos efforts sur un rôle de soutien en deuxième ligne. 

Cette tension entre une approche locale et une vision plus globale a toujours été présente dans la méthode de BRAL. Au fil du temps, l’aspect local a peut-être perdu de son importance : aujourd’hui, les gens se rassemblent davantage autour de préoccupations communes plutôt qu’en fonction de leur proximité géographique. Les initiatives sont devenues plus thématiques, comme les projets sur la qualité de l’air ou la mobilité. L’engagement envers les résidents et les citoyens est toujours là, mais il n’est plus nécessairement centré sur le quartier. 

Steyn 

Avec l’arrivée d’internet et de nouvelles technologies, il est devenu plus facile de travailler sur des thèmes et de mobiliser à l’échelle régionale, voire au-delà. Au niveau régional et thématique, maintenir l’intérêt d’un large groupe est plus aisé, car de nouveaux défis se présentent souvent. Mais au niveau local, c’est plus compliqué, comme avec l’incinérateur de Neder-Over-Heembeek. Les menaces y sont très concrètes. 

Un obstacle majeur est le temps. Quand la solution tarde à venir, ou que l’urgence semble passée, il devient difficile de maintenir l’engagement local. 

Hilde 

Ce sont souvent l’enthousiasme et la volonté d’agir qui comptent le plus. 

Steyn 

C’est ce que le BRAL peut continuer de faire dans les cinquante prochaines années : capter cet enthousiasme et l’enrichir grâce aux connaissances accumulées. 

 

Chiconville