Objection du CCN : négligence du nœud de mobilité
Le BRAL dépose une objection au projet CCN à la gare du Nord. Outre l'explosion de la densité maximale autorisée et les faibles garanties en matière de logement social, l'importance de la Gare du Nord en tant que nœud de mobilité est totalement négligée.
1. Une enquête publique, est-ce toujours democratique ?
Vive les vacances !
Tout d'abord, nous tenons à souligner l'énorme technicité et l'ampleur de l'étude publique : 1 200 pages ! En effet, il ne s'agit pas seulement d'une question d'urbanisme mais aussi de mobilité, ce qui mérite toute l'attention des citoyens, des associations et des pouvoirs publics. Se plonger dans le dossier est une tâche ardue, et les différents niveaux (rez-de-chaussée, gare et bus) la rendent encore plus compliquée. Il est donc regrettable que le dossier ait démarré pendant les vacances scolaires. Il est difficile de l'expliquer à des citoyens inquiets ... depuis leur lieu de vacances. Et qu'en est-il d'une réunion d'information pour le public ?
La charrue avant les bœufs
Le calendrier de réaménagement du site du CCN a fait l'objet d'un processus long, opaque et antidémocratique. Nous nous sommes déjà interrogés sur le fait que la demande de permis de construire a été déposée avant même que le PPAS ne soit soumis à la consultation publique. Les propriétaires du site avaient déjà obtenu l'autorisation de démolir le CCN et déposé une demande de permis pour ce qui remplacerait le bâtiment emblématique, avant même que l'analyse de l'impact du futur PPAS qui encadrerait le site ne soit achevée.
Outre cette approche antidémocratique, le projet lui-même était également inhabituel : explosion de la densité maximale autorisée, faibles garanties pour les logements sociaux et absence d'étude sur la mobilité. Ce dernier point a incité le BRAL, l'IEB, l'ARAU et un résident de la Résidence Nord à introduire un recours. L'examen de ce recours pourrait prendre des années, ce qui signifie que tout projet de réaménagement devra attendre, sous peine de rendre la construction sur le site illégale.
2. Mobilité
La gare du Nord est l'un des nœuds de transport les plus importants de la Région de Bruxelles-Capitale. Un tel projet devrait donc permettre d'améliorer la situation de la gare et de ses environs. Le fait que le projet (tant la version originale que la version modifiée) ne réponde pas aux défis de la mobilité n'est pas une surprise pour le BRAL. La complexité du territoire concerné est énorme et les différents usages de mobilité qui se croisent aux abords de la gare nécessitent une vision claire pour permettre une vision cohérente et partagée de l'espace public.
Cependant, Bruxelles Mobilité travaille sur un « Masterplan fonctionnel et paysager des abords de la Gare du Nord », qui devrait fournir un cadre pour la mobilité et les espaces publics autour de la plaque tournante qu'est la gare du Nord de Bruxelles. Le BRAL estime que les résultats de cette étude auraient dû être publiés avant de soumettre le projet à un examen public.
Les besoins d’un hub multimodal
La circulation des bus est centrale au hub multimodal. C'est en effet celle-ci qui a posé problème dans la demande de permis d’urbanisme initiale et qui a requis des amendements majeurs. La note du projet amendé identifie d’ailleurs deux besoins principaux pour ce terminal bus :
- La possibilité pour les bus d’effectuer un demi-tour sur le site
- Une offre suffisante pour le stationnement sur le site
Le manque de clarté des chiffres proposés et leur relative incomplétude nous amènent à penser que le projet amendé ne répond pas aux besoins du hub multimodal. Etant donné que l'offre de transport public ne fera qu'augmenter et que les bus jouent un rôle important dans les déplacements interrégionaux, notamment avec la Flandre à la gare du Nord, nous trouvons cela inacceptable.
Pour des chiffres et des données plus détaillés, voir l'objection.
Accord utilisation voirie SNCB
La base de cette nouvelle alternative pour le hub multimodal est un accord avec la SNCB pour permettre le partage de la « voirie couverte » dont elle est propriétaire. Cet accord est le seul moyen de réaliser le projet tel qu'il est proposé. Il est donc surprenant que l'enquête publique avec délai conditionnel parle d'accords possibles avec la SNCB. Si la SNCB changeait d'avis, nous serions dans une impasse et le projet devrait être reconsidéré.
Cette décision supprime également un accès piéton à la gare.
Electrification de la flotte
L’électrification de la flotte de bus est déjà en cours, comme en témoigne la mise en service des bus hybrides depuis plusieurs années et électriques depuis peu. L’entretien et le stationnement de ces derniers pose souvent problème au niveau des pompiers et des assurances au vu du risque d’inflammation posé. Nous nous étonnons dès lors que ce sujet n’ait absolument pas été couvert par le chargé d’étude. Il est tout de même question de nombreux bus stationnant sous des tours de bureaux, logement et équipements collectifs.
Un projet aux conséquences multiples sur les autres mobilités
Au vu des modifications proposées, il nous semble évident que la circulation cycliste nord-sud subira des conséquences irrémédiables sur le long terme. Particulièrement dû au fait que la traversée vélo longeant la Gare du Nord sera alors impossible à grande vitesse. Nous sommes également surpris que l'équipe d'étude n'ait pas pris en compte l'impact des plans sur la Cyclostrade (F3), un nœud interrégional essentiel entre Bruxelles et Louvain. Les nouveaux plans excluent l'option de faire passer la Cyclostrade le long de la Gare du Nord, ce qui serait préférable à la rue d'Aarschot (une route étroite et dangereuse) ou à l'avenue Albert II (rappelez-vous la mort du livreur à vélo après un accident avec un bus international). A ce sujet, le BRAL soutient l’avis rédigé par le Fietsersbond et le GRACQ, spécialistes en la matière.
L’alternative choisie a également des conséquences importantes sur d’autres fonctions de mobilité. Suite aux modifications, les places de dépose-minute (au nombre de 5 actuellement) et les places de taxi (9 en total) devront être replacées ailleurs. Les porteurs de projet proposent, “en accord avec les acteurs concernés” la rue d’Aarschot pour cela. Malheureusement la réalité d’une telle opération n’a pas été étudiée dans la note complémentaire à l’étude d’incidence. Il nous semble également étonnant qu’une gare avec le statut de la Gare du Nord de dispose pas de plusieurs sites, au moins de part et d'autre des rails, de dépose minute ou de stationnement taxi.
3. Conclusion
Les choix posés dans le cadre du réaménagement du site CCN auront un impact bien au-delà du bâti et doivent être considérés dans leur ensemble. Sans surprises, l’aspect de la mobilité a été bâclé et ne répond en aucun cas aux défis que représentent une gare d’une telle envergure.
Sur base de ces commentaires, le BRAL demande à la commission de concertation de remettre un avis négatif concernant le réaménagement du site CCN.